Quand les forces régaliennes démissionnent dans la sécurisation des biens et des personnes dans une ville, les habitants se constituent en milices pour se défendre. Tel est le cas à Abobo où une milice de jeunes du quartiers s’est constituée, baptisée Cellule anti-microbes Abobo.
Sous-quartier Sagbé RAN QG il est un peu plus de de 23h, la cellule anti-microbes composée de jeunes volontaires, répondent à l’appel de leur hiérarchie avant leur redéploiement dans le quartier.
Vêtus de tee-shirt noirs et de cagoules, tous sont présents au rassemblement. « Ce qui a motivé la sécurité de notre quartier, c’est qu’on était dans l’insécurité. Chaque nuit, il y avait des attaques dans plusieurs domiciles ici. Nous nous retrouvons en danger quand nous dormons. Donc, nous avons été révoltés. Il est vrai que les forces de l’ordre travaillent mais, nous devons aussi les aider. Parce que dans les quartiers où les véhicules des forces de l’ordre ne peuvent pas avoir accès, ce n’est pas facile pour eux. Ils viennent ils font ce qu’ils peuvent faire et ils ne peuvent pas tout voir », dit le responsable de patrouille.
Rassurés de la présence de tous ses éléments, le responsable chargé de la discipline donne les consignes d’usage :« Nous ne sommes ni policiers, ni gendarmes, ni militaires. Si vous voyez que nous portons des cagoules, c’est pour ne pas se faire repérer par les ennemis. Toutes les consignes sont respectées quand nous allons partir, nous ne sommes pas là pour tuer ».
Je suis prêt à me sacrifier pour mes parents, pour qu’ils puissent dormir
Leur mission, combattre les microbes dans les quartiers. Après les consignes les jeunes volontaires de la cellule anti-microbes s’engagent à respecter les ordres de leur hiérarchie.
« Je suis prêt à me sacrifier pour mes parents, pour qu’ils puissent dormir », affirme ce jeune volontaire. Il est 24h direction les ruelles du quartier munis de machettes, de couteaux, de haches de gourdins et de bien d’autres matériels de défense. Dans la patrouille, des personnes sont interpellées, interrogées et accompagnées à leur destination respective.
Ces patrouilles selon les responsables de la cellule anti-microbes permettent de vérifier la présence des éléments sur le terrain. Certains sont camouflés dans des baraques, sous des appâtâmes, d’autres assis en plein air ou encore perchés sur des arbres. Amés de bravoure et de volonté, ils sont déterminés à mettre un terme à ce phénomène.
« Il y a eu trop d’agressions ici. Des portes étaient cassées, des gens étaient blessés, nous voulons mettre fin à tout cela », déclare cet autre jeune volontaire. Habitations sans portails, maisons inachevées, cours ouvertes, lisières de forêts, sont visitées par la patrouille.
Il est 1h du matin, certains habitants sont encore éveillés, ils sont rassurés par les hommes de la cellule anti-microbes. Voyant un téléphone déposé sur une table, le responsable de patrouille demande à l’homme de la cour pour quoi il ne dissimule pas, celui-ci répond qu’ils n’ont plus peur depuis que le quartier est surveillé.
Après une heure de patrouille, 2h 15mn du matin, une alerte. Les hommes de la patrouille se dirigent sur les lieux. Dans leurs mailles, un jeune homme de 16 ans pris en flagrant délit de cambriolage. « Nous avons appréhendé un individu, qui a essayé de défoncer ce magasin pleins d’objets divers dont le propriétaires n’est pas présent. Nous allons le remettre aux forces de l’ordre », lance le responsable de sécurité.
Je ne suis pas un voleur, c’est la pauvreté qui m’a poussé à le faire
Interrogé le jeune homme passe aux aveux : « Je ne suis pas un voleur, c’est la pauvreté qui m’a poussé à le faire. Je le reconnais, j’avais prévu voler tout seul ». Le jeune cambrioleur sera remis au CCDO (Centre de coordination des décisions opérationnelles) en poste à Abobo. Quelques minutes plus tard, dans les filets du groupe de la cellule anti-microbes, deux autres jeunes plus âgés. Plusieurs objets volés. Une moto, une mini-chaîne, des bouteilles de gaz et de bien d’autres objets.
« En réalité, c’est mon voisin qui est allé en voyage et s’est en son absence que nous avons fracturé sa porte, nous avons pris sa moto pour la revendre à Adjamé », avoue ce jeune accusé de vol. Des voleurs qui seront conduits par les éléments du 21è arrondissement au poste de police. Trente minutes après le départ des policiers du 21 è arrondissement, un enfant « microbe » de 14 ans est pris par un autre groupe de la cellule anti-microbes. Dans sa main, de la drogue, des excitants et une machette bien aiguisée.
« LA PRÉSENCE DE LA CELLULE ANTI-MICROBES DANS LES RUES ET RUELLES DU SOUS-QUARTIER SAGBÉ RAN QG, EST SALUÉE PAR DES OPÉRATEURS ÉCONOMIQUES EXERÇANT DANS LA NUIT ET PAR LES POPULATIONS DE CE QUARTIER »
« Quand ils ont mis la main sur moi, ils ont vu une rivotine et une machette en ma possession. Je fume le cannabis, mais je ne prends pas les comprimés, la machette allait me servir à agresser. Avec mon groupe nous avons décidé d’aller agresser des gens dans le quartier Belleville », s’est-il justifié.
La présence de la cellule anti-microbes dans les rues et ruelles du sous-quartier Sagbé RAN QG, est saluée par des opérateurs économiques exerçant dans la nuit et par les populations de ce quartier. Comme le confirme le boutiquier Haidara Bah « Avant, il y avait beaucoup de choses qui se passaient mais Dieu merci maintenant tout va bien ». Même son de cloche pour Baba Yéo chef du sous-quartier Sagbé RAN QG « J’ai presque fait deux ans dans le quartier, nous ne pouvons pas dormir la nuit. Cette année, il y a deux personnes qui ont été tuées chez elles à la maison. A chaque fois nous appelons la police mais personne ne vient. Nous sommes très contents de ces jeunes qui nous surveillent qui nous permettent de dormir tranquilles, nous nos femmes et nos enfants ».
Encouragés par la population, ces jeunes volontaires de la cellule anti-microbes du sous-quartier Sagbé RAN QG entendent lutter durablement contre les contre les enfants « microbes », une action qui pourrait ainsi mettre un terme à ce phénomène.
Avec ivoiresoir