La tension ne cesse de monter en Guinée au lendemain de la demande par les sept adversaires du chef de l’État sortant Alpha Condé de l’annulation du premier tour de la présidentielle.
Si le scrutin s’est globalement déroulé dans le calme dimanche 11 octobre, les esprits se sont très rapidement échauffés. Les premiers résultats ne sont pas attendus avant plusieurs jours, la Commission électorale nationale indépendante (Céni) disposant de 72 heures à partir de la réception du dernier procès verbal des quelque 14 000 bureaux de vote pour annoncer les résultats provisoires. Pourtant, les sept adversaires d’Alpha Condé ont déjà fait part de leur désaccord.
Énumérant les difficultés en tout genre observées lors du vote – retards, manque de matériel, électeurs sans carte ou au contraire munis de carte mais ne figurant pas sur le registre de leur bureau, listes sans ordre ni alphabétique ni numérique – ils ont dénoncé une « fraude massive » et réclamé l’annulation du premier tour. « Nous demandons son annulation et nous ne reconnaîtrons pas les résultats qui vont être issus de ces urnes », a affirmé Cellou Dalein Diallo, lors d’une conférence de presse conjointe avec les six autres concurrents d’Alpha Condé, promettant de mobiliser ses partisans dans la rue.
« On n’a a pas de recours, la justice est inféodée, la justice, la Céni, les institutions ne sont pas des institutions indépendantes, malheureusement », a-t-il estimé. L’ancien Premier ministre Sidya Touré, se disant particulièrement visé par la fraude, a de son côté accusé le pouvoir de chercher à « éliminer le parti le plus consensuel qui puisse exister, pour maintenir toujours la fracture politico-communautaire que les uns et les autres veulent entretenir ». Son parti, l’Union des forces républicaines (UFR), a par conséquent décidé de se retirer du processus électoral.
Privilégier la justice à la rue
Le ministre de la Jeunesse, Moustapha Naité, directeur de la communication de la campagne d’Alpha Condé, a en revanche jugé « assez bizarre et étonnante » cette demande d’annulation de l’opposition. « Ils n’ont même pas attendu que les résultats du vote soient centralisés », a-t-il déclaré, appelant à « garder le calme ».
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a quant à lui salué lundi 12 octobre « la conduite paisible » du premier tour, exhortant les forces politiques à « s’abstenir de toute déclaration qui pourrait mener à des violences ». L’Union européenne se félicitant de l’absence de violences le jour du scrutin, a à son tour enjoint, mardi 13 octobre, les opposants à privilégier la justice à la rue.
Le responsable de la mission, le Luxembourgeois Frank Engel, a appelé « à transférer le terrain des contestations qui peuvent avoir lieu en Guinée devant les juges au lieu de les faire vivre dans la rue », lors d’une conférence de presse à Conakry où il a également vivement critiqué « l’impréparation » de la commission électorale, dont il a regretté qu’elle n’ait pas suivi l’ensemble des conseils qui lui avaient été donnés. Les conclusions des différentes missions d’observation internationales sur le déroulement du scrutin sont par ailleurs très attendues.
Avec JeuneAfrique