Une déclaration lue par José Manuel Barroso, ex-président de la Commission européenne et un des invités spéciaux, suggère notamment l'”encouragement des investissements privés par des facilités fiscales et administratives et une administration plus performante”.
Ce plaidoyer n’est pas nouveau. Depuis l’opérationnalisation sous la conduite du gouvernement du Cameroon Business Forum en 2010 par exemple, cette réforme est réclamée par les acteurs tant nationaux qu’étrangers de l’économie camerounaise, préoccupés par l’assainissement d’un environnement des affaires réputé peu favorable à l’investissement.
Le président Paul Biya a fustigé maintes fois, dans ses discours officiels, une administration publique clientéliste ayant fait de la corruption un “sport national” et l’inertie comme mode de fonctionnement, qui ne se prive pas de créer des blocages dans la réalisation d’importants projets d’investissement utiles pour le développement du pays.
Au cours des dernières années, de nombreuses délégations étrangères ont visité le Cameroun dans l’objectif de se faire une place dans la valorisation de ses abondantes richesses du sol et du sous-sol.
Beaucoup, après avoir pourtant été rassurées par les autorités, sont reparties sans concrétiser leurs promesses d’investissements à cause de ces blocages.
Autour des décideurs, il y a souvent une multitude d’intermédiaires qui n’aident pas toujours à faciliter la prise de décision.
A l’ouverture de la conférence mardi déjà, l’ex-président de la Commission européenne a plaidé pour “un Etat de droit qui donne la garantie non seulement aux étrangers mais à ses propres nationaux”.
Il a aussi insisté pour permettre de “connaître les règles avec prévisibilité”.
Selon les chiffres officiels, quelque 800 invités nationaux, européens, américains et asiatiques ont pris part à ces assises.
Ils ont aussi recommandé la “facilitation de l’obtention des visas pour les hommes d’affaires avec dématérialisation des démarches (mise en place d’une procédure de visa on line) et, en attendant, l’octroi généralisé des visas au débarquement”.
La création des zones économiques spéciales a en outre retenu l’attention, un concept par lequel la Chine, aujourd’hui premier investisseur et premier partenaire commercial du Cameroun et d’autres pays africains, a opéré son expansion économique actuelle.
Principale économie de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), organisation régionale composée en outre du Congo, du Gabon, de la Guinée équatoriale, de la République centrafricaine et du Tchad et dont il concentre environ 40% du PIB, le Cameroun cherche aujourd’hui le défi du redressement de la courbe de sa croissance.
Dans un contexte marqué par l’effondrement des prix des matières premières au premier rang desquelles le pétrole, qui représente près de 40% de ses recettes d’exportation, et l’insécurité due aux activités terroristes de la secte islamiste nigériane Boko Haram, ce défi suppose “un regain de l’investissement privé”, indique le ministre camerounais de l’Economie, Louis Paul Motaze.
La transformation de ces matières premières généralement exportées à l’état brut préoccupe. Pour cela, les autorités déclarent vouloir “inciter les opérateurs privés nationaux à mieux impliquer dans la production de la richesse”.
Agro-industrie, infrastructures de transport, énergie, logement social et aménagement urbain, industries extractives et nouvelles technologies : ce sont autant de secteurs prioritaires pour lesquels le Cameroun souhaite attirer davantage d’investissements directs étrangers et de nouveaux partenaires.
“L’enjeu de notre politique économique aujourd’hui réside dans notre capacité à créer les conditions idoines pour générer l’investissement privé là où il n’existe pas, le soutenir et le consolider là où il tend à s’essouffler, soit en raison de l’environnement des affaires, soit alors du fait des chocs exogènes que subit notre économie depuis quelques années”, résume M. Motaze.
Dans ses conclusions, la conférence économique de Yaoundé a aussi proposé le “renforcement des liens avec les pays voisins de la CEMAC et le Nigeria, pour accroître la taille du marché régional”.
Avec le Nigeria en particulier, son deuxième fournisseur d’ailleurs derrière la Chine, il est surtout préconisé la signature d’accords de partenariat économique.
Première économie africaine depuis 2011, au détriment de l’Afrique du Sud, surclassée une fois de plus par l’Egypte selon le nouveau classement du Fonds monétaire international (FMI) publié mercredi, le Nigeria, par ailleurs premier producteur et exportateur de pétrole du continent, est un vaste marché de plus de 170 millions de consommateurs.
Les deux pays voisins partagent une longue frontière de plus de 1.500 km. Le président Paul Biya a appelé dans son allocution mardi la communauté d’investisseurs à tirer profit de la position stratégique de son pays, “au carrefour de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, à l’intersection des zones CEDEAO et CEMAC”.
“Sa façade atlantique, son réseau ferroviaire [1.200 kilomètres], ses trois aéroports internationaux et ses 50.000 km de routes, tout cela en constant développement favorise une bonne intégration au commerce régional et mondial. Ses ressources naturelles sont abondantes, la diversité des sols, climat et milieu naturel y sont propices à l’agriculture”, a encore souligné le chef de l’Etat camerounais.
A la clôture de leurs travaux mercredi soir en présence du Premier ministre, Philemon Yang, les participants à la conférence ont demandé “la mise en place, à un niveau approprié, d’un conseil léger pour le suivi du financement et de la réalisation des projets identifiés et présentés”.
Au total, le gouvernement camerounais a soumis à ses invités une liste de 14 projets prêts pour l’investissement, d’une valeur d’environ 1.000 milliards de francs CFA (2 milliards USD). Aucun accord de financement n’a cependant été conclu, contrairement à des rendez-vous similaires organisés dans d’autres pays.
En dépit d’une bonne notation de BB avec des perspectives stables attribuée par les agences de notation internationales, le Cameroun doit encore beaucoup travailler pour améliorer son image, mal perçue à l’international, a par ailleurs recommandé cette rencontre.
Avec n.afrique