Gagner du temps et éviter les erreurs quand on entreprend ? Bien menée, l’adaptation d’un succès étranger au marché français peut rapporter gros.
Du mal à inventer LA bonne idée ? «Regarder ce qui se fait à l’étranger permet de gagner du temps et ça rassure les investisseurs», soutient Brice Auckenthaler, de l’agence Tilt Ideas. Et avec Internet, plus besoin de sauter dans l’avion. Il suffit de consulter la newsletter de l’APCE, Springwise.com, Hellobiz.fr, Shamengo.com ou Killerstartups.com.
Gare, malgré tout, aux pièges juridiques. «Pour limiter les risques de plagiat, prenez le meilleur de plusieurs concepts et mixez», conseille Julien Lacker, avocat spécialiste en propriété intellectuelle. En attendant, les exemples d’entrepreneurs à qui l’importation réussit sont légion.
Précieux : www.tmdn.org, la base de données européenne pour vérifier les marques déposées
♦ Surfer sur l’engouement pour les «escape games»
Soixante minutes pour résoudre des énigmes et se libérer d’une pièce. Venus d’Australie et de Hongrie, les «escape games» n’ont débarqué en France qu’il y a deux ans, mais on en compte déjà une centaine (lire témoignage ci-dessous). Bonne nouvelle : il reste de la place en province. «Marseille n’en a que deux, Lille trois, Lyon moins d’une dizaine. Et plusieurs peuvent cohabiter dans une ville», assure Vincent Baÿ, cofondateur de Challenge The Room (Grenoble), qui en a déjà ouvert deux.
Et pour remplir les salles en journée la semaine, le démarchage d’entreprises fans de team building peut s’avérer payant. «Elles représentent 50% de notre chiffre d’affaires, estimé à 450.000 euros pour 2016», glisse cet ex-gestionnaire de marché. Attention, toutefois : besoin de grands espaces, décors à peaufiner, énigmes à inventer… L’investissement initial est important. «125.000 euros pour ouvrir notre premier lieu», calcule Elisa Elbaz, cofondatrice en 2014 de Team Break, qui compte déjà quatre escape games (à Paris, Lille et Lyon) et se développe en licence.
=> Témoignage : ils ouvrent un espace de jeux comme à Budapest
En 2014, alors qu’ils venaient de signer un CDI, Maxime Biewers et Maxime David ont pourtant tout plaqué quand ils ont découvert les «escape games» via un ami. Direction Budapest, berceau du concept, où ils ont visité une dizaine de lieux. Au retour, ils trouvent un espace à louer dans Paris. Mais, par économie, les énigmes sont faites maison, grâce aux idées glanées en Hongrie : «Nous avions rédigé une fiche par salle visitée.» Et les travaux (ici, une salle des coffres reconstituée) sont réalisés avec des amis. Depuis son ouverture, The Game a déjà accueilli 28.000 joueurs.
Mise de départ : 5.000 euros. Apport personnel total des deux fondateurs.
Chiffre d’affaires (janvier 2016) : 96.077 euros. Chiffre d’affaires (janvier 2015) : 24.176 euros
1.000 euros : l’aller-retour à trois pour Budapest afin de visiter les escape games.
♦ Produire de la bière ou du vin en centre-ville
«Très peu de Parisiens amateurs de vins sont prêts à aller les acheter directement chez les producteurs», assure Matthieu Bosser. Qu’à cela ne tienne, sous l’enseigne Les Vignerons parisiens, ce trentenaire vient d’ouvrir un chai de vinification 100% made in Paris, comme il en existe déjà aux Etats-Unis et au Canada. Soit 400.000 euros d’investissement (local, travaux, achat du matériel) financés en partie par le crowdfunding, les raisins étant acheminés depuis les côtes du Rhône après chaque vendange. Chiffre d’affaires prévu en 2017 : 1 million d’euros. Lancé en 2015, un autre chai, la Winerie parisienne, débute sa vinification.
12.000 euros : le prix pour un petit pressoir vinicole.
Un concept facilement duplicable dans les métropoles régionales. Importées d’outre-Atlantique, les microbrasseries urbaines ont aussi le vent en poupe, notamment à Paris (BapBap, La Baleine, La Parisienne, Deck & Donohue, La Goutte d’or…). Mais en province, toutes les places sont à prendre !
♦ Dénicher l’accessoire qui va cartonner en France
«Un raz-de-marée.» Voilà comment les époux Laurençon, un ex-gestionnaire de biens immobiliers et une mère au foyer, ont vu déferler la mode des Rainbow Loom (bracelets faits d’élastiques crochetés) aux Etats-Unis, où ils vivaient en 2012. «En trois mois, tous les enfants en avaient un au poignet. On y a vu une aubaine.» Ils ont alors négocié les droits de distribution en France et investi 12.000 euros pour faire venir les premières palettes de Chine. Pari gagné : 7,5 millions de chiffre d’affaires en 2014. Depuis, la mode s’est essoufflée, mais le duo avait anticipé et sillonne les Salons du jouet du monde entier pour repérer les futurs cartons…
Même joli coup pour Emilie Creuzieux, ancienne kiné, avec ses bentos (boîtes pour pause déjeuner) importés du Japon : 40.000 euros d’investissement (stocks et site Web) en 2009, 4 millions d’euros de chiffre d’affaires pour Monbento en 2015. Ex-acheteur international, Ibrahima Niakaté espère que la mode des skateboards électriques le portera aussi loin : il a écoulé par jour jusqu’à trente de ces skates fabriqués en Chine et vendus sous la marque Insolites Board à l’été 2015, et prévoit un chiffre d’affaires de 300.000 euros en 2016.
♦ Décliner le truck à toutes les sauces
On connaît le succès fulgurant des food trucks. Aujourd’hui, le concept se décline. Importé de Californie, celui des fashion trucks débarque en France : The Rolling Shop, Itsy Bitsy Boutique nomade, Cotton & Wild… «Pour se lancer, un camion est plus accessible qu’une boutique», témoigne Guillaume Robin, ex-cadre dans la mode et fondateur de The Rolling Shop.
Ses débuts en 2013 ? «On a testé les marques dans une boutique éphémère à Paris, puis roulé tout l’été en truck.» Soit un investissement de 12.000 euros, dont 1.500 pour l’Estafette Renault trouvée sur Leboncoin.fr. «Le camion permet de faire le buzz, mais il faut compléter les revenus.» Alors aujourd’hui, The Rolling Shop, c’est aussi une boutique à Paris et un e-shop. Moyennant quoi ses ventes bondissent de 20% par an. D’autres variantes voient le jour, mais le filon est loin d’être épuisé : Le Boudoir des Cocottes, Nail Truck (manucure), Arty Truck, Hair We Go (coiffure)…