A quatre mois de la présidentielle en Côte d’Ivoire, le Chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara a accordé, le jeudi 25 juin 2015, une interview à la Radiodiffusion télévision ivoirienne (Rti1), à la BBC, à Fraternité et à RFI/France 24. Avec David Mobio, Valérie Bony, Anna Sylvestre et Venance Konan, il a abordé la politique nationale, internationale et l’actualité sur le plan social.
Alassane Ouattara: “La présidentielle d’octobre 2015 n’est pas gagnée d’avance”
A quatre mois de la présidentielle en Côte d’Ivoire, le Chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara a accordé, le jeudi 25 juin 2015, une interview à la Radiodiffusion télévision ivoirienne (Rti1), à la BBC, à Fraternité et à RFI/France 24. Avec David Mobio, Valérie Bony, Anna Sylvestre et Venance Konan, il a abordé la politique nationale, internationale et l’actualité sur le plan social.
“L’élection présidentielle n’est pas gagnée d’avance. C’est pourquoi nous allons faire campagne…”, a déclaré Alassane Ouattara. Pour lui, le taux de participation devrait déterminer la crédibilité de ce scrutin.
S’agissant de l’opération de révision de la liste électorale lancée par la Commission électorale indépendante (Cei) le 1er juin et qui prend fin le 30 juin prochain, le numéro 1 ivoirien a reconnu que les “premiers chiffres ne sont pas encourageants”. Avant d’annoncer que des mesures sont en train d’être prises dans le cadre de l’amélioration de cette opération.
Cependant, il a tenu à préciser qu’il ne fera aucune interférence dans les travaux de la Cei. Mieux, il a rassuré qu’il n’y aura pas de rupture de financement en ce qui concerne le fonctionnement de cette institution.
D’ailleurs sans en préciser l’objectif, la Commission électorale indépendante prononce une conférence de presse ce vendredi 26 juin 2015. Sans nul doute au sujet de cette opération de révision de la liste électorale.
D’ailleurs pour permettre aux citoyens ivoiriens à s’intéresser de plus en plus aux différents scrutins, le Président Alassane Ouattara a préconisé qu’en Côte d’Ivoire le vote soit obligatoire.
Également, il a salué le choix porté sur lui comme candidat unique du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). “Cette décision renforce la stabilité de la Côte d’Ivoire”, dira-t-il.
Morceau choisi: “« Cette décision du Rhdp donne de la stabilité à la Côte d’Ivoire sur les 10, 15, 20 ans à venir. Avec la paix et la stabilité sur une génération, la Côte d’Ivoire sera totalement transformée. Et donc, je rends hommage au président Bédié parce qu’il aurait pu dire : “Mais après tout, je n’ai pas été élu en 2010, je vais être candidat en 2015”, rien ne l’en empêchait, mais il a décidé de me soutenir. Moi, j’en suis très heureux, mais cela ne veut pas dire que l’élection est gagnée d’avance. Nous allons faire campagne et ces élections devraient avoir lieu à bonne date. Et je suis persuadé qu’elles seront apaisées, démocratiques, transparentes et vous pourrez considérer que cette fois-ci, je pense qu’il n’y aura pas de difficulté d’acceptation des résultats. […] Oui, mon objectif c’est d’être élu dès le premier tour pour que l’on puisse continuer le travail. Parce que s’il y a un deuxième tour, cela fait un mois de moins. J’ai déjà perdu 4 mois et demi avec la situation passée.”
En ce qui concerne la réconciliation nationale, Alassane Ouattara a promis: “je veux laisser à mes successeurs un pays en paix”. C’est sans nul doute pourquoi, répondant aux préoccupations de 19 organisations des droits de l’homme et de la société civile qui lui ont exprimé leurs inquiétudes dans une lettre ouverte, le 25 juin 2015, quant à la fin de la mission de la cellule spéciale d’enquête sur les crimes commis lors la crise post-électorale, le Président ivoirien a rassuré: “la cellule spéciale d’enquête continuera son travail après le 30 juin 2015”.
Cet exercice, il faut le signaler, fut l’occasion pour Alassane Ouattara de faire des précisions sur la chute de l’ex-président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, en exil en Côte d’Ivoire. Pour lui, l’ex-homme fort de Ouagadougou n’a pas fui son pays. Il a plutôt démissionné pour éviter à son pays un bain de sang. D’ailleurs, justifiant la présence de M. Compaoré à Abidjan, il dira: “cette présence est une bonne chose pour le Burkina” dont les nouvelles autorités ont toujours craint une déstabilisation venant des bords de la lagune ébrié. Comme pour rassurer que les relations entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire sont au beau fixe, Alassane Ouattara a annoncé que du 5 au 7 juillet 2015, le Premier ministre du pays des hommes intègres, le lieutenant-colonel Yacouba Zida Isaac effectuera une visite de travail en Côte d’Ivoire. “Je recevrai le Président Michel Kafando en fin juillet”, a-t-il également annoncé.
Autres morceaux choisis, nous vous proposons l’intégralité de la dernière partie de l’interview du Président Alassane Ouattara l’entièreté étant à lire dans le quotidien Fraternité Matin de ce vendredi 26 juin 2015.
Dernière partie de l’interview
Dans votre volonté d’atteindre l’émergence, avez-vous l’impression que les Ivoiriens, vos compatriotes vous suivent? Est-ce qu’ils vous comprennent ?
De ce que je vois, j’entends et de ce que nous recevons comme informations, la Côte d’Ivoire est sur la bonne voie. Mes concitoyens savent que je prends des décisions difficiles. Mais c’est toujours dans l’intérêt des Ivoiriens et de notre pays que nous continuerons sur cette voie. Je souhaite que cela soit le cas. Être Président de la République, c’est un immense honneur. Il ne faut pas décevoir ses concitoyens. Si vous voulez être président, c’est parce que vous estimez que vous pouvez apporter quelque chose à votre pays. Et je fais tout au quotidien pour mériter la confiance des Ivoiriens.
Si vous êtes réélu, quels seront vos premières priorités ?
C’est continuer ce que nous avons commencé. Vous savez, si j’avais pensé que j’ai terminé le travail que m’ont confié mes concitoyens, peut-être que je n’aurais pas demandé un second mandat. Mais l’état dans lequel j’ai trouvé le pays nécessitait un travail important. Nous avons déjà fait beaucoup. Mais beaucoup reste à faire. C’est pour cela que je suis engagé à continuer. Je compte accélérer au cours de mon second mandat, ce que je suis en train de faire. Maintenant que nous avons les bases. Nous avons pris un pays totalement en ruine. Dans tous les domaines. Nous avons commencé à reconstruire. Maintenant nous avons des ponts, des routes, des écoles, la bonne gouvernance (rire). Il faut accélérer. Il faut aller plus vite. C’est ce que je dis d’ailleurs au gouvernement. Ils me disent qu’ils sont fatigués, je leur réponds qu’ils ne doivent pas être fatigués. Et qu’ils doivent continuer. Parce que moi je veux aller plus vite, plus loin. Je veux que la Côte d’Ivoire soit un modèle. Je veux que les Ivoiriens aient cette fierté que je vois partout. De sorte que dans deux à trois ans, les Ivoiriens se disent qu’ils ne sont pas les meilleurs, seulement, qu’au football. Mais qu’ils sont les meilleurs, un peu partout. Et qu’ils veulent rester en tête de liste. C’est ce que je souhaite pour mon pays.
Et si vous n’êtes pas réélu, que feriez-vous pendant les cinq prochaines années ?
J’ai tellement de choses à faire. J’avais un institut conseil que j’ai liquidé pour ne pas avoir de conflit d’intérêt. Je peux recommencer à donner des conseils ici et là. Je peux enseigner. Y compris à l’Université d’Abidjan. Je peux faire des conférences, écrire des livres. (S’adressant à Venance Konan…) On fera un livre ensemble toi et moi (rire), tu es un grand écrivain. Mais ceci étant, je souhaite quand même continuer. Et je souhaite que mes concitoyens me donnent la possibilité de continuer. Parce qu’il y a encore beaucoup à faire. Je ne voudrais pas que ce travail soit interrompu.
Si vous êtes réélu, un troisième mandat avec Alassane Ouattara est-il envisageable ?
Non. Vous savez, à la fin de mon second mandat j’aurai 78 ans. Même si une réforme constitutionnelle devrait m’autoriser à le faire, ce que nous n’envisageons pas, je n’accepterais pas. Mais si j’avais 60 ans, peut-être que j’allais faire trois ou quatre mandats (rire). Même en France, les mandats étaient illimités jusqu’en 2002. C’était des septennats illimités. Ce n’est qu’en 2002 que la France a limité les mandats. A savoir, deux fois cinq ans. Aux États-Unis, Roosevelt a fait combien d’années au pouvoir ? Il y a beaucoup d’exemples. C’était des pays en construction. Je ne dis pas que je suis d’accord avec tous ceux qui veulent rester 20 à 25 ans au pouvoir. Mais je veux dire qu’il ne faut pas tout de suite stigmatiser les Africains sur cette question de limitation de mandat. Il y a des pays où c’est une bonne chose, où l’alternance permet d’avoir du sang neuf. Mais il y a d’autres pays, où s’il y a un très bon leader, je pense que c’est dans l’intérêt de ces pays de continuer avec ces leaders-là pour encore cinq ou dix ans si ces pays le souhaitent. J’ai quelques exemples de pays en tête, mais je ne vais pas en citer. Il faut que les élections soient totalement transparentes. Et que les résultats soient la réalité de ce que le peuple de ce pays souhaite. Qu’est-ce que la constitution ? C’est la volonté populaire. Nous, nous avons voulu d’Houphouët-Boigny pendant combien de mandats ? Pendant quatre à cinq mandats. Cela a été très bon pour la Côte d’Ivoire n’est-ce pas ? Puisqu’il nous a amené la paix, la prospérité, la fierté, la dignité, le rayonnement. Si on nous avait demandé si Houphouët devrait se limiter à deux mandats, moi j’aurais dit non. Donc, nous sommes très fiers de notre héritage. Mais nous sommes maintenant dans un autre système. Mais je n’aime pas les donneurs de leçon.
Vous soutenez certains de vos homologues qui briguent un troisième mandat. Et donc votre collègue burundais…
Ah non non. Je ne veux pas rentrer dans cette polémique. Surtout que le Burundi est très loin d’ici. Moi je suis pour le principe de deux mandats. Je pense que deux mandats de cinq ou sept ans, cela suffit largement. Mais je ne veux pas en faire un principe. Comme si c’était la Bible ou le Coran.
Quelle Côte d’Ivoire aimeriez-vous laisser aux générations futures ?
Nous essayons de construire aujourd’hui, un pays en paix. Je crois que la Paix est revenue. Je veux continuer de renforcer la sécurité des Ivoiriens. Cela est très important. Je veux être conforme à mon engagement d’améliorer le quotidien de mes concitoyens. Même les plus défavorisés. Nous sommes en train de le faire. Je veux faire en sorte que la Côte d’Ivoire soit respectée. Que les Ivoiriens soient fiers de notre nation. Je crois que tout cela est en train de se dérouler. Mais cela n’est possible que si nous avons un pays démocratique, un État de droit, que si nous sommes rassemblés. Si nous avons la même vision de l’avenir de notre nation. Et c’est pour cela que le rassemblement des Ivoiriens est essentiel. Élection ou pas, nous devons avoir cette volonté de mériter d’être un Ivoirien. Kennedy le disais: « ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays ». Chacun de nous doit se demander ce qu’il peut faire pour la Côte d’Ivoire. Et cela m’amène à parler de civisme. Je veux que l’Ivoirien se sente mieux dans sa peau et soit dans de meilleures conditions matérielles. Mais également, qu’il retrouve l’ouverture que la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens avaient auparavant. C’est très important, parce que nous savons qu’il y a eu des divisions quelque part. Il y a eu de l’intoxication, des mensonges. Il faut sortir de là. Il faut renforcer ce civisme. Il faut que l’amour pour la patrie revienne. Cela est essentiel pour moi. Nos enfants et petits-enfants doivent être fiers d’être Ivoiriens. Moi mes petits-enfants sont fiers d’être Ivoiriens. Même s’ils ont vécu à l’extérieur. Pour obtenir cela, les hommes politiques que nous sommes, doivent faire preuve de responsabilité. La politique ce n’est pas « hôte toi de là que je m’y mette ». La politique c’est servir son peuple. C’est être au service de son peuple. C’est avoir une vision pour son pays. C’est de constater chaque jour que l’on avance, que le pays est en progrès. J’ai une ambition très forte pour mon pays. J’ai voulu être président de la République. Je remercie mes concitoyens de m’avoir élu. Et je souhaite continuer, parce que je pense que nous pouvons faire encore mieux. Et que la Côte d’Ivoire est en train de retrouver sa place. La place qui est la nôtre, mais que nous avions perdue. Et que nous sommes en train également d’avancer vers le rassemblement, la démocratie, la paix et le progrès.
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