Marielle Franco, conseillère municipale de Rio de Janeiro et symbole de la lutte des femmes noires brésiliennes contre le racisme et la violence policière, a été assassinée.
Marielle Franco, une conseillère municipale de Rio de Janeiro de 38 ans, a été assassinée mercredi. La voiture dans laquelle se trouvait la militante du Parti socialisme et liberté (PSOL) a été criblée de balles, en plein centre-ville. Elle revenait d’un rassemblement pour la promotion des femmes noires. Le chauffeur du véhicule a lui aussi été abattu, et une femme qui se trouvait dans la voiture a survécu. Selon les premiers éléments de l’enquête, les tirs mortels sont partis d’une autre voiture.
Des marches de protestation
Cet assassinat a suscité une vaste émotion au Brésil. Des marches de protestation se sont déroulées jeudi dans plusieurs villes. Les manifestantes et manifestants étaient nombreux devant l’Assemblée législative de Rio et dans d’autres endroits de la ville.
Le gouvernement brésilien a annoncé qu’il mettait la police fédérale à la disposition des autorités de Rio pour les assister dans l’enquête. Le gouverneur de centre droit de l’Etat de Rio a dénoncé un acte d’une “extrême lâcheté”, et le maire évangéliste de la ville a condamné cet “assassinat brutal”.
L’association de défense des droits de l’homme Amnesty International a réclamé “une enquête immédiate et rigoureuse”, afin “qu’il n’y ait aucun doute sur le contexte, la motivation et les auteurs” de l’assassinat de la conseillère municipale.
Une militante contre les violences policières
“Femme, noire, mère et issue de la favela de Maré”. C’est ainsi que qu’elle aimait se présenter. Née dans une des plus violentes favelas de Rio, Marielle Franco était un symbole de la lutte des femmes noires brésiliennes contre le racisme et la violence policière. La jeune femme, qui vivait avec sa compagne à Tijuca, quartier de classe moyenne de Rio, laisse une fille de 19 ans.
“Marielle était souriante, forte, sûre d’elle et avait les pieds sur terre. Elle regardait les gens des yeux et savait qu’elle était différente des autres élus qu’elle côtoyait”, explique Marcela Lisboa, productrice culturelle et amie de longue date de la conseillère municipale, avec qui elle a longtemps milité au sein du PSOL.
Un conseillère municipale très engagée
La vie de Marielle Franco a basculé quand une de ses amies a été tuée par une balle perdue lors d’une fusillade, peu après leur inscription dans un cours préparatoire à l’université destinée aux jeunes des favelas. C’est à ce moment-là qu’elle a décidé de se consacrer à la défense des droits de l’homme.
Elle a dû interrompre ses études après être tombée enceinte à 18 ans, mais s’est accrochée en prenant des cours du soir. Elle a fini par obtenir une bourse pour étudier dans l’université catholique PUC, une des plus prestigieuses, où elle a décroché un diplôme de sociologie, avant de se spécialiser dans l’administration publique. Marielle s’est ensuite fait un nom en tant que militante associative, avant s’engager en politique auprès du PSOL.
En 2006, elle est devenue assistante parlementaire de Marcelo Freixo, député emblématique qui a reçu de nombreuses menaces de mort après avoir dirigé une commission parlementaire sur les milices paramilitaires qui sèment la terreur dans certaines favelas. Dix ans plus tard, la jeune femme a décidé de faire le grand saut et présente sa candidature au Conseil municipal, avec un résultat qui dépasse ses espérances. Avec plus de 46 000 voix, elle est arrivée au cinquième rang des conseillers ayant obtenu le plus de voix.
Au conseil municipal, elle a notamment présenté un projet de loi pour que la ville recense les statistiques de violences contre les femmes.
Marielle Franco s’est aussi élevée contre la décision du président brésilien Michel Temer de confier en février à l’armée la sécurité de Rio pour tenter de contenir l’escalade de la violence. Il y a deux semaines, elle avait été désignée rapporteur d’une commission créée par le Conseil municipal pour surveiller d’éventuels abus des militaires.
Un sujet qui lui tenait particulièrement à coeur: en 2014 et 2015, la favela de Maré avait été occupée par les soldats et de nombreux habitants avaient dénoncé diverses exactions.
Avec l’express