Progressivement mis à l’écart, les anciens proches de Guillaume Soro contre-attaquent en créant une amicale.
En temps de crise, lorsqu’on se sent menacé, mieux vaut pouvoir s’assurer du soutien des siens. Écartés des instances dirigeantes du Rassemblement des républicains (RDR), débarqués des postes qui leur avaient été offerts après la crise post-électorale, les anciens rebelles des Forces nouvelles (FN) ont donc décidé de se regrouper. Depuis quelques mois, ils s’affichent ensemble, exprimant une solidarité retrouvée.
Limogée du gouvernement en janvier, l’ancienne ministre de la Communication, Affoussiata Bamba, a été la première à se rappeler au bon souvenir de ses anciens camarades. En juin, après plusieurs mois de silence, celle qui s’était inclinée lors des dernières législatives a fait son retour, s’exprimant en sa qualité de « porte-parole des Forces nouvelles ».
Deux mois plus tard, plusieurs proches de Soro annonçaient la création de l’Amicale des Forces nouvelles. « Nous avons partagé une histoire commune, explique son secrétaire général, Félicien Sekongo, ancien porte-parole adjoint des FN et ex-conseiller de Soro à la Primature. Cette structure nous permet de nous retrouver et d’agir ensemble pour favoriser la solidarité interne. »
Elle permet aussi au président de l’Assemblée nationale de faire passer des messages et de tester des idées auprès de l’opinion. Lors de ses dernières interventions, Sekongo s’est ainsi montré particulièrement sévère à l’encontre du RDR, appelant par ailleurs à la libération de Laurent Gbagbo.
On a compris que tout était fait pour nous mettre au ban des institutions, estime un cadre politique des FN
Entre les anciens rebelles, qui comme Soro n’ont pas participé au congrès des 9 et 10 septembre, et les cadres historiques du parti, le divorce est désormais consommé. « C’était latent depuis longtemps. Lors de la crise politico-militaire, on sentait bien que le RDR ne voyait pas d’un bon œil que Soro soit placé au centre du jeu. Mais c’est réellement après son départ de la primature, en 2012, qu’on a compris que tout était fait pour nous mettre au ban des institutions. Comme si le RDR et ses dirigeants ne voulaient plus assumer ce pan de leur histoire », estime un cadre politique des FN.
« Mettre fin à l’hypocrisie »
Au lendemain de la crise post-électorale, après avoir envisagé de transformer la branche politique des FN en un véritable parti, Soro décidait de la dissoudre… tout en espérant qu’elle serait intégrée au RDR, qu’il ambitionnait de diriger. « Dans les faits, seuls ceux qui ont laissé penser qu’ils s’éloignaient de Soro, comme Sidiki Konaté ou Affoussiata Bamba, ont été nommés », rappelle un ancien cadre de la rébellion. Soro, lui, ne réussira jamais à convaincre les membres historiques du RDR de lui laisser le champ libre.
Près de six ans après la fin de la crise, remettre au goût du jour l’appellation « Forces nouvelles » interpelle, tant le terme rappelle à beaucoup d’Ivoiriens les sombres périodes de leur histoire. « On assume pleinement cet héritage », rétorque Sindou Meïté. « Il fallait mettre fin à cette hypocrisie pour montrer à l’establishment que nous n’avons pas été vaincus », précise un autre proche du président de l’Assemblée nationale.
Faut-il pour autant s’attendre à ce que leur branche politique se reforme ? « Ce n’est pas envisageable. Les FN ne sont pas de retour, répond notre source. L’Amicale ne deviendra pas un parti politique. En revanche, elle se rapprochera des autres mouvements qui gravitent autour de Guillaume Soro, pour qu’à terme ils n’en forment qu’un. »
Avec jeuneafrique