CONAKRY- Quels sont les résultats attendus de la réunion du groupe consultatif pour le financement du plan national du développement économique et social proposé par le Gouvernement guinéen ? Malgré les critiques de l’opposition, Bakary Sylla, le Chef de cabinet du Ministère de l’Economie et des Finances reste optimiste. Selon lui, la pauvreté a reculé en Guinée. Avec Bakary Sylla, on a également abordé d’autres sujets liés à l’économie guinéenne.
AFRICAGUINEE.COM : Le Gouvernement guinéen organise à Paris les 16 et 17 novembre prochain une réunion du Groupe Consultatif pour le financement de son plan national du développement économique et social (PNDES). Quelle est selon vous l’opportunité d’organiser une telle rencontre en France ?
BAKARY SYLLA : Tout d’abord il faut savoir ce que c’est qu’un plan national de développement économique et social. C’est un support aux projets prioritaires dans lesquels le Gouvernement souhaite investir et mettre en œuvre. L’opportunité en étant direct, c’est d’avoir le financement pour réaliser ces projets d’utilité publique. Parfois ce sont des projets marchands, très souvent ce sont des projets d’infrastructures nécessaires à tout développement économique.
Quels sont les acteurs attendus à cette rencontre ?
Il faut savoir que la rencontre s’appelle une réunion du Groupe Consultatif sur le PNDES. Chaque groupe consultatif est unique. Pour la Guinée, il s’agit d’inviter un certain nombre de partenaires bi et multilatéraux mais aussi le secteur privé de bonne qualité. C’est-à-dire de bons investisseurs.
Quels sont les résultats attendus par le Gouvernement à cette réunion ?
Avant de parler du montant attendu, il faut parler de la structuration du PNDES, donc les projets. Ils sont structurés autour de trois cercles concentriques. Le premier noyau ce sont des projets à maturité très forte avec une étude de faisabilité, des projets bancables. Les projets qui sont autour sont des projets moyens aussi et d’autres à la fin sont des initiatives de projets.
Mais la réunion de Paris permettra principalement de lever des fonds auprès de ces partenaires et du secteur privé pour financer le noyau dur du PNDES. Si la Guinée arrive à atteindre un montant de 13 ou 15milliards de dollars ce serait un réel succès. Mais il faut savoir qu’un Groupe consultatif n’est qu’un point dans la recherche des fonds. C’est un évènement mais il y a un avant et un après. Un avant, il y a des négociations, pendant, il y a des déclarations qui peuvent continuer jusqu’en 2020 normalement.
Pensez-vous que la Guinée soit suffisamment outillée pour convaincre les bailleurs de fonds d’investir des fonds aussi faramineux ici ?
La Guinée a démontré son potentiel de croissance. Il n’y a qu’à voir la trajectoire de croissance empruntée depuis 2015. En 2015 on était à 3.5% de croissance du PIB (produit intérieur brut), 2016 6.6%, le projeté de 2017, 6.7% et nous allons tendre avec la mise en œuvre des projets vers un taux de croissance 10.2% à peu près à l’horizon 2020.
Les recettes de notre économie sont beaucoup plus basées sur les Mines, est-ce d’autres secteurs pourraient être développés au terme de cette réunion du Groupe Consultatif ?
Sans anticiper sur le déroulement de la réunion du groupe consultatif à Paris, il y a un certain nombre de focus. Ce sont des focus comme l’énergie, l’agriculture et le secteur privé. Le focus agriculture a pour but d’attirer des investissements dans le secteur. On sait que la Guinée peut activer le levier de l’Agriculture qui emploie beaucoup de monde pour permettre de diversifier son économie. Il y a aussi l’industrie, les PME, l’hôtellerie (…), le but aussi du PNDES c’est de ne pas se reposer sur une économie de rente, mais une économie diversifiée avec une contribution majeure de tout ce qui est agro-industrie.
La Guinée vient d’être classée parmi les pays les plus attractifs en termes d’investissement. Est-ce un atout de plus pour convaincre les investisseurs lors de cette réunion ?
Qu’est-ce qui a concouru selon vous à tous ces résultats ?
Il y a eu beaucoup de réformes. Ce n’est pas encore visible sur le terrain mais c’est ce que les investisseurs regardent. Il y a par exemple l’instauration d’un tribunal de commerce qui n’est pas encore opérationnel mais qui va l’être. Cela rassure l’investisseur qui va prendre un risque pour investir en Guinée et qui sait qu’en cas de litiges, il peut se tourner vers ce tribunal. Il y a aussi la Loi PPP sur les investissements qui protège complètement les investisseurs. Il y aura une unité qui sera opérationnelle très bientôt pour se consacrer essentiellement à ce type de financement de l’économie. Donc, il y a un cadre propice pour l’investisseur qui prend des risques qu’il faut bien sûr mitiger, mais qui rassure.
Quand est-ce on pourrait ressentir l’impact de toutes ces réformes sur le panier de la ménagère ?
On peut imaginer les réformes dans l’économie comme dans l’agriculture, il y a le temps de la semence et le temps de la récolte. L’ananas par exemple c’est 14 mois entre la semence et la récolte. Ce temps-là est incompressible. La croissance peut paraître comme une notion abstraite pour les citoyens lambda, mais elle permet de grossir le gâteau qui est le PIB. Alors je vous repose la question. Préférez-vous qu’on distribue un petit gâteau ou un gros gâteau ?
Le curseur est là, c’est la décision politique. La croissance économique c’est la vitesse de grossissement du gâteau. Est-ce que le gâteau a suffisamment muri pour être distribué ou pas ? En tout état de cause, il faut redistribuer. On n’oublie pas cela parce qu’il y a des systèmes de filets sociaux, il y a des systèmes d’aide aux pauvres aussi. La pauvreté a reculé dans notre pays, ce n’est pas assez ni parfaitement perceptible, mais c’est une trajectoire à consolider et qu’il faut accélérer.
Le Gouvernement a ouvert cette semaine un forum international sur la gestion des finances publiques. Quels sont les résultats attendus ?
Ce forum qui a débuté jeudi est une plateforme d’échange de bonnes pratiques de ce qui se fait ailleurs. Puisque c’est un forum international avec des experts internationaux qui viennent de la Banque Mondiale, du FMI, des professeurs d’université, etc. Cela permet de sensibiliser le Gouvernement qui le sait déjà, sur les finances publiques notamment sur la dette. Pour se développer il faut s’endetter, mais encore faut-il que ce soit la bonne dette. La bonne dette c’est quand on s’endette pour investir dans des projets porteurs, mais pas dans le fonctionnement.
Est-ce que le gouvernement guinéen ne ferait pas mieux de gérer ce que nous avons à l’interne pour investir que de se tourner ailleurs dans un contexte où les bailleurs deviennent de plus en plus frileux ?
C’est un bon sujet, mais ce qu’on a en interne ne suffit pas. Puisque pour qu’on soit en mesure de s’autofinancer, il faut qu’il y ait des excédents budgétaires. Nous ne sommes pas en capacité, ça veut dire que nous dépensons un peu plus ce que nous recevons en recettes intérieures. Alors les appuis budgétaires ont vocation à ce que ça s’équilibre. Ce n’est pas avec ça qu’on se développe. Même le directeur Afrique de la Banque mondiale le disait avant-hier, la Banque Mondiale n’a jamais développé un pays, elle contribue à développer un pays.
Un mot de la fin ?
J’attends de ce groupe consultatif sur le PNDES qu’on lève le maximum de fonds auprès des partenaires et puis surtout là où il y aura la vraie modernité, c’est avec le secteur privé international. La perspective pour moi, c’est d’aller vers les marchés internationaux, lever des fonds comme l’ont fait d’autres pays tel que le Sénégal, le Burkina, la Côte d’Ivoire où c’est des milliards qu’on lève pour investir dans les infrastructures.
Monsieur Sylla merci.
Je vous en prie.
Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com