Deux bâtiments neufs dont un atelier de production avec un nouveau four et une salle d’exposition des œuvres, ont été ainsi (re) offertes aux populations par le truchement d’un financement intégral du Fonds de développement touristique (Fdt) à hauteur de 40 millions de Fcfa.
Artisanat et tourisme: Le Centre des potières de Tanou-Sakassou renaît de ses cendres
Le ministre du Tourisme, Roger Kacou, a procédé, le 16 juillet 2016, à l’inauguration des locaux du Centre artisanal des potières de Tanou-Sakassou, reconstruit six mois après un incendie qui l’avait ravagé. Cette réouverture a pris des allures de vernissage d’expo et d’inauguration d’une galerie d’art.
Ce sont des populations enthousiastes et reconnaissantes au ministère du Tourisme qui ont accueilli, le samedi 16 juillet, le ministre Roger Kacou et la forte délégation qui l’accompagnait, à l’effet d’inaugurer, officiellement, le Centre artisanal des potières de Tanou-Sakassou, village communal sis à moins de 10 kilomètres de Bouaké (Région de Gbêkê) dans le centre de la Côte d’Ivoire.
Deux bâtiments neufs dont un atelier de production avec un nouveau four et une salle d’exposition des œuvres, ont été ainsi (re) offertes aux populations par le truchement d’un financement intégral du Fonds de développement touristique (Fdt) à hauteur de 40 millions de Fcfa. C’est en tout cas, l’une des actions effectuées sur le long chapelet que le Fdt dans sa réforme enclenchée depuis 2014/2015, devra poser pour soutenir les opérateurs, sous la houlette de son président de Comité de gestion Marc Vicens.
Pourvu, en effet,que sa dotation soit revue à la hausse. La réhabilitation ou plutôt la reconstruction du Centre artisanal dédié à la poterie et l’art céramique de Tanou-Sakassou constitue un pan de la matérialisation du tourisme inclusif selon la vision de Roger Kacou.Qui fonde de sérieux espoirs sur ce centre dans le processus d’autonomisation des femmes et le développement du tourisme interne. Au-delà de sa très grande cote au plan international. Aussi incombe-t-il d’opérer un rappel des faits sur le drame subi par les quelque 1500 âmes qui peuplent ce village et dont 300 vivent indirectement de la poterie même si la coopérative compte 24 membres actionnaires.
Retour sur le film d’un drame…
Dans l’après-midi du mardi 5 janvier 2016 aux alentours de 13h, un incendie d’une origine inconnue, s’est déclenché dans l’atelier de la coopérative de poterie du village de Tanou-Sakassou. L’étendue des dégâts est insoutenable. Toutes les œuvres d’art exposées ou en stock, sont parties en fumée, en dépit de la prompte réaction des sapeurs-pompiers de la 4ecompagnie de Bouaké.
Instruit par Roger Kacou, ministre du Tourisme qui y avait effectué une visite quelques mois plus tôt, pour être aux côtés de la coopérative, Jean-Marie Somet, directeur général de Côte d’Ivoire Tourisme, l’Office national de promotion de la destination ivoirienne, intra et extra muros, conduit une délégation dans ledit village pour exprimer la compassion de l’administration touristique aux sinistrés. Avec à la clé un réconfort financier de 1 million de Fcfa et un engagement du ministère à réhabiliter le centre. Afin que ses œuvres d’art calcinées renaissent de leurs cendres dans une nouvelle infrastructure. D’autant plus qu’au lendemain de ce drame, Gada Yao Koffi, l’un des potiers sinistrés affirmait, au nom de la fondatrice, dame Koua Aya, que « le bilan de l’incendie qui a ravagé notre salle d’exposition et notre atelier de fabrication fait état de plusieurs dégâts matériels que nous estimons à environ 30 millions de Fcfa ».
La révérence de Roger Kacou au «génie créateur»
S’adressant aux populations qui lui ont exprimé leur gratitude et témoigné de leur reconnaissance par l’octroi de présents issus de leur savoir-faire, notamment par la voix du président de la mutuelle de développement du village, Konan Yao Sylvestre, Roger Kacou a affiché son optimisme quant à voir le centre luire à nouveau tel le Phénix renaissant de ses cendres. Notamment, par le soutien du Fdt dont l’une des missions régaliennes est l’assistance aux opérateurs du secteur. Mieux, le ministre a-t-il salué l’expression du «génie créateur» qui transpire dans les œuvres des artisans du village et leur vaut en bonne place dans les hôtels, bureaux, galeries et restaurants de par le monde.
Témoignage ineffable d’une dextérité s’appuyant, tout aussi, sur «une méthode, une persévérance, un talent et une créativité» que reconnaissent les touristes internes comme étrangers. Le tout, sous le sceau d’une pratique touristique inclusive, en phase avec l’environnement qui en rajoute à l’attractivité du site. C’est pourquoi, et à juste titre, dans sa saisie transversale, le ministre entend avec ses pairs de la Culture, de l’Artisanat et de la Construction faire tirer le meilleur profit aux céramistes et potiers de Tanou-Sakassou. Car, à maints égards, l’activité potière résout la question de l’exode rural et de la migration saisonnière vers les zones forestières, résorbe le chômage des jeunes et concrétise l’autonomisation des femmes.
Ce sont donc deux bâtisses de 140m2 pour le hall d’exposition et de 100m2 pour l’atelier qui, ainsi livrés, permettront aux artisans de produire et vendre en moyenne 200 œuvres hebdomadaires en période de croisière. Toute chose qui incline à revisiter l’histoire de ce centre et sa portée socio-économique, culturelle et touristique. Qui, dans le droit fil de l’action salvatrice du ministère du Tourisme, devraient, ainsi que l’ont émis le maire Nicolas Djibo, et l’administrateur général du Conseil régional, Brou Noël Koffi, bénéficier d’un concours des collectivités décentralisées de la commune de Bouaké et de la région de Gbêkê.
Il était une fois l’argile, des femmes et des missionnaires
Tanou-Sakassou est renommé pour sa production céramique. C’est un village baoulé situé à 10 km à l’est de Bouaké, sur la route de M’Bahiakro. La coopérative des potières de Tanou-Sakassou a été créée en 1965 avec l’aide des pères, frères et sœurs catholiques de la Mission des Bénédictins, installés à proximité du village. Ces derniers se chargent également de la promotion des poteries. La clientèle est constituée principalement d’Européens et d’Africains férus de l’art et de l’artisanat. Les méthodes de production sont restées dans l’ensemble proches de la tradition. Les potières continuent d’extraire l’argile manuellement et individuellement. Transportée au village dans de petites bassines sur la tête, l’argile est ensuite séchée, triée et pilée. Le façonnage s’est sensiblement amélioré, grâce à de petits tours manuels fabriqués à Bouaké.
La cuisson, en revanche, se fait désormais au four mais toujours groupée. On note deux types de couleurs: le noir et le rouge sombre ou couleur brique. Parfois, des réactions chimiques lors de la cuisson permettent d’obtenir des jeux de couleurs appréciables. La production actuelle est très diversifiée. Elle comprend des services de table dont le fameux «Taliè» dans lequel est généralement servi le fameux «Kédjénou» national, cendriers, des vases à eau, des photophores, divers types de gargoulettes, des pots de fleurs, divers objets décoratifs selon les commandes des clients. Les décors sont empruntés aux poids baoulé à peser l’or.
Le dernier trimestre de l’année est une période de travail intense car, pour les fêtes de fin d’année, les commandes sont importantes. Si la production est individuelle, pour les charges communes, chaque potière reverse 10% du produit des ventes à la coopérative. Les prix des objets varient de 1 000 Fcfa pour les petits à 100 000 Fcfa pour les grosses pièces. Initialement constituée exclusivement de femmes, la coopérative comprend aujourd’hui dix-sept femmes et sept hommes. Quelques hommes ayant en effet décidé d’apprendre le métier auprès des femmes.
La coopérative dispose d’une salle qui sert à la fois d’atelier et de salle d’exposition-vente, une salle de cuisson avec un four à bois construit en 1986, un bâtiment qui fut longtemps demeuré inachevé et destiné à être la salle d’exposition et un entrepôt. Elle a également bénéficié de l’assistance française en encadrement et en formation pour l’amélioration de la qualité de la production entre 1986 et 1990.
La coopérative a également développé des partenariats à travers le monde, notamment aux États-Unis, en France, en Italie, en Chine. Elle reçoit de nombreuses commandes de clients de ces différents pays. La coopérative participe pour le compte de la Côte d’Ivoire à différentes foires, principalement en France (Cholet, Bordeaux, Paris).