L’ambiance est électrique à Lagos, alors que la pénurie de carburant a atteint son apogée cette semaine au Nigeria. Le gouvernement nigérian a prévu une aide d’environ 200 millions de dollars pour les importations de carburant.
Les queues de voitures s’étendent à perte de vue, le ton monte dans des embouteillages monstre. Selon les médias locaux, des paramilitaires auraient tiré sur des vendeurs de pétrole au marché noir, alors que dans l’État de Lagos, le gouverneur a prononcé une interdiction kafkaïenne, celle des « files injustifiées », pour tenter de fluidifier le trafic.
Détresse financière
Le Nigeria n’en est pas à sa première pénurie de carburant. En dépit de son immense richesse pétrolière, après des années de mauvaise gestion, les raffineries appartenant à l’État ne travaillent qu’à une fraction de leur capacité de 445 000 barils par jour, selon l’agence Bloomberg.
Mais cette dernière crise est particulièrement grave, une situation que des experts attribuent à la chute globale des prix du brut et aux restrictions à l’importation.
« Les commerçants en aval sont probablement dans une véritable détresse financière en ce moment, » estime Alan Cameron, économiste à Exotix, basé à Londres, cité par l’AFP.
À court de dollars, les importateurs de carburant sont obligés de se fournir sur le marché noir, où le naira oscille autour de 220 nairas le dollar. Au final, les importateurs paient la différence sans aucune compensation.
Une solution « d’ici la deuxième semaine d’avril »
Pour remédier à cette situation, le secrétaire d’État au Pétrole Emmanuel Kachikwu a conclu un accord avec les entreprises énergétiques internationales présentes au Nigeria pour fournir une aide à l’importation d’environ 200 millions de dollars.
« Il s’agit probablement de la question la plus difficile depuis mon arrivée, » a déclaré le ministre dans un discours publié jeudi sur sa page Facebook, admettant que cette aide financière n’était qu’un « tampon » et non une solution à long terme.
Le ministre a toutefois promis que « d’ici la deuxième semaine d’avril, nous devrions sortir de la situation des files d’attente ».
Une politique monétaire critiquée
Les cours mondiaux du pétrole ont chuté de 70 % depuis 2014, privant le Nigeria, premier producteur de brut du continent, de sa principale source de revenus et faisant dégringoler à la fois la croissance et la monnaie locale, le naira.
Au lieu de dévaluer, comme le recommande le Fonds monétaire international, le gouvernement a préféré maintenir le même taux officiel (entre 197 et 199 nairas pour un dollar) mais interdire l’importation de certains produits et protéger les réserves en devises restantes.
« Le Nigeria est à un tournant crucial », estime Anna Rosenberg, directrice de la recherche en Afrique subsaharienne au Frontier Strategy Group. « Le pays pourrait se débrouiller cette année avec une croissance relativement faible, mais seulement si le gouvernement ajuste la politique monétaire et laisse le naira se dévaluer. »
Avec jeuneafrique.com