Après plusieurs mois de baisse contre toutes les devises, le Dollar a pris le chemin inverse ces dernières semaines. La hausse des taux courts déjà enclenchée par la Banque Centrale Américaine (FED) et la perspective d’un retour progressif à une politique monétaire plus conventionnelle provoquent une relative raréfaction de Dollars.
Les troubles plus récents dans le Sud de l’Europe, Italie en tête, pèsent désormais plus particulièrement sur l’Euro et favorisent aussi le Dollar. L’Euro a baissé de 7% par rapport à son pic de 1.25 pour 1 Dollar atteint en février ; mercredi dernier, au plus fort des doutes sur la politique italienne, il est même venu tester des niveaux de 1.15 plus connus depuis début 2017.
Beaucoup de grandes entreprises américaines réalisent une part importante de leurs bénéfices hors des Etats-Unis. En 2017, la situation était donc très confortable pour elles : la conversion de ces résultats en Dollar leur était bénéfique. La situation pourrait s’inverser complètement si le Dollar reprend durablement le chemin de la hausse.
Pour le moment les conséquences de la hausse récente sont encore marginales pour les entreprises américaines : les méthodes de comptabilisation ne sont pas homogènes et les techniques de couverture des grands groupes exportateurs s’avèrent en pratique très différentes entre elles. Il est donc encore très difficile d’évaluer l’impact de la hausse récente du Dollar sur les résultats des entreprises américaines.
Il est évident, a contrario, que si la hausse s’amplifie et dure quelques mois, les entreprises les plus exportatrices souffriraient. L’Euro a été pénalisé par les problèmes politiques italiens et espagnols ces derniers jours, mais le Dollar n’a pas seulement progressé par rapport à la devise européenne mais aussi par rapport à pratiquement toutes les devises mondiales. Comparé à un panier représentatif de devises, le Dollar a progressé de 5%. Le différentiel de croissance enregistré depuis début avril entre les Etats-Unis et la majeure partie des pays expliquent aussi l’évolution récente des devises.
Paradoxalement, une forme d’inquiétude commence à apparaitre suite aux résultats annoncés par les entreprises américaines du premier trimestre. Ils étaient pourtant excellents avec une progression de 25% sur un an ! Mais, compte tenu du plan fiscal massif mis en œuvre par D. Trump, les analystes s’attendaient à mieux encore. Beaucoup pensent que les résultats des entreprises américaines ont atteint un pic. Ce sentiment devrait être encore plus prégnant si la hausse du Dollar se confirme. Le secteur de la technologie par exemple tire plus de 50% de ses revenus hors des Etats-Unis, il en est de même pour beaucoup d’entreprise du secteur de la consommation. Ces secteurs seront pénalisés par un Dollar fort. A l’inverse des télécoms, certains services ou l’immobilier seront peu touchés : leur activité est domestique. Quelques banques régionales ou constructeurs immobilier n’ont pas du tout d’exposition hors Etats-Unis et sont donc totalement « immunisés ».
Pour le moment, il est prématuré d’initier des stratégies d’investissement « actions » sur la seule base d’une réflexion concernant le Dollar. Les analystes financiers n’ont pas encore révisé leurs anticipations de résultats en prenant en compte un Dollar fort pendant plusieurs mois. Ils seront contraints de le faire si la devise américaine se renforce encore.
En ce moment, c’est principalement la Chine et les risques de guerre commerciale qui préoccupent les investisseurs en actions américaines. Le secteur des petites et moyennes valeurs en profite : les entreprises qui le compose sont moins exposés aux risques liés à une hausse des droits de douane et sont d’ailleurs moins en risque à cause du Dollar fort. Ce segment a bien performé et a encore atteint des records récemment.
Pour nous qui sommes des investisseurs en Euros, la recul de la monnaie européenne par rapport au Dollar constitue un facteur de soutien indéniable à court-terme et vient contrebalancer, pour partie, les conséquences des troubles politiques en Europe du Sud.
Avec forbes