Et si ce qui était bénéfique pour un collaborateur l’était aussi pour son employeur ? De plus en plus d’entreprises le comprennent et encouragent la pratique sportive et l’hygiène de vie au travail.
Se défouler sur un terrain de foot, les télévendeurs de Solocal (ex-Pages Jaunes), en rêvaient. Il y a deux ans, ils ont posté l’idée sur Eurêka, la plateforme collaborative du groupe, et décroché le soutien de leur hiérarchie. Le tournoi de football urbain maison réunit chaque saison 150 participants. D’autres collègues ont souhaité créer une chorale : la direction leur a fourni un local de répétition et un pro pour les coacher. Les salariés du géant de la chimie Arkema ont obtenu, eux, des séances de sophrologie hebdomadaires.
Quand il s’agit de bien-être au travail, suffirait-il de demander pour être exaucé ? Pas tout à fait mais presque, à en croire Stéphane Morin, fondateur de Sportonus et précurseur, en 2004, de l’accompagnement à la performance par les valeurs du sport : “Il y a peu, les employeurs se contentaient d’opérations de sensibilisation pour se donner bonne conscience et se blinder juridiquement. A la demande de leurs troupes, ils nous sollicitent désormais pour mener des actions concrètes.”
Depuis la vague de suicides de salariés en 2007, la qualité de vie au travail n’est plus un sujet anecdotique pour les états-majors. Si la pratique d’activités de détente s’est imposée comme une stratégie efficace de prévention des risques psychosociaux, ils y voient aussi l’occasion d’améliorer leur marque employeur et la performance de leurs équipes. Autant de bonnes raisons de se mettre au fitness !
Chez Solocal, le boss court avec ses troupes
Communion en short. C’est un rituel. Chaque jeudi soir, Edwige Druon, de la direction de la communication corporate de Solocal, court dans le parc de Saint-Cloud avec une poignée de collègues, entraînés par un coach de Sportonus. Le PDG, Jean-Pierre Remy, se joint parfois au groupe. “Se défouler aux côtés de son boss en short et en baskets crée un autre lien, moins formel”, dit-elle.
Responsable des relations presse à la MGEN, Benoît Coquille, lui, se félicite d’avoir rencontré dans la salle sport-santé des collaborateurs qu’il n’avait jamais croisés car ils travaillaient à d’autres étages : “On partage des moments agréables, où la personne prime sur le statut.» Une enquête de l’institut Yougov pour Invisalign le confirme : 68% des Français se sentent prêts à pratiquer une activité sportive régulière pour “mieux connaître leurs collègues” et 18% sont convaincus que «c’est un excellent moyen de se rapprocher de sa hiérarchie”.
Sportonus, expert des jeux d’entreprise
Brassage des équipes. Une fois par an, des salariés de Solocal s’affrontent en équipes mixtes lors du Move It Day. Il y a eu cette année 300 participants parmi les 2.000 employés du siège. Au menu, une course relais et des jeux, notamment un tournoi de baby-foot gonflable géant.
Dans la même veine, Clarins organise la Foulée des établissements. Entre deux fous rires, on y apprend l’art de la motivation avec les championnes Muriel Hurtis (athlétisme) et Muriel Hermine (natation synchronisée) au cours de séances d’échauffement.
De tels événements sont l’occasion de brasser les équipes et de souder le collectif “en se frottant à l’autre et en respectant les règles du jeu”, précise Sandra Blanc Mesnel, consultante chez Sportonus, qui aide à préparer la manifestation. Et pour encourager la convivialité au quotidien, sans perdre de vue la santé, rien de tel que les néo-cantines avec chef attitré, produits frais et grandes tablées, comme chez Clarins.
Clarins masse les dos
Entretien des corps. Les TMS (troubles musculosquelettiques) représentaient 87% des maladies professionnelles en 2014. Personne n’y échappe. Les cadres sédentaires souffrent en particulier de lombalgies.
C’est pourquoi au siège de Clarins – près de 600 personnes -, Lionel Comole, responsable santé au sein du groupe, organise chaque année la Journée du dos en partenariat avec le service de rhumatologie de la Pitié-Salpêtrière. Au menu : ateliers d’automassage, yoga, respiration ou renforcement musculaire.
Chez Solocal, l’ergonomie a été repensée : on peut varier les positions assis/debout grâce à des bureaux flexibles tout neufs qui s’abaissent ou s’élèvent, tandis que des poufs sur roulettes permettent d’étendre ses jambes. Sur les sites de production, les ouvriers sont souvent victimes de tendinites. D’où la systématisation de séances d’échauffement à la prise de poste. Clarins a lancé la formule sur son site de Strasbourg avant de l’étendre à l’usine de Cergy-Pontoise.
La MGEN convertit les non-pratiquants au sport
Parcours personnalisés. La salle de sport n’est pas réservée aux athlètes ! C’est pour attirer les sédentaires que la mutuelle MGEN a baptisé la sienne “salle sport-santé”. Les 300 volontaires (sur 600 collaborateurs) ont eu droit à un entretien individuel d’une heure avec un coach sportif pour évaluer leur potentiel de performance.
A chacun son programme. Fragilisé par des petits accidents, Benoît Coquille, responsable des relations presse, vient pour tonifier son dos : “A chaque séance, j’ai une feuille de route avec des exercices précis et je ne vais pas au-delà. Le coach me corrige si nécessaire.” Encourageant : “Les salariés ont amélioré de 60% leurs performances dans les exercices pour les abdos et les lombaires”, indique Roland Krzentowski, le médecin sportif qui pilote le programme.
Pour désinhiber les timides, Kamel Boucherikha, ostéopathe et formateur, préfère parler d’activité physique raisonnée plutôt que de sport. Chez Cornoualia, un groupement de 170 entreprises bretonnes, il propose à une soixantaine de volontaires des parcours d’hygiène de vie : étirements, relaxation, nutrition. Et convainc les réfractaires grâce au bouche-à-oreille.
Et si on courait pour les autres ?
Se dépasser est plus gratifiant quand on le fait au profit d’une cause. Lors de la Foulée des établissements orchestrée par Clarins, chaque équipe soutient association de son choix, liée au handicap. “L’événement est aussi l’occasion de lever les préjugés sur la performance au travail des handicapés”, ajoute Lionel Comole, qui préside par ailleurs la Fondation Arthritis. Comme lors de la première édition où les salariés de l’entreprise ont concouru contre l’équipe olympique Handisport… qui a gagné haut la main !
12 %
Gain de productivité des salariés pratiquant 30 min d’activité physique par jour par rapport à leurs collègues sédentaires. (Etude Santé Canada.)
7 à 9 %
Economies réalisées par l’entreprise sur les frais de santé annuels d’un employé si celui-ci a une activité physique régulière. (Source : Goodwill.)
3 ans
d’espérance de vie. C’est ce que gagne en moyenne un adepte régulier d’une activité physique. Et il repousse de six ans l’âge où il deviendra dépendant. (Source: Goodwill.)