Avec un total de bilan de 165 milliards de F CFA (251,5 millions d’euros) en 2014, les Caisses populaires du Burkina ont acquis une notoriété telle que la Faîtière, l’organe de pilotage stratégique de ce réseau d’institutions de microcrédit, envisage de fonder avec six autres réseaux du Bénin, du Mali, du Sénégal et du Togo un établissement financier à caractère bancaire.
« La création de la Financière de l’Afrique de l’Ouest [Finao] s’inscrit dans la mise en place d’unités d’affaires par la Confédération des institutions financières en Afrique de l’Ouest », explique Daouda Sawadogo, directeur général de la Faîtière des Caisses populaires au Burkina Faso. Pour 2015, le réseau au 1,1 million de membres propriétaires (en hausse de 10 %) espère atteindre un total de bilan de 200 milliards de F CFA. Au 30 juin 2015, il avait déjà collecté une épargne de 120 milliards de F CFA et distribué 70 milliards de F CFA de crédits. « Si on devait nous classer avec les banques commerciales, le Réseau des Caisses populaires occuperait la sixième voire la cinquième place en termes d’épargne et de crédit », affirme l’économiste gestionnaire.
Dans le paysage de la microfinance burkinabè, les Caisses populaires sont incontournables : elles pèsent plus de 80 % du secteur. Un long chemin a été parcouru depuis leur création, en 1972, par un coopérant canadien, Michel Lagacé, dans la province de la Bougouriba (Sud-Ouest). À force de visites aux autorités administratives et aux leaders d’opinion pour expliquer le projet, couplées à des voyages d’étude au Ghana, il parvient à mettre en place les premières caisses à Koper, Dissin et Diébougou.
Soutenues par Développement international Desjardins, une coopérative financière canadienne réputée, ces entités évoluent et forment un véritable réseau au milieu des années 1980. Le mouvement coopératif s’étend aux régions du Centre (Ouagadougou) et du Nord (Ouahigouya) et parachève sa structuration dix ans plus tard avec la création de la Fédération des Caisses populaires, instance qui regroupe les Unions régionales, mutualise les services et, surtout, définit les grandes orientations.
L’engouement pour le microcrédit
En 2005, c’est l’amorce d’un nouveau virage avec le lancement du processus de reconfiguration des caisses. Cette fois, celles du Sud-Ouest rechignent à suivre. Mais, confrontées à une perte colossale de 300 millions de F CFA, elles acceptent finalement le principe et passent de 19 à 3 unités. Parallèlement, le nombre total de caisses du réseau se réduit de 103 à 39, tandis que les quatre Unions, la Fédération et la coordination technique donnent naissance à la Faîtière. « Nous sommes passés de trois à deux niveaux : Caisse et Faîtière. Cela accélère la prise de décision et rend les caisses plus fortes – nous avions constaté une inefficience de notre gouvernance », précise Sawadogo.
Au Burkina, environ 329 systèmes financiers décentralisés sont répertoriés. L’engouement des populations exclues du système bancaire pour le microcrédit a contraint le gouvernement à reconnaître officiellement le secteur. En 2014, une épargne de 196,5 milliards de F CFA a été collectée, pour 85,2 milliards de crédits octroyés. Une stratégie nationale, pilotée par une direction du ministère de l’Économie, encadre la microfinance. Les derniers cas flagrants de dérives remontent à une vingtaine d’années, avec les faillites de l’Union des caisses d’épargne et de crédit du Burkina et du Projet de petits crédits ruraux aux femmes.
Depuis, les institutions de microfinance constituent un concurrent redoutable pour les banques classiques au Burkina Faso. Devant la percée du microcrédit et son million et demi de clients, ces dernières n’ont d’ailleurs pu résister à la tentation de proposer des services de microfinance.
avec jeuneafrique