Les courtiers en matières premières ont bénéficié indûment de règles fiscales avantageuses, estime la Commission, qui veut y mettre un terme.
La proximité du Brexit n’empêche pas la Commission européenne de se pencher sur les arrangements fiscaux de la City de Londres. L’exécutif européen a annoncé, il y a une dizaine de jours, poursuivre le gouvernement britannique devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) concernant son application de la TVA à certains marchés de matières premières. Le Royaume-Uni avait bénéficié d’une dérogation au régime européen lors de son accession à l’Union lui permettant d’appliquer un taux de TVA nul à certaines transactions, sous condition de maintenir en l’état cette dérogation, mais l’a depuis étendue à plusieurs reprises, provoquant, selon la Commission «de graves distorsions de concurrence au détriment d’autres marchés financiers au sein de l’Union européenne».
L’application d’un taux de TVA nul permet aux assujettis de bénéficier d’un remboursement de la TVA précédemment acquittée sur les consommations intermédiaires. Option qui n’est pas ouverte aux bénéficiaires d’une exonération de TVA, ce qui est le cas de la plupart des opérations financières ailleurs en Europe. Un courtier britannique en matière premières traitant sur l’un des marchés londoniens peut ainsi demander au Trésor britannique le remboursement de la TVA acquittée sur son équipement informatique, ce que ne pourrait pas faire un courtier basé à Paris traitant sur Euronext auprès du Trésor français. «Les courtiers britanniques bénéficient ainsi d’un avantage concurrentiel déterminant»,regrette Eric Vacher, spécialiste de la fiscalité à l’Amafi. «Ils ont le beurre et l’argent du beurre», note plus crûment une source de marché.
La dérogation initiale du Royaume-Uni, qui remonte à 1977, concernait 11 marchés londoniens, dont le London Metal Exchange, pour la vente de matières premières sur ces marchés ne donnant pas lieu à une livraison physique, ainsi que pour les contrats à terme, avec la même restriction. Deux autres marchés, non concernés à l’origine, peuvent désormais bénéficier de ces dispositions, ICE Futures et le London Platinum and Palladium Market, et Londres a par ailleurs étendu le champ d’application de la dérogation à d’autres opérations sur les marchés concernés, d’après nos informations.
Le gouvernement britannique a indiqué vouloir défendre sa dérogation devant la justice européenne, ouvrant la voie à une procédure longue de plusieurs années. D’ici là, selon les termes du Brexit, la City pourrait ne pas avoir à se soucier des conclusions de la CJUE.
Avec agefi