Data analyst, data scientist, responsable e-commerce, web marketer, e-brand manager, responsable e-merchandising…un certain nombre de profils à forte expertise et/ou composante technique sont recherchés dans la distribution. Marie Agot, senior client partner chez IBB Executive Search, donne les tendances des profils du digital sollicités dans la grande distribution.
A l’instar des autres secteurs, celui de la distribution est de plus en plus touché par la digitalisation. Où se situe-t-elle dans la transformation digitale ?
Dans le secteur de la distribution, l’émergence du digital offre de nouvelles opportunités de croissance liées à l’optimisation de la chaîne de valeur opérationnelle et à l’ouverture d’un nouveau canal de vente, le e-commerce.
Pour les enseignes de la grande distribution (GMS), cette nouvelle donne représente une aubaine pour accroître leurs parts de marché, répondre au renouveau des habitudes de consommation de clients connectés et de plus en plus exigeants ou pour adresser une clientèle isolée jusqu’alors inaccessible (zone rurale par exemple). Plusieurs grandes enseignes sont en pleine transformation en adaptant leurs organisations, en cherchant le juste équilibre entre la vente en magasin (store) / vente en ligne (web) et en repensant leurs métiers.
En ce qui concerne la distribution traditionnelle, le digital reste encore peu utilisé mais des changements profonds se dessinent. Par exemple, le développement du m-payment permettra aux consommateurs de payer leurs courses par le biais de leur smartphone, aux détaillants de payer leurs fournisseurs sans circulation de cash ou d’octroyer des microcrédits désormais autorisés par la nouvelle loi sur les établissements de paiement.
Les enseignes ont-elles pris conscience de la nécessité d’entamer ce processus de transformation ?
De manière générale, deux groupes d’entreprises se distinguent : celles qui très tôt ont emboîté le pas de la digitalisation et n’ont pas hésité à s’entourer des meilleures talents du marché pour ne pas se laisser distancer par leurs concurrents historiques ou par des nouveaux acteurs 100% digitaux ; et celles qui, par manque de conviction, ne se donnent pas les moyens pour s’entourer des équipes requises alors que la pérennité de l’entreprise en dépend face à des concurrents qui s’adaptent et qui innovent.
Quel est l’enjeu de l’expérience client pour les entreprises du secteur ?
Face à une concurrence toujours plus vive et des consommateurs plus exigeants, l’expérience client est un levier de différenciation majeur pour les acteurs du secteur.
La digitalisation fait entrer les entreprises dans une nouvelle phase : celle de l’hyper-représentation du parcours client puisque le consommateur, toujours connecté sur divers appareils ou applications, peut être ciblé à n’importe quel moment, où qu’il soit ; et celle de l’hyper-personnalisation du parcours client grâce à la masse de données collectées et analysées sur les habitudes de consommation de chacun.
Le consommateur attend de vivre des expériences shopping uniques et mémorables, mais également humanisée et guidée. Ce nouvel enjeu pour les enseignes, que les initiés nomment clientelling, est au cœur de l’expérience d’achat car il offre la possibilité de personnaliser le parcours en boutique et d’offrir des conseils taillés sur-mesure. Certes, cette notion n’est pas nouvelle mais son originalité réside dans le fait d’instaurer cette relation client en «temps réel» grâce à l’usage de la data et des nouvelles technologies digitales (tablettes, etc.), alors que le plus souvent le vendeur ne connaît pas personnellement le client.
Les fonctions les plus digitalisées dans la distribution ?
Les activités marketing et commerciale, nerfs de guerre du secteur, sont à ce stade celles qui sont les plus digitalisées au sein de l’entreprise.
La majeure partie des acheteurs ont un comportement d’achat «web-to-store». En d’autres termes, le choix se fait en ligne mais l’acte final d’achat est concrétisé sur un point de vente physique. L’enjeu pour les équipes marketing revient donc à offrir une expérience d’achat sans contour en jouant habilement sur les 2 canaux de vente. Plus encore, le consommateur d’aujourd’hui est en attente de «retail-tainment», il est moins fidèle et reste avant tout à l’affût d’«opportunités». Les équipes marketing doivent donc travailler à tisser un lien émotionnel fort entre le consommateur et l’enseigne sur la base des données récoltées en amont.
Côté commercial, les vendeurs doivent savoir humaniser le processus d’achat en tirant partie des données récoltées sur les préférences clients de sorte à ajuster leur argumentaire commercial.
Un petit nombre d’entreprises ont également entamé la digitalisation d’autres fonctions stratégiques pour le secteur, à l’instar des achats ou de la supply-chain.
Quel que soit le niveau de maturité du processus de transformation digitale, la Direction des systèmes d’information devient pivot pour accompagner cette mutation en devenant un véritable «business partner» des autres Directions métiers.
Qu’en est-il des profils que vous recherchez pour vos clients dans ce domaine ?
Nos clients nous sollicitent de plus en plus pour recruter les talents à même d’accompagner leurs projets de transformation.
Au niveau du Top Management, nous notons une demande croissante pour des postes de Directeur de la transformation digitale ou de Chief digital officer.
Un certain nombre de profils à forte expertise et/ou composante technique sont également recherchés :
• Sur le champ de la data : data analyst, data scientist…
•Sur le champ de l’expérience client : UX designer
•Sur le champ commercial : responsable e-commerce
•Sur le champ marketing : web marketer, e-brand manager, responsable e-merchandising, responsable marketing mobile, etc.
Comment se comporte le marché des rémunérations des profils digitaux ?
Les compétences digitales sont encore rares sur le marché. Les experts du digital sont plébiscités par les entreprises du monde entier positionnant ainsi leur rémunération sur une «cote» mondiale. Si la plupart des profils digitaux sont jeunes et disposent d’assez peu d’expérience, la rareté relative de leur compétence fait d’eux des «market makers». Ils détiennent le pouvoir de négociation et les entreprises sont obligées de consentir aux efforts nécessaires pour attirer les meilleurs d’entre eux, notamment sur le champ de la rémunération.