Pour le premier rendez-vous de son nouveau cycle de conférences, Jeune Afrique a invité cinq dirigeants de grandes entreprises à débattre sur les principaux défis opérationnels auxquels ils font face sur le continent.
Le 22 juin, cinq dirigeants de grandes entreprises ont participé à la conférence Jeune Afrique organisée dans l’auditorium du cabinet d’avocats d’affaires parisien Orrick Rambaud Martel. Ce rendez-vous, le premier d’un nouveau cycle de débats, s’inscrit dans une conjoncture défavorable aux groupes du continent.
La 18e édition du classement Jeune Afrique des 500 premières entreprises africaines montre que celles-ci ont perdu 200 milliards de dollars (plus de 185 milliards d’euros) de revenus en trois ans.
Une perte relative
Mais « dans toutes les situations, il est possible de gagner, assure Bruno Witvoet, vice-président exécutif Afrique d’Unilever. Au Nigeria, malgré les difficultés en matière d’importations, causées par la pénurie de dollars, nous avons travaillé à étendre notre distribution, en motos et en tricycles plutôt qu’en camions, dans les sept États musulmans du Nord jusqu’à Maiduguri, habituellement plus connu pour ses attentats ».
La filiale locale du leader mondial des biens de consommation figurait en 388e position du dernier top 500 avec un chiffre d’affaires de 294,3 millions de dollars.
À chacun sa recette pour tenir le cap : augmentation des volumes chez AccorHotels, réduction des coûts pour Sifca
Même son de cloche pour Olivier Granet, directeur général et directeur des opérations Moyen-Orient et Afrique d’AccorHotels, numéro un européen de l’hôtellerie et premier hôtelier africain en nombre de chambres : « Bien sûr, les économies africaines souffrent. Mais les revenus par chambre sont moins affectés qu’au Moyen-Orient, et nous bénéficions du renforcement des aéroports et des connexions intra-africaines. À Abidjan, la hausse des réservations a atteint 20 %. »
À chacun sa recette pour tenir le cap : augmentation des volumes chez AccorHotels, réduction des coûts pour Sifca. Le premier groupe agro-industriel d’Afrique de l’Ouest a dû appliquer des remèdes de choc pour répondre à la chute – amorcée en 2011 – des cours de l’hévéa et de l’huile de palme.
« Nous avons intégré les cycles économiques à notre réflexion en installant un logiciel de gestion des coûts, en changeant nos relations avec les planteurs et en améliorant la qualité de nos produits », défend Alassane Doumbia, président du conseil d’administration de Sifca.
Une adaptation nécessaire
Les ambitions doivent s’adapter à la conjoncture, comme celles de CFAO Retail, qui déploie un réseau d’hypermarchés et de galeries marchandes au sud du Sahara. « Nous avons décidé de reporter notre entrée au Nigeria », indique Xavier Desjobert, le directeur général du groupe.
Quel que soit le niveau de la croissance, la demande est là, affirment de concert ces grands patrons
Et ce même si le géant ouest-africain représente 30 % des magasins que CFAO envisage d’ouvrir dans huit pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Mais à Abidjan, où il vient d’inaugurer son deuxième centre commercial PlaYce, le groupe est « bien parti et [touche] notamment les ménages qui ont plus de 2 000 euros de revenus par an », assure Xavier Desjobert.
Quel que soit le niveau de la croissance, la demande est là, affirment de concert ces grands patrons. Mais gare aux modèles préconçus : « On ne connaît pas encore vraiment le consommateur africain », prévient Zouhaïr Bennani, PDG de Label’Vie, l’un des leaders de la grande distribution au Maroc (186e place du top 500 avec 685 millions de dollars de chiffre d’affaires en 2015), qui a pris le contrôle de l’ivoirien CDCI en 2016.
Et d’illustrer son propos par le rebranding d’une partie des 200 magasins CDCI : la nouvelle enseigne, baptisée King Market, a eu pour effet de booster les ventes, a assuré le Marocain, « parfois jusqu’à 100 % ». Pour Alassane Doumbia, c’est clair : « Le copier-coller, ça ne marche pas. »
Avec jeuneafrique