46 ans après la Can 1972 marquée par le “scandale de la billetterie” qui fit envoyer en prison de nombreux notables du régime Ahidjo, avec à la clé des “affectations disciplinaires” pour ceux qui n’étaient pas activement impliqués mais qui en raison de leurs charges étaient censés ne pas laisser les choses leur échapper, le Cameroun, comme maudit par l’organisation sur son sol d’une Coupe d’Afrique des Nations, est en train de faire face pour ce qui est de la CAN 2019 dont le pays a été au passage dépossédé il y a quelques jours, à un autre scandale qui pue la monstruosité de l’être humain à des milliers de lieues à la ronde : les marchés fictifs par ailleurs surfacturés de ceux qui ont appris à récolter là où ils n’ont pas semé.
Des triplements, quintuplements voire décuplements des coûts qui ont rendu la CAN onéreuse pour le trésor public, juteuse pour les prédateurs de la fortune publique
On parle des camions de sable facturés à 700.000 francs CFA l’unité alors que la mercuriale fixe à 120 000 francs le
Camion de 20 tonnes de sable fin, à 140.000 francs le camion de 20 tonnes de sable “carrière”, à 230 000 francs le camion de 20 tonnes de sable tout venant encore appelé “sable Sanaga”. On parle aussi du ciment facturé à 16500 F.CFA le sac, alors que le sac de ciment coûte d’ordinaire entre 4500, et 5.000 francs, et 6.000 fracs l’unité en période de pénurie.
On ne va pas oublier les ouvriers payés sur les papiers officiels 500.000 francs la journée, alors que des ouvriers connus attestent n’avoir pas été payés 5.000 francs la journée, et qui plus est, il y en a qui ont totalisé des arriérés de tâches impayées sur 6 mois, voire le double. A telle enseigne qu’il y a eu des mouvements d’humeur sur certains chantiers de la CAN 2019 accompagnés de séquestration du maître d’œuvre : le cas de l’entreprise Prime Potomac appartenant à un certain Ben Modo, réputé homme de main de l’ancien ministre Directeur du Cabinet civil de la présidence (limogé le 2 mars dernier), dont des indiscrétions affirment qu’il est le paravent affairiste du ministre Secrétaire Général de la Présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh, natif de la Haute-Sanaga, département d’origine des parents du président Biya qui ne s’étaient installés à Mvomeka’a au début des années 1900 que pour des raisons professionnelles –le très heureux père du président camerounais était un catéchiste-, mais aussi département d’origine de la mère de l’actuelle première dame, Chantal Pulchérie Biya, née Vigouroux.
Selon une enquête menée par notre confrère Boris Bertholt, “Ben Modo de Ferdinand Ngoh Ngoh” aurait perçu à lui seul pour le compte de son entreprise Prime Potomac, la rondelette somme de 26 milliards alors que le contrat que cet entrepreneur aux parapluie et godasses solides ne prévoyaient que 3,9 milliards pour la réfection du stade Roumde Adjia de Garoua et autres infrastructures. Mais Ben Modo n’est pas le seul dans le cas.
Le président de la république impliqué par Ngoh Ngoh dans un détournement de 3,7 milliards ?
Au Cameroun, quand on ne veut pas se faire indexer pour ses magouilles, il faut faire preuve de beaucoup de “largesses” dans le tripatouillage des biens publics. C’est ainsi qu’un certain prestataire dénommé “La Coopération Commerciale Canadienne » qui serait la propriété du rejeton d’un Général de l’armée camerounaise passé à la 2ème Section des Officiers Généraux, et pas n’importe lequel (il s’agit du Général Pierre Semengue, premier militaire camerounais à accéder au Généralat, le seul sous le régime Ahidjo, et l’unique à ce jour à avoir « terminé le tableau » avec le grade de Général d’Armée) aurait reçu 71 milliards fcfa selon Boris Bertholt, qui cite également sur sa page Facebook, qui cite aussi l’entreprise Numelec d’un certain Alain Kana avec 3 milliards 792 millions fcfa. « Ferdinand Ngoh Ngoh, le SG/PR a écrit le 2 novembre 2018 sur hautes instructions de Paul Biya au ministre des Finances instruisant des paiements de Numelec », écrit le journaliste.
Et dire que le 2 novembre, soit un mois après le passage au Cameroun du président de la Confédération Africaine de Football, Ahmad Ahmad, Paul Biya était déjà au courant, à en croire le vice-président de la CAF Constant Omari Selemani qui fit partie du périple camerounais le 2 octobre, qu’il était impossible que le Cameroun abrite la Can de juin-juillet 2019, vu l’état d’avancement des travaux.
Déduction logique, sauf à croire que Ngoh Ngoh a invoqué faussement une « haute instruction » du chef de l’Etat pour le paiement des factures d’un prestataire dont le service rendu a du mal à décliner sa visibilité et sa traçabilité, question de percevoir sa rétro-commission avant qu’il soit tard, Paul Biya aurait participé au moins au détournement des 3,792 milliards. Mais connaissant les habitudes de la gouvernance au Cameroun sous le vieux président qui a à son passif de diriger le pays par procuration depuis des lustres, préoccupé qu’il est par ses ennuis personnels de santé, il n’est pas exclu que cette instruction à lui attribuée soit le fait de Ngoh Ngoh seul, agissant de son propre chef pour berner son collègue argentier national, qui ne peut quand même pas aller demander une audience au chef de l’Etat constamment en villégiature à Mvomek’a ou en brefs-longs séjours privés à l’hôtel Intercontinental en Suisse, sans courir le risque de perdre son maroquin ministériel au remaniement du gouvernement suivant, tant il est vrai que les audiences au grand manitou sont filtrées par le Secrétariat Général de la Présidence ou le Cabinet civil de la présidence, deux maillons de la même chaine qui s’entendent en toute complicité.
Une chose est sûre au regard de ce qui précède, on n’est qu’au début des révélations, et ça promet des vertes et des pas mures. A une allure telle que personne n’est sûr qu’entre les règlements des comptes consécutifs aux coups fourrés des gestionnaires indélicats et la mobilisation des ressources nécessaires pour poursuivre « sereinement » tel que recommandé par la CAN afin d’être à jour pour un hold-up sur la CAN de la Côte d’Ivoire en 2021, le Cameroun, le Cameroun aura eu le temps de rassembler l’énergie qu’il lui faut pour relever cet autre défi.
Source: cameroonvoice.com