DECRYPTAGE. Les statistiques ne révèlent pas de phénomène de relocalisation.
La faible croissance du commerce mondial depuis maintenant quatre années a fait dire à certains experts qu’elle était le signe manifeste d’une démondialisation. Un constat d’autant plus assené qu’il s’appuie, ces derniers temps, sur des déclarations fracassantes à l’image de celles du candidat républicain Donald Trump voulant relocaliser la production américaine sur le sol national.
Pour les statisticiens, rien n’indique une telle tendance
A interroger les statisticiens, rien n’indique aujourd’hui dans les chiffres du commerce une tendance à la démondialisation. Le directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Roberto Azévêdo, l’a déclaré récemment. Si un tel mouvement était à l’oeuvre, le monde commercial assisterait à une baisse de la part des échanges de produits intermédiaires dans le total du commerce mondial. « Les statistiques ne dénotent aucune tendance de ce genre. Si l’ampleur de la croissance du commerce international est plus faible, la composition des échanges commerciaux, elle, est inchangée », observe-t-il.
Certaines entreprises multinationales ont certes pu modifier leur chaîne de valeur, leur processus de production réparti sur plusieurs pays, pour se rapprocher géographiquement de leurs marchés où se situent leurs consommateurs. Il y a bien des phénomènes de reconfiguration de ces chaînes face à la montée des coûts de production en Chine , à la plus grande aversion au risque après la crise de 2008-2009. La montée en puissance du Vietnam , la reprise de part de marché du Mexique, le délestage de certains pays jugés à risque vers des pays voisins, à l’image d’un arbitrage entre la Tunisie et le Maroc, par exemple, peuvent être notés.
Désastres et accidents
Tout comme les désastres naturels au Japon et en Thaïlande, les accidents au Bangladesh et les troubles politiques au Moyen-Orient ont pu opérer un changement de gestion des chaînes d’approvisionnement et une plus grande attention apportée aux risques de rupture d’approvisionnement, de mauvaise gouvernance et de manque de contrôle sur certains fournisseurs de second rang.
Phénomène sur quinze ans
Historiquement, la délocalisation à grande échelle a eu lieu au cours des quinze dernières années. Aujourd’hui, les statisticiens parlent volontiers d’un phénomène de « plateau ». L’essentiel de la mondialisation a déjà été opéré. De là à voir un retour en arrière qui se profilerait dans les prochaines années avec un rapatriement de la production au niveau national, ce scénario est hautement improbable.
On peut éventuellement s’attendre à un raccourcissement de la longueur des chaînes de production avec moins de fournisseurs et choisis dans des pays moins lointains. Mais certainement pas à un retour en arrière.
avec lesechos