Chanter, à l’unisson, notre bel hymne national permet de nous galvaniser et donne l’impression d’être vraiment unis. Cependant, en le lisant avec attention, l’on s’aperçoit que nous faisons bien souvent le contraire de ce qui est écrit dans ce texte.
Billet d’humeur, par Siamlo SEDJI
Salut, ô terre d’espérance… Combien d’Ivoiriens, humiliés et déçus par leur réalité économique, sociale et politique sont allés voter le 25 octobre ? Faut-il cesser de vivre parce qu’on a perdu le rêve de voir un candidat au pouvoir ? Pensez-vous que cette terre d’espérance que vous chantez toujours la tête haute, veut vous voir marcher sur elle la tête abaissée ? Pensez-vous que vous avez le droit de changer « terre d’espérance » en « terre de désespérance » ?
Les fils de la Côte d’Ivoire, artisans de sa grandeur… Certains chantent si sérieusement cette strophe, comme si la Côte d’Ivoire était encore fière de les avoir comme fils. La « chère Côte d’Ivoire », bradée pendant deux bonnes décennies par ses fils. Ces fiers artisans, ces braves guerriers qui ont décidés de combattre pour une partie de leur pays (le nord ou le sud ou l’est ou l’ouest) et ont versé le sang de leurs pères et mères.
Vous avez dit « fiers artisans de ta grandeur » ?
Rassemblés pour sa gloire, tous bâtiront la Côte d’Ivoire dans le bonheur… Les Ivoiriens rassemblés ? Ah, oui ! Autour de médiocrités communes qui se nomment querelles et tueries. Et ce n’est déjà pas mal. Rassemblés ? Oui ! Autour des leaders politiques qui finissent par devenir maître du destin de leurs citoyens.
Rassemblés ? Oui ! Pour faire de la Côte d’Ivoire un champs d’épines, un nid d’abeilles où coulent le miel, mais où il ne faut jamais, au grand jamais, entrer sans « combinaison ».
Il est beau, le rassemblement, n’est-ce pas ?
Le pays nous appelle… Le pays nous appelle encore et toujours. Pour peut-être nous demander pourquoi il est en larmes ? Pourquoi nous brûlons, cassons et anéantissons son patrimoine ? Pourquoi nous le salissons sans cesse ? Pourquoi nous faisons semblants de l’aimer ?
Pourquoi venons-nous avec le cœur rempli de haine lorsque le pays nous appelle ? Pourquoi venons-nous avec des armes ? Est-ce cela la réponse que le pays attend de nous lorsqu’il nous appelle ?
Ramener la liberté dans la paix et que notre devoir soit un modèle… Souffrez que nous passions rapidement sur cette partie, car, en effet, nous avons été de très bons modèles… de destruction, de corruption, d’exactions, de discrimination… Bref, passons, au risque de nous éterniser sur cette énumération.
Forger, unis dans la foi nouvelle, une patrie de (vraie) fraternité… La foi, nous l’avons tellement que nous rejetons systématiquement ceux ou celles qui ne pensent pas comme nous. Oubliant du coup notre mission de construction d’une patrie où règne la vraie fraternité. En Côte d’Ivoire, nous sommes désormais frères si nous allons dans la même église, dans la même mosquée, si nous prions le même Dieu. Sinon, tu peux aller te faire voir !
Eh oui, le tableau est sombre, malgré les apparences. Cependant, faut-il le jeter en nous disant qu’il est irrécupérable ? Ou devrions-nous plutôt essayer de le restaurer à partir de ce qu’il en reste ?
Réécouter notre Abidjanaise nous aidera peut-être à répondre à ces interrogations.
avec ivoirejustice