Lors d’une rencontre avec son homologue qatari une semaine après la rupture des relations des pays du Golfe avec l’émirat, Boris Jonhnson lui a exprimé son soutien. L’ex-député bahreïnien Jalal Fairooz en analyse les raisons et le possible impact.
RT : Pourquoi Boris Johnson a-t-il décidé de soutenir la position du Qatar alors que ce dernier est soumis à un blocus de la part des pays du Golfe ?
Jalal Fairooz (J. F.) : Il a exprimé son soutien après sa rencontre avec le ministre des Affaires étrangères qatarien. Il y a trois raisons principales à cela. Tout d’abord, les Qataris sont en train de racheter Canary Wharf, le principal quartier d’affaires de Londres : il s’agit donc de gros sous provenant du Qatar. Les Britanniques ne veulent pas voir échouer ce processus.
Deuxièmement, après la décision de l’OTAN de confier un rôle plus important aux Britanniques dans la région du Golfe et au Moyen-Orient, le Royaume-Uni veut montrer qu’il est présent, qu’il peut avoir un rôle.
Troisièmement, les Britanniques ne souhaitent pas rester derrière le département d’Etat. Le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson a dit que les pays du Golfe devraient lever le blocus du Qatar. Le Royaume-Uni veut faire partie du paysage. En fait, il s’agit uniquement des intérêts britanniques. Chose étonnante, Boris Johnson n’a pas appelé à lever le blocus, mais il a dit qu’il fallait éviter tout escalade de ce blocus. C’était le moins qu’il pouvait dire.
Tandis que Rex Tillerson appelait à lever le blocus, Donald Trump publiait des messages sur son compte Twitter, affirmant que le Qatar devait arrêter de financer le terrorisme
RT : Cette démarche pourrait-elle avoir un impact sur les relations entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, le président américain ayant adopté une position opposée dans ce conflit.
J. F. : Tandis que le secrétaire d’Etat américain appelait les pays du Golfe à lever le blocus, le président américain Donald Trump publiait des messages sur son compte Twitter disant que le Qatar devait arrêter de financer le terrorisme. Boris Johnson a lui aussi mentionné, lors de son dialogue avec le ministre des Affaires étrangères qatari, qu’il fallait mettre fin au soutien des groupes extrémistes, notamment d’al-Nosra en Syrie et d’autres en Irak.
D’un autre côté, on peut observer que les Saoudiens soutiennent Fatah al-Islam, l’armée syrienne libre et d’autres organisations terroristes en Syrie et en Irak. Mais les Etats-Unis ne prennent pas de mesures contre l’Arabie saoudite : les Saoudiens viennent de payer quelque 490 milliards de dollars, ce qui fait les Américains garder le silence.
On avait besoin d’une option diplomatique, et c’est ce pour quoi Boris Johnson a opté pour ne pas gâter les relations avec les Saoudiens
RT : Le Royaume-Uni sera-t-il capable de défendre le Qatar de tous les coups à venir ?
J. F. : Il ne devrait pas y avoir de confrontation sur le terrain. Le Royaume-Uni a une base navale au Qatar mais, de l’autre côté, les Britanniques ne veulent pas perdre leurs liens avec les Saoudiens. En outre, le mois dernier ils ont bénéficié d’un autre investissement [qatari] de cinq milliards de livres sterling, après une visite de Theresa May. On avait besoin d’une option diplomatique, et c’est ce pour quoi Boris Johnson a opté pour ne pas gâter ces relations.
Et vous vous imaginez bien que si le ministre des Affaires étrangères du Qatar déclare ouvertement qu’il demande au Royaume-Uni d’intervenir pour mettre fin à ce blocus, cela implique que le Qatar a une quelque chose à proposer au Royaume-Uni.
Avec Rtfrance