La commission bancaire de l’Union monétaire ouest-africaine a démissionné le directeur général du Crédit Mutuel du Sénégal, Mohamed Ndiaye. La décision a été notifiée au ministère de l’Économie, des Finances et du Plan.
La sanction est tombée. Selon des informations de SeneWeb, la commission bancaire de l’Union monétaire ouest-africaine (Umoa) a demandé au directeur général du Crédit Mutuel du Sénégal (Cms), Mohamed Ndiaye, de démissionner de son poste. La décision a été prise le 29 juin et notifiée le lendemain, 30 juin, à l’intéressé ainsi qu’au ministre de l’Économie, des Finances et du Plan, Amadou Bâ. Elle survient donc moins de quinze jours après l’audition, le 16 juin dernier, du désormais ex-patron du Cms par la commission basée à Abidjan, en Côte d’Ivoire.
Nos sources confient que Mohamed Ndiaye a accepté de rendre le tablier. Qu’il paie les « graves manquements de gestion » pointés dans le rapport d’audit de la commission bancaire de l’Umoa, qui s’est penchée récemment sur le fonctionnement du Cms. Les auditeurs, apprend-on, ont souligné 229 insuffisances dans sa gestion. On lui reproche, entre autres, des hausses successives de salaire en 2013, en 2014 et en 2015 ainsi que l’absence de suivi de ses avantages en nature (téléphone, électricité, eau, etc.). Par exemple pour le téléphone, poste pour lequel il lui est octroyé annuellement 6 millions, il a fait un dépassement cumulé de 917 mille 593 francs CFA, entre 2013, 2014 et 2015.
La thèse du complot
Nos tentatives de joindre le désormais ex-DG du Cms sont restées vaines. À chacun de nos appels sur son numéro, nous sommes systématiquement renvoyés vers sa boite vocale. Nos messages vocaux ainsi que nos SMS sont pour l’instant restés sans suite.
Un agent du ministère des Finances rapporte que Mohamed Ndiaye conteste les résultats de l’audit de la commission bancaire de l’Umoa. Estimant que les raisons invoquées pour justifier son limogeage sont « subjectives ». Il se dit victime « d’un règlement de comptes qui risque de porter atteinte aux intérêts du Sénégal ». Il voulait, nous dit-on, tenir une conférence de presse pour prouver qu’il est « victime d’un complot, mais il a été dissuadé par les autorités ».
Un de nos interlocuteurs au ministère des Finances rapporte que le ministre des Finances, Amadou Bâ, a pris acte de la décision de la commission bancaire de l’Umoa en se gardant cependant de prendre position officiellement. Pour le moment. Selon notre informateur, « les gens ont même tendance à penser que le DG du Cms faisait du bon travail. Il a fait passer le Cms de 500 000 adhérents en 2011 à près d’un million de membres en 2015. Sur la même période, il a porté l’épargne de 97 milliards à 141 milliards. Celle-ci se stabilise aujourd’hui à plus de 150 milliards. Et sur les 229 insuffisances soulignées par le rapport d’audit, 194 ont été corrigées en un semestre. Le reste est en cours et devrait être ajusté avant la fin de l’année ».
Une autre source de SeneWeb se veut formelle : « On lui (Mohamed Ndiaye) cherche tout simplement des poux. Pour des raisons qu’on ignore, le président de la commission bancaire de l’Umoa, le Nigérien Alou Daoura Abdou, ne le supporte pas. Il a une taupe au niveau du Cms qui l’informe de tout ce qui se passe dans la boite. Cette taupe était même au courant du limogeage du DG avant que celui-ci ne soit acté. La décision a été signée le 29 juin et notifiée le 30 juin à l’intéressé. Mais le 20 juin déjà, la taupe a envoyé des SMS à des agents du Cms pour les informer. Un huissier a constaté les SMS et lorsque la personne mise en cause a été saisie, il a présenté ses excuses devant le Comité de direction en reconnaissant avoir parlé à Daoura Abdou le vendredi 17 juin et le lundi 19 juin. »
L’État entre le marteau et l’enclume
Notre interlocuteur affirme que les augmentations de salaire évoquées dans le rapport de la commission de l’Umoa n’existent pas. « Depuis juillet 2012, le salaire de Mohamed Ndiaye n’a pas augmenté d’un franc, avance-t-il. À propos de ses avantages en nature, il faut souligner que le dépassement de 917 mille francs CFA relevé dans le Rapport est insignifiant pour un DG d’une entreprise de la taille de Cms, et cela inclut l’internet. Pour l’électricité et l’eau, le DG a toujours fait des économies pour l’entreprise. En 2013, en 2014 et en 2015, il n’a dépensé sur les 6 millions qui lui sont affectés annuellement que 3,1 millions, 1,7 million et 2,5 millions, respectivement. Il a fait des économies. Pour l’eau, il paie lui-même sa facture alors que le Cms lui octroie 75 mille francs pour chaque facture. Sans compter que le rapport a reconnu ses performances en matière d’inclusion financière. »
Un agent du Cms acquiesce. Et ajoute que le Comité de direction réuni le 21 juin, l’Assemblée des actionnaires, tenue le 25 juin, et le Conseil d’administration, en session le 27 juin, ont « tous manifesté leur soutien à Mohamed Ndiaye pour sa gestion ». Les deux dernières instances ont rejeté sa démission qu’il avait présentée le 25 juin.
« L’État est entre le marteau et l’enclume, révèle une source au ministère des Finances. Il veut certainement soutenir Mohamed Ndiaye, mais il ne peut passer outre une décision de l’Umoa sans avoir des raisons objectives solides à opposer éventuellement. Ils (les pouvoirs publics) sont en train de voir quelle position adopter. »
avec Seneweb