Le 1,6 milliard de climatiseurs installés dans le monde génère 10% de la consommation électrique mondiale. Dopés par l’équipement des pays émergents, ils représenteront 45% de la demande mondiale d’électricité en 2050, si aucune correction de trajectoire n’est décidée.
Des milliards de nouveaux climatiseurs vont être installés dans le monde dans les prochaines décennies. Dans les pays émergents au climat souvent étouffant (Sud de la Chine, Brésil, Inde, Indonésie), quand les revenus d’un ménage augmentent, son acquisition est aussi essentielle que l’est le réfrigérateur.
L’urbanisation rapide des métropoles accélère encore le phénomène: les machineries urbaines, pas seulement la climatisation, créent de la chaleur, une chaleur qui est à son tour absorbée par le béton et qui alimentent le besoin qu’éprouve la population des ces villes de se rafraîchir.
“Le monde va subir une crise du froid”, affirme le directeur de l’Agence internationale de l’énergie, Fatih Birol, dont l’organisation est l’auteur d’une rapport récent (“The future of cooling“) qui alerte sur les conséquences de l’explosion prévisible de la demande mondiale de climatiseurs. Pour lui, la question des climatiseurs est “l’angle mort” du débat énergétique actuel.
En Inde, seuls 4% des ménages ont un climatiseur
En Inde, seuls 4% des ménages sont équipés en climatisation. Si dans des pays comme les États-Unis et le Japon, plus de 90% des ménages disposent de la climatisation, seulement 8% des 2,8 milliards de personnes vivant dans les parties les plus chaudes du monde.
Tout indique donc que la demande mondiale va exploser dans les prochaines décennies. Déjà, environ 135 millions de nouveaux appareils sont vendus chaque année, trois fois plus qu’en 1990, selon le rapport de l’AIE. Rien qu’en Chine, le premier marché mondial, 53 millions ont été vendus en 2016. Le parc mondial de climatiseurs dans les bâtiments (résidentiel et tertiaire) atteindra 5,6 milliards d’ici 2050, contre 1,6 milliard d’unités en 2016, ce qui équivaut à 10 nouveaux climatiseurs vendus chaque seconde sur les 30 prochaines années.
Or ces appareils consomment énormément d’électricité. L’explosion à venir de la demande risque de menacer l’équilibre des réseaux électriques. Le parc mondial de climatiseurs devrait être la deuxième plus importante source de croissance de la demande mondiale d’électricité après le secteur industriel d’ici 2050. Cette hausse de la demande nécessitera de faire sortir de terre de nouvelles capacités de production d’électricité équivalant à la capacité d’électricité actuelle combinée des États-Unis, de l’UE et du Japon. En 2016, les climatiseurs ont déjà généré 10% (soit 2000 TWh) de la demande globale d’électricité, pourcentage qui pourrait s’élever à 45% en 2050 si aucune correction de trajectoire n’est adoptée.
Durcir les normes de consommation électrique des appareils
Pour endiguer cette croissance inexorable, les solutions, détaillées dans le rapport, existent, comme développer l’énergie solaire donc le pic de production, en journée, correspond au pic de consommation des climatiseurs; ou améliorer l’isolation énergétique des bâtiments.
Mais la priorité, selon l’organisation, est de durcir les normes sur la consommation électrique des appareils. Par exemple, les climatiseurs vendus au Japon et dans l’Union européenne sont généralement 25% plus efficaces que ceux vendus aux États-Unis et en Chine. Les améliorations de l’efficacité énergétique pourraient réduire de moitié la croissance de la demande d’énergie renouvelable grâce à des normes de performance énergétique obligatoires. Selon le rapport, “grâce à des normes strictes de performance énergétique et d’autres mesures telles que l’étiquetage, l’efficacité énergétique moyenne du stock de climatiseurs pourrait plus que doubler et 2050. Cela réduirait considérablement la nécessité de construire de nouvelles infrastructures électriques pour répondre à la demande croissante.” Reste à convaincre les consommateurs qui plébiscitent encore largement les appareils énergivores et moins chers, notamment aux États-Unis.
Avec bfm