La Banque mondiale a publié ce 24 juillet 2017 une étude sur la Côte d’Ivoire intitulée : « Et si l’Émergence était une femme, comment la Côte d’Ivoire pourrait gagner au moins six milliards de dollars ». Elle met en exergue la nécessité de réduire les inégalités entre les hommes et les femmes, une mesure qui pourrait rapporter entre 6 et 8 milliards de dollars à long terme.
La Côte d’Ivoire a connu ces dernières années une forte croissance. Entre 2012 et 2015, un taux de croissance du PIB de 9% la place en deuxième position en Afrique derrière l’Ethiopie.
Cependant un ralentissement s’observe mais l’année 2016 reste excellente pour la Cote d’Ivoire. Cet affaiblissement s’explique entre autres par la baisse du prix du cacao, certains troubles sociaux et la hausse du prix du pétrole, peut-on lire dans ce rapport.
Mais les récoltes de cacao ont été exceptionnelles cette année, ce qui a eu pour effet d’obtenir en 2016/2017 des recettes presqu’aussi élevées qu’en 2015/2016. Ajouté à cela l’augmentation des prix des produits d’exportations du pays à savoir le prix du café, de l’hévéa et du coton.
La Côte d’Ivoire doit rester prudente
Nonobstant une année 2016 encourageante, la croissance montre des signes d’essoufflement. On observe une augmentation de 7,7% pour l’année 2016, en baisse par rapport aux années précédentes. Selon les estimations, cette tendance baissière devrait se prolonger et porter la croissance à 7% en 2017 puis 6,5% en 2018/2019.
De plus entre 2015 et 2016, le déficit est passé de 2,9% à 4% du PIB. Une hausse des emprunts a fait croître la dette publique de 0,5% du PIB et a atteint donc 48% du PIB en fin 2016.
Ces variations ont eu pour effet de modifier la gestion de la politique budgétaire avec notamment la suppression du droit d’enregistrement sur les exportations. Aussi peut-on remarquer, la diminution de la contribution du secteur public à la croissance.
Au mépris de perspectives économiques bonnes, la prudence est de mise. Plusieurs ajustements budgétaires réduisent la contribution du secteur public. Ce qui devrait pousser le secteur privé à booster la croissance et pour cela en adoptant une politique d’équité des genres selon ce rapport.
Des disparités beaucoup trop présentes
Malgré une économie qui se porte relativement bien, la Côte d’Ivoire est un mauvais élève concernant l’égalité hommes-femmes. Elle se classe 171ème sur 188 pays dans le classement de l’équité des genres selon les Nations Unies. Sur le plan continental, la Banque africaine de développement classe la Côte d’Ivoire 43ème sur 52 pays. Une réduction de ces inégalités pourrait rapporter 6 à 8 milliards de dollars à la Côte d’Ivoire.
On peut observer des efforts sur le plan législatif. Toutefois, les disparités à l’encontre des femmes sont très fortes et sur le terrain ces lois ne sont pas appliquées. Les inégalités hommes-femmes sont surtout visibles dans l’éducation, le marché du travail et les femmes ont un problème d’accès aux soins.
Sur le marché du travail
Les femmes gagnent en moyenne la moitié de ce que les hommes gagnent. Aussi, à cause de la pauvreté de certaines familles, les femmes ont tendance à avoir plusieurs activités et cumulent 3 à 4h de plus que les hommes quand il s’agit de tâches domestiques. Cette accumulation peut poser des problèmes dans leur carrière professionnelle.
La différence en terme d’éducation et autres discriminations aboutissent à des inégalités salariales. Au même niveau d’éducation, une femme a moins de chance de trouver un emploi. Quand c’est le cas, une femme gagne en moyenne 30% de moins qu’un homme.
Dans la fonction publique et dans la représentativité au niveau des institutions politiques, les inégalités sont criardes. Un tiers des agents de la fonction publique sont des femmes. 20% des ministres, 5% des maires et 3% des préfets sont des femmes.
Sur l’éducation et l’accès aux soins
Dans le système éducatif, les inégalités sont encore plus profondes. Alors que la parité à l’école primaire est une réalité dans force pays du continent, ce n’est pas le cas de la Côte d’Ivoire. L’écart entre les hommes et les femmes analphabètes est encore plus grand qu’en 1980. Les filles vont de moins en moins à l’école si on compare aux garçons.
Pour des raisons financières dans certaines familles, il est préférable d’envoyer les garçons à l’école plutôt que les filles. Ces derniers peuvent sécuriser un emploi et emmener plus de revenus au sein de la famille. Aussi, les grossesses précoces sont parfois un frein à l’éducation (1/3 des 15-19 ans ont déjà contracté une grossesse).
Avec une moyenne de 4,9 enfants par femme, la Côte d’Ivoire a l’un des taux de natalité les plus élevés au monde. Seulement, le planning familial est inexistant faute de moyens et d’informations. Se greffe à ce problème, l’accès aux soins difficiles pour les femmes en grossesse et pendant l’accouchement. De cela résulte un taux de mortalité maternelle 10 fois plus élevé que dans les pays à revenu intermédiaire.
Les propositions de la Banque mondiale
Il faut prioritairement faciliter l’accès pour tous et toutes à l’éducation. L’éducation garantit une égalité des opportunités et un bon emploi peut-on lire dans ce rapport. Elle permet aussi de comprendre les efforts pour améliorer la santé. Une femme mieux éduquée est plus à même d’éduquer ses enfants. Les programmes de soutien aux adolescentes dans certains pays ont déjà porté leurs fruits et la Côte d’Ivoire peut s’en inspirer.
Pour modifier les comportements sur le marché du travail, le rapport de la Banque mondiale propose au secteur public de poser des actions pour promouvoir l’équité et d’ainsi donner l’exemple.
L’amélioration de l’accès aux soins doit être une priorité. Des campagnes de sensibilisation pour informer les populations doivent être mises en place. L’accès aux soins maternels et aux moyens de contraception doit être facilité. Le rapport suggère aussi la progression du nombre et de la qualité du personnel soignant.
Avec africapostnews