Le conflit entre agriculteurs et éleveurs dans le centre du Nigeria a fait six fois plus de morts que Boko Haram depuis le début de l’année et menace de “déstabiliser le pays”, selon un rapport du centre d’analyses International Crisis Group(ICG) paru jeudi.
La compétition pour l’accès à la terre et aux ressources, aggravée par l’explosion démographique dans le pays le plus peuplé d’Afrique est devenue “la menace sécuritaire la plus sérieuse”, estime ICG.
Au moins 1.500 personnes ont été tuées dans les violences entre agriculteurs, majoritairement chrétiens, et éleveurs principalement nomades et musulmans depuis septembre 2017, affirme le rapport.
Sur ce total, plus de 1.300 ont perdu la vie entre janvier et juin, soit un bilan six fois plus élevé que le nombre total de victimes attribuées par les Nations unies à l’insurrection du groupe jihadiste Boko Haram dans le nord-est.
L’ICG appelle le gouvernement à intensifier ses efforts pour endiguer les violences à l’approche des élections générales prévues en février prochain, qui attisent généralement les tensions communautaires, religieuses et politiques.
Le conflit “engendre un bilan toujours plus meurtrier et, avec les élections qui se profilent en 2019, pourrait déstabiliser le pays si le gouvernement et les autres acteurs échouent à le contenir”, note ICG.
Les forces de police et militaires ont été incapables de rétablir l’ordre et de traduire en justice les auteurs d’attaques menées par des milices de mieux en mieux organisées et armées, dans des territoires souvent reculés.
L’attaque la plus meurtrière, menée quasi simultanément contre 11 villages de la région de Barakin Ladi (Etat du Plateau), a fait fin juin plus de 200 morts.
Face à l’impunité, de nombreuses communautés rurales des Etats du centre du pays se sont défendues elles-même, ce qui a engendré un cycle sans fin de représailles.
Selon l’ICG, ces méthodes de “terres brûlées” ont fait plus de 300.000 déplacés, accueillis chez des proches ou dans des camps surpeuplés et insalubres.
La plupart de l’aide humanitaire internationale se concentre dans le nord-est du pays, dévasté par neuf années d’insurrection jihadiste.
Ces déplacements de masse ont affecté la production agricole et pourrait faire flamber les prix des denrées alimentaires, car de nombreux agriculteurs ne veulent ou ne peuvent plus travailler leurs terres à cause de l’insécurité.
Le président Muhammadu Buhari est accusé de passivité à l’égard des éleveurs, des peuls comme lui, qui sont régulièrement stigmatisés dans les médias nigérians.
L’ICG estime que cet argument n’est “pas tenable”, Buhari ayant également échoué à punir les bandes armées qui sévissent notamment contre des éleveurs peuls dans plusieurs Etats du nord.
Avec AFP