Le Bénin reprend ses exportations d’ananas en direction de l’Europe, après avoir adopté la technologie nucléaire pour vérifier la qualité de sa production.
Nous reprenons ci-dessous un article de Bilal Tairou publié sur le site Sci Dev Net(link is external) .
Le gouvernement béninois avait suspendu les exportations d’ananas le 15 décembre 2016, après que des contrôles à différents points d’entrée en Europe eurent révélé la présence d’une concentration d’éthéphon supérieure au volume autorisé.
L’éthéphon est une substance chimique qui permet de réguler la croissance de certains fruits et légumes.
Pour répondre aux exigences de leurs clients européens qui préfèrent des ananas à peau jaune, les producteurs béninois ont dû recourir à cet organophosphoré, autorisé en agriculture. Toutefois, soucieux de donner coûte que coûte cette coloration jaune à leurs fruits, certains agriculteurs en ont abusé.
“Il y en avait qui, en saison des pluies, multipliaient délibérément le nombre d’applications du produit, parce qu’ils se disaient qu’il a été lessivé par les précipitations, alors que des procédures rigoureuses doivent être respectées“, explique Kinnou Kisito Chabi Sika, directeur général du Laboratoire central de contrôle de la sécurité sanitaire des aliments (LCSSA).
Le défaut d’application des bonnes pratiques agricoles a conduit à la découverte de résidus d’éthéphon dans les ananas exportés.
“Le processus n’était pas bien maîtrisé de la plupart des gens qui produisent l’ananas“, explique encore Kinnou Kisito Chabi Sika, qui précise qu’en matière d’éthéphon, “la limite permise est 2 ppm (Parties Par Millions) et il y a eu des cas de concentration de 4, voire 5 ppm dans la production“.
Afin de régler ce problème et d’opérer un contrôle plus rigoureux des ananas produits, le Bénin s’est doté d’une technologie de pointe : la chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse, en langage technique la LC MS/MS.
Cette technologie, qui tire son fonctionnement de principes nucléaires, “utilise des sources radioactives et permet d’effectuer un contrôle au niveau national pour s’assurer que les produits destinés à l’exportation contiennent une dose d’éthéphon inférieure à la limite maximale autorisée”, explique encore Kinnou Kisito Chabi Sika.
Les analyses au niveau du LCSSA se font sur des échantillons que prélèvent dans les plantations, les inspecteurs sanitaires de l’Agence béninoise de la sécurité sanitaire des aliments (ABSSA), dont le LCSSA est le bras opérationnel.
Laurent Allognon, inspecteur sanitaire de l’ABSSA précise que “l’échantillonnage se fait huit jours après l’application de la solution d’éthrel et les résultats sont obtenus au niveau du laboratoire 24 heures plus tard.”
Lorsque les résultats de l’analyse sont bons, le producteur se voit délivrer un certificat sanitaire et a autorisation de couper, conditionner et exporter son ananas.
Dans le cas contraire, les ananas ayant des résidus d’éthéphon dépassant les limites autorisées sont gérés par l’ABSSA.
Quoi qu’il en soit, l’acquisition de cette technologie est fortement saluée par les opérateurs de la filière, comme en témoigne le président de l’Association nationale des producteurs et exportateurs d’ananas du Bénin, Jean-Xavier Satola : “le Bénin sera désormais sur le marché avec des ananas plaqués or, qui respecteront la limite maximale de résidus de pesticides.”
L’acquisition de cette nouvelle technologie et la mise en place de tout ce dispositif de contrôle ont été rendues possibles grâce à la collaboration de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) et de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation (FAO).
“L’AIEA et la FAO sont des institutions qui nous appuient en termes de renforcement des capacités“, indique Kinnou Kisito Chabi Sika, qui renchérit que cet appui se concrétise également à travers des projets de coopération et de création de réseaux de laboratoires spécialisés.
La filière béninoise de l’ananas exporte 2% de sa production annuelle vers l’Europe, mais ces 2% rapportent plus de devises que les 98% écoulés sur le marché local et sous-régional.
Ce qui au demeurant a interpellé les décideurs politiques et les a motivés à vouloir mieux contrôler et assainir la filière.
Le Bénin produit deux variétés d’ananas que sont la Cayenne lisse et le pain de sucre et sa production annuelle se situe entre 400 et 450.000 tonnes.
Avec commodafrica