Une lettre ouverte dans Le Monde appelant à empêcher RT France de diffusion, a provoqué de vives critiques de la part de Moscou. En outre, la Fédération internationale de journalistes (FIJ) a fait savoir sa solidarité avec leurs confrères de RT.
Le 21 décembre, la Fédération internationale de journalistes (FIJ) a «exhorté» les autorités françaises à ignorer les appels à la révocation de la licence de RT France, alors qu’une tribune paraissait le jour même dans l’hebdomadaire Le Monde, signée par une dizaine de personnalités se présentant comme spécialistes de la Russie, et appelant à l’interdiction de la chaîne RT France.
«Nous exhortons les autorités françaises à ne pas accepter ces demandes. Nous appelons également des collègues de RT France à mener à bien leurs tâches d’information en accordant une grande attention aux aspects éthiques de la profession, afin de montrer que les accusations portées contre eux sont absurdes», a déclaré Philippe Leruth, président de la FIJ.
Alors que la tribune publiée dans l’hebdomadaire du soir assure que l’autorisation d’émettre accordée à RT France est «d’une extrême gravité car elle peut conduire au brouillage des esprits et à la désunion des Français», Philippe Leruth dénonce le risque d’«une censure cachée». Il souligne en outre que celle-ci «n’est pas basée sur des faits, mais sur le message général venant des Etats-Unis».
A peine lancée, déjà au cœur de la polémique
En outre, la chaîne télévisée n’a commencé à émettre dans l’Hexagone que le 18 décembre dernier. Elle n’a donc que trois jours d’existence : bien assez, selon les auteurs de la tribune, qui souhaitent empêcher les journalistes de RT France de présenter leur travail aux Français.
De son côté, la présidente de RT France, Xenia Fedorova, n’a pas manqué de réagir :
Il est surprenant que les médias français soient si prompts à insulter l’intelligence et la capacité de jugement de leurs propres compatriotes, visiblement si vulnérables au “brouillage des esprits” et à la “désunion”, selon les auteurs de la tribune. Voilà qui illustre parfaitement pourquoi les Français désirent tant entendre de nouvelles voix dans les médias d’informations.
Pour la chef de RT France, en outre, le fait que la tribune soit publiée dans le quotidien Le Monde ne doit rien au hasard.
Autre réaction indignée : celle de Jean-Robert Raviot, professeur de civilisation russe à l’université Paris-Ouest Nanterre. Sur Facebook, l’universitaire déplore le manque de sérieux de la tribune, pointant du doigt, en particulier, le caractère politisé de ses auteurs. «Cette tribune est une tribune de militants qui avancent masqués», assure-t-il, assimilant ceux-ci à ce qu’il appelle la «gauche Pentagone», à savoir «un vaste et puissant secteur de l’élite intellectuelle, stratégique et médiatique française qui, de manière systématique, défend l’atlantisme intégral, la continuation de la vieille guerre froide et sa diabolisation permanente de la Russie par tous les moyens».
«Sous couvert de dénoncer la “menace russe” en “spécialistes”, ils servent la soupe des tenants de l’hégémonie contre le pluralisme», ajoute Jean-Robert Raviot.
Indignation du côté du Moscou
Du côté des autorités russes également, la tribune anti-RT n’est pas passée inaperçue. Pour la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova, la source d’inspiration des auteurs de la tribune ne fait aucun doute : «La provenance de ce signal est évidente : il provient directement de l’Etat français et du président. C’est une évidence.» Elle a rappelé que si les voix se multiplient pour tenter d’empêcher les journalistes de RT France de travailler librement en France, leur argument est lui unique. Il consiste à rappeler «la citation d’Emmanuel Macron à propos de la chaîne» à Versailes en mai dernier.
Plus tôt dans la journée, Vladimir Djabarov, Premier vice-président du Comité des affaires internationales du Conseil de la Fédération, avait prévenu que si le droit d’émettre était retiré à la chaîne RT France, les médias français en Russie «recevraient sans aucun doute une réponse – le même type de mesures que celles que nous avons prises contre les médias américains.» Début décembre, Moscou a classé neuf médias américains diffusant sur son territoire «agents de l’étranger», après que Washington a pris une mesure similaire contre des médias russes dont RT.
Avec rtfrance