De fantastiques opportunités d’affaires s’offrent aux jeunes diplômés africains dans le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire. C’est ce qui ressort en force du Forum africain des jeunes agripreneurs (dit AYA Forum) organisé à Ibadan, au Nigeria, les 25 et 26 avril 2017, qu’a initié et auquel a participé la Banque africaine de développement (BAD).
Toutefois, si l’investissement des jeunes Africains dans la production et les chaînes de valeur agricoles est souvent évoqué comme la voie idéale pour le développement en Afrique, dans la pratique, les gouvernements ne font pas les efforts nécessaires pour y parvenir, s’alarme Nteranya Sanginga, directeur général de l’Institut international d’agriculture tropicale (IITA), qui a son siège à Ibadan.
Des PDG sont également intervenus – Jibunoh Adim, président de Transcorp Group, au nom de son fondateur, le banquier nigérian Tony Elumelu ; Gbenga Shobo, directeur général adjoint de la First Bank Nigeria pour le compte de son président et patron de Honeywell Group, Oba Otudeko… –, ainsi que des professeurs et experts en agri-métiers pour souligner les liens étroits qui unissent l’agriculture, l’entreprise privée et l’emploi des jeunes. Les conférenciers se sont montrés unanimes : conjuguer agriculture commerce est à la clé de l’emploi des jeunes et de la création de richesses en Afrique. Une conviction fondée sur le fait que les jeunes africains représentent la majorité des 1,3 milliard d’habitants du continent, qui en outre recèle la plus grande superficie au monde de terres arables disponibles.
Pour aller de l’avant, l’Afrique doit donc revenir à la terre, ont conclu les participants. Ils étaient des centaines de jeunes entrepreneurs et d’experts à avoir fait le déplacement à Ibadan pour débattre des meilleurs façons de stimuler cette renaissance agricole.
Le Forum africain des jeunes agripreneurs a pour double objectif de faire connaître les histoires à succès d’entreprises agroalimentaires réparties sur le continent africain et de mettre en relation les agripreneurs avec des partenaires commerciaux et des partenaires au développement.
Dans un discours lu par Chiji Ojukwu, directeur de la BAD chargé de l’Agriculture et de l’Agro-industrie, le président de l’institution, Akinwumi Adesina, a exposé sa vision d’une Afrique atteignant l’autosuffisance alimentaire dans les dix ans dans certaines filières – riz, blé, poisson, huile de palme et manioc. À cette fin, la BAD a engagé plus d’un demi-milliard de dollars EU à ce jour, pour aider le Cameroun, le Soudan, la RDC et le Nigeria à mettre en œuvre leurs programmes respectifs ENABLE Youth.
Dès sa phase pilote, le programme ENABLE Youth pour l’agriculture africaine a démontré qu’en offrant un plus large accès au monde de l’entreprise agroalimentaire et un plus fort soutien institutionnel, les jeunes Africains, avec leur passion et leur énergie, peuvent devenir la force motrice de la transformation agricole en Afrique.
« Grâce à ENABLE Youth, plus de 300 000 entreprises seront créées et plus de 1,5 million d’emplois directs créés pour les jeunes et les moins jeunes », a déclaré Akinwumi Adesina. À ce jour, plus de 33 pays africains ont sollicité la BAD pour mettre en place des systèmes similaires. « Je suis heureux de constater que le programme ENABLE Youth est désormais une marque reconnue à travers le continent », a ajouté le président de la BAD.
Agroalimentaire en Afrique : le plein d’histoires à succès
Un débat sur l’entrepreneuriat agricole des jeunes, animé par un panel de quatre personnes, a été l’occasion de partager des expériences entrepreneuriales concrètes pour en faire des sources d’inspiration. Originaires de différents pays africains (Nigeria, Rwanda, Ouganda), les deux jeunes femmes et deux jeunes hommes qui composaient le panel ont démontré qu’ils ne devaient pas leur succès à des privilèges octroyés au démarrage de leur affaire ou à une enfance dorée, mais plutôt à leur sens de l’innovation et à leur détermination face aux écueils importants qui se sont dressés sur leur chemin.
Les gouvernements africains doivent-ils subventionner le financement des jeunes dans l’agriculture ? Cette question – entre autres – a opposé les jeunes agripreneurs présents en un débat animé, les tenants de chaque position y allant de leurs arguments.
Les agripreneurs ont eu l’occasion d’échanger avec l’assistance, de manière plus sereine, sur un éventail d’enjeux – innovation, évolution des mentalités, chaîne de valeurs, centres d’incubation, image de marque et emballage de produit –, ainsi que sur les spécificités de gestion d’une entreprise agroalimentaire et les défis qu’elles soulèvent.
La nécessité d’un renforcement des capacités pour transformer une petite entreprise agroalimentaire en une plus entreprise de plus grande ampleur a également canalisé les débats. Jeune avocat formé à Harvard et résidant en Afrique du Sud, Michael Sudarkasa a ainsi présenté l’initiative de renforcement des capacités qu’il a développée avec sa société Africa Business Group, pour aider les jeunes agripreneurs à faire grandir leur start-up. Et d’expliquer que, grâce à l’utilisation des technologies appropriées et avec un minimum de compétences en mobilisation de ressources, les petites entreprises agroalimentaires peuvent considérablement augmenter leurs capacités. Intitulée « Plate-forme mondiale pour l’accélération de l’agroalimentaire en Afrique » (GAAAP par sigle en anglais), cette initiative se concentre sur l’agriculture et les énergies renouvelables.
Une autre présentation de grand intérêt a été faite par Jennie van der Mheen-Sluijer, de la Wageningen University & Research (WUR) basée aux Pays-Bas. Elle a souligné que les Pays-Bas, un tout petit pays au plan géographique, sont le deuxième exportateur de produits agroalimentaires dans le monde, derrière les États-Unis d’Amérique. Le secret de cette réussite étonnante, a-t-elle expliqué, tient à la place cruciale donnée à la recherche et au savoir pour catalyser la croissance du secteur privé, en même temps qu’un travail de fonds est conduit avec les décideurs pour créer un environnement propice. Madame van der Mheen-Sluijer a terminé son propos en soulignant l’importance des partenariats, ajoutant que la WUR a beaucoup à offrir aux jeunes agripreneurs africains en matière d’éducation entrepreneuriale.
La deuxième journée de la conférence fut consacrée au financement des entreprises agroalimentaires et à une compétition entre jeunes agripreneurs (AgriPitch). Les trois lauréats de cette joute seront invités aux Assemblées annuelles 2017 de la BAD, prévues en mai.
Le Forum africain des jeunes agripreneurs englobe le Forum AYA à proprement parler, une conférence-atelier de deux jours autour de débats thématiques et la présentation d’aventures entrepreneuriales à succès, ainsi qu’un concours dédié à l’entrepreneuriat agroalimentaire, Agri-, outre des événements parallèles dont un programme de formation dédié aux mentors et incubateurs. Le Forum AYA est organisé par la BAD, en coopération avec l’IITA, le Réseau africain d’incubateurs pour l’agroalimentaire (AAIN) et le Centre technique pour la coopération agricole et rurale ACP-UE (CTA).
Source : BAD