Le diplomate chinois qui a passé trois années en Côte d’Ivoire, est admis à faire valoir ses droits à la retraite. Il explique ici ‘’ses regrets’’ de partir mais aussi ses espoirs en la coopération entre les deux pays.
Quels sentiments vous animent après trois ces années passées en Côte d’Ivoire ?
C’est avec beaucoup d’émotion que je vois l’approche de la fin de ma mission en tant que 7è ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République populaire de Chine en Côte d’Ivoire depuis l’établissement des relations diplomatiques.
D’ une part, je me sens heureux et chanceux, car mon mandat en Côte d’Ivoire qui a commencé en février 2012 (j’ai présenté mes lettres de créance à Sem. le Président de la République le 16 février 2012), après la fin de la crise post-électorale, coïncidait avec la reconstruction socio-économique du pays. Ce redressement se déroule avec beaucoup de succès. Comme tout le monde peut le constater. Et je pense même que la Côte d’Ivoire est l’un des pays qui ont bien réussi leur sortie de crise. Rien ne peut plus combler un ambassadeur que le progrès du pays où il est accrédité et le renforcement des relations d’amitié et de coopération entre les deux pays.
Durant mon mandat, j’ai eu l’honneur et le privilège d’être très bien accueilli et aidé par Sem. le Premier ministre Daniel Kablan Duncan, leurs Excellences messieurs les présidents des institutions et bien sûr par Sem. le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, Charles Koffi Diby, tous les ministres et par tout le peuple ivoirien, à qui je voudrais adresser mes profonds sentiments de gratitude et mes remerciements.
D’autre part, j’ai beaucoup de regrets parce que je me suis fait beaucoup d’amis et c’est avec amertume que je pense à mon départ définitif. Car, malgré beaucoup de projets menés à terme ou entamés, beaucoup reste à faire pour promouvoir davantage les politiques économiques et culturels entre nos deux peuples. Surtout il est difficile de penser à quitter tous mes amis qui m’ont aidé tant sur le plan professionnel que sur le plan personnel.
Vous avez parlé tantôt du renforcement de la coopération entre les deux pays, quels en sont les grands axes ?
Ce renforcement de l’amitié entre les deux pays est perceptible dans tous les domaines. Sur le plan politique, j’ai eu l’honneur d’accompagner Sem le Président de la République, Alassane Ouattara,lors de sa visite en Chine en 2012. Je citerai aussi la visite de Sem le président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, à son homologue en Chine en 2013 et SEM.le ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, à la tête d’une délégation en 2014. Les deux ministres des Affaires étrangères ont signé, durant cette visite, l’accord de l’exonération de visa pour les détenteurs du passeport diplomatique ou de service qui sera bientôt en vigueur. Plusieurs ministres ivoiriens ont aussi effectué des visites de travail en Chine : le ministre d’Etat, ministre du Plan et du Développement, le ministre d’Etat, ministre auprès du Président de la République chargé du Dialogue politique, sans oublier ceux de la Défense, de la Culture et de la Francophonie, de la Poste et des Tic, de la Santé et de la Lutte contre le sida, de la Communication…
Sur le plan économique et commercial, j’ai pu suivre de grands projets que nos deux gouvernements ont convenu de réaliser avec un don du gouvernement chinois. C’est le cas par exemple de la réalisation du centre anti-paludisme et la réhabilitation du collège moderne d’Anyama, du palais de la culture et du bloc ministériel, la construction du stade olympique d’Anyama, du projet pilote de l’énergie solaire. Nous avons aussi fait des dons de matériel destiné à la lutte contre la maladie à virus Ebola.
A côté de ces dons faits par le gouvernement chinois, il y a des projets qui ont été réalisés avec des prêts de la République populaire de Chine,comme la construction de l’autoroute Abidjan-Grand-Bassam, l’approvisionnement en eau potable au sud d’Abidjan depuis la nappe phréatique de Bonoua (phase I et II), la construction du barrage hydroélectrique de Soubré, l’approfondissement et l’agrandissement du port autonome d’Abidjan, l’installation du réseau de communication de l’administration (e-gouv),la construction du quartier Concorde (logements sociaux), etc.
A combien estimez-vous le montant global de ces infrastructures ?
Pour le montant global des dons et des prêts accordés par mon pays à la Côte d’Ivoire, il m’est difficile de donner des chiffres exacts, car ils sont accordés par plusieurs institutions gouvernementales et organisations non-gouvernementales. Je peux dévoiler que pour la seule année 2014, les conventions signées entre nos deux pays dépassent 40 milliards Fcfa, en matière de don et ce, pour financer les projets conclus entre les deux gouvernements. A cela, il faut ajouter quelque cent millions de dollars américains de prêt, pour réaliser d’autres projets en Côte d’Ivoire.
Sur le plan culturel et social, nous avons organisé, ensemble, une soirée de représentations artistiques chinoises pour célébrer le 30è anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre nos deux pays, une exposition de peinture chinoise à la Rotonde. Nous avons fait émettre des timbres commémoratifs de cet anniversaire et conclu le programme d’exécution de l’accord de coopération culturelle 2015-2018 que Sem. le ministre de la Culture et de la Francophonie va officiellement signer en juillet prochain en Chine. Sem. le ministre du Tourisme se rend ce mois-ci, en Chine, pour participer à Beijing international Tourism Expo 2015.Chaque année, nous organisons des séminaires d’une centaine de thèmes différents en Chine. Les programmes touchent au moins 450 participants (fonctionnaires, professionnels des médias et administrateurs ivoiriens) par an. Nous avons fait réaliser des micro-projets pour le centre de nutrition de Korhogo. Nous avons également fait des dons de machines agricoles à la Fédération des associations féminines de Katiola (Fafka), réhabilité le centre de santé d’Adjamé et la cité d’enfance de la même commune. Sans oublier l’établissement de jugements supplétifs à 116 écoliers à Abobo derrière-rails avec l’OngYoung Leaders et l’appui financier aux jeunes de Port-Bouët pour un projet d’élevage.
Sur le plan éducatif et de l’enseignement supérieur, nous octroyons, chaque année, une soixantaine de bourses du gouvernement chinois et une trentaine en provenance d’autres institutions chinoises. L’Office national pour la promotion et l’enseignement de la langue chinoise à l’étranger envoie depuis 2008, un professeur de chinois à l’université Félix Houphouët-Boigny. Pour relever le niveau de l’enseignement, le 28 mai dernier, l’institut Confucius a été installé dans cette université.
Sur le plan militaire, nous avons relancé les échanges dans le domaine de la défense après la fin de la crise post-électorale, en octroyant des bourses de formation de différentes durées. Des bourses aux étudiants officiers et des séminaires destinés aux policiers ivoiriens.
Dans vos propos vous n’avez pas évoqué le volet politique alors que vous recevez énormément des hommes politiques.Est-ce que vous avez espoir que les élections à venir se passeront dans un esprit apaisé ?
Effectivement, beaucoup d’acteurs politiques ivoiriens viennent échanger avec moi. Et je participe à des échanges politiques multilatéraux. Ce que nous avons constaté, c’est que tous les hommes politiques ont conscience qu’il faut éviter le recours à la violence. Le peuple ivoirien a assez souffert de la violence. Jusqu’à maintenant, la communauté internationale est plutôt optimiste. Il faut à tout prix éviter tout recours à la violence. C’est au peuple ivoirien de saisir les opportunités. De façon générale, on peut être confiant que ces élections seront sans violence.
Qu’est-ce que vous allez faire de votre retraite ?
Pour le moment, je souhaiterais me reposer un peu et après, voir ce que je peux faire pour promouvoir les échanges entre nos deux pays dans la diplomatie mais aussi dans d’autres domaines.
Quel message fort souhaiteriez-vous laisser aux Ivoiriens ?
Ma conviction et celle du peuple chinois, c’est que les aides sont mutuelles. Nous avons cité des programmes pour lesquels nous aidons le peuple frère ivoirien dans sa lutte pour le progrès social, économique et culturel. Ce peuple frère nous soutient également dans notre lutte pour réaliser notre rêve qui est le grand renouveau national de construction d’un État socialiste moderne, prospère, puissant, démocratique, civilisé et harmonieux en 2050.
Je souhaite que le cap de redressement de la Côte d’Ivoire puisse être maintenu afin que ce pays réalise son rêve de pays émergent en 2020.
PME PMI magazine avec fratmat