SOLIDARITE – Une jeune étudiante de Sciences Po vient de lancer “Règles élementaires”, pour collecter des produits intimes pour les femmes sans-abri, qui en manquent cruellement.
Être à la rue, c’est dur. Et être une femme à la rue, c’est aussi devoir se coltiner, tous les mois, des règles. Et dans ces cas-là, se procurer des serviettes hygiéniques, des tampons, des produits d’hygiène intime de base, c’est souvent souvent impossible. Trop cher. Alors les femmes bricolent, comme elles peuvent.
“Pour les femmes à la rue, avoir ses règles c’est gore et trash”, explique Tara Heuzé, jeune étudiante de Sciences Po Paris. “Elles utilisent du papier toilette, des bouts de tissus, ou rien du tout. Souvent, elles se cachent, anéanties, pendant ce qui est un quart de leur quotidien pendant des années.” Cette réalité est trop souvent oubliée : la rue, ce n’est pas que dormir dehors et avoir faim. C’est aussi toutes les contraintes du corps.
Le Samu social la soutient
S’il existe en effet déjà des collectes de produits non périssables pour la banque alimentaire, le sujet des tampons ou serviettes hygiéniques est peu ou pas évoqué. Pas très “sexy” sans doute. Et donc difficile à “vendre” auprès du grand public du point de vue des associations. “C’est fou”, réagit Tara. “Ça existe déjà en Angleterre, au Brésil, aux Philippines… En France, on est sans doute encore trop conservateur sur ce genre de sujet.”
La jeune fille s’est donc rapprochée du Samu social, qui a accueilli 30.000 sans abri dans ses structures en 2014. Dont la moitié de femmes avec enfants. Le Samu social la soutient. Tara lance son projet, avec l’association de son école Paris solidaires, qui apporte sa logistique. Mercredi et jeudi dernier, une première collecte a été lancée dans les locaux de la rue Saint-Guillaume. Une autre aura lieu mercredi 2 décembre. Les colis peuvent être envoyés directement au Samu social (à l’attention de Lolita Dias, 59, rue Ledru-Rollin 94 200 Ivry-sur-Seine). Chacun est invité à venir apporter sa contribution.
Travail d’éducation
Alors d’accord, le sujet ne met pas encore tout le monde très à l’aise : “C’est rigolo : même si les gens participent beaucoup, ça se fait en toute discrétion : on voit des élèves venir déposer des colis, et repartir presque en courant.” Il n’’empêche, la prise de conscience est là : “Au début, les garçons disaient : ‘Ah, c’est dégueu, on ne veut pas entendre parler de ça'”, note Tara. “Mais ils sont venus aider à la collecte, et beaucoup sont venus déposer des choses, souvent accompagnés de leur copine ! D’autres posent des questions, demandent ce qu’il faut acheter, combien, comment ça marche. Il y a un vrai travail d’éducation et de sensibilisation.”
Et pour l’avenir, Tara fourmille de pistes afin de pérenniser cette quête. “On voudrait profiter de l’effet d’aubaine, du fait que le sujet intéresse les gens”, indique-t-elle. Elle est ainsi en contact avec un fabricant de coupes menstruelles, qui propose des dons. “Cela pourrait convenir à des femmes mal logées, qui ont un accès à un point d’eau pour pouvoir stériliser leur coupe.” Tara planche aussi sur l’installation de “boîtes à dons”, à installer dans d’autres universités, ou entreprises. Ou encore de contacter les fabricants de tampons ou les supermarchés pour donner leurs invendus ou leurs produits abîmés. Bref, Tara est lancée, ça ne va pas être facile de l’arrêter.
avec metronews