Le groupe français, détenteur des marques Peugeot et Citroën, vient de présenter un nouveau pick-up en Tunisie. Et prévoit de lancer un nouveau modèle par an en Afrique. Jean-Christophe Quémard Directeur de la zone Afrique et Moyen-Orient de PSA répond à nos questions.
Les 15 et 16 septembre, le patron de la zone Afrique et Moyen-Orient de PSA était dans la station balnéaire tunisienne de Hammamet, accompagné par Jean-Philippe Imparato, directeur général de la marque Peugeot, pour les essais devant la presse du nouveau pick-up de la marque au lion. L’occasion pour le dirigeant de revenir sur les plans du groupe français sur le continent : y renouveler sa marque et y assembler des voitures.
Jeune Afrique : Pourquoi lancer le nouveau pick-up de Peugeot à Hammamet, en Tunisie ?
Jean Christophe Quémard : Parce que PSA a conçu, avec ce pick-up, un produit destiné spécifiquement aux marchés du Maghreb et d’Afrique subsaharienne francophone, où Peugeot bénéficie d’une excellente image. Nous voulions donc lancer ce véhicule non pas au Salon de l’automobile de Francfort, mais ici, en Tunisie, sur le continent, d’autant qu’il s’accompagne d’un projet industriel d’assemblage local.
Ce type de véhicule était-il prioritaire pour PSA ?
Cela faisait trop longtemps que nous ne disposions plus de modèle sur le segment des pick-up double cabine, élément crucial en Afrique, où il représente environ 10 % du marché. Nous avons désormais un produit légitime, disponible en 4×4 et en 4×2, que nous positionnons comme l’héritier des pick-up bâchés 403, 404 et 504, dont des volumes impressionnants se sont vendus par le passé sur le continent. Mais le pick-up Peugeot n’est que le premier produit d’une série d’autres modèles à venir. Nous comptons en lancer un nouveau par an pour répondre aux besoins spécifiques des automobilistes de la région Afrique et Moyen-Orient, qui représente environ 150 000 véhicules en dehors de l’Iran, notre premier marché [350 000 pièces vendues].
Ce pick-up est basé sur un modèle qui a fait ses preuves en Chine, mais nous en avons fait un produit PSA
Mais cette voiture est issue d’un modèle de votre partenaire et actionnaire chinois Dongfeng, qui l’avait lui-même tiré d’un modèle Nissan… Peut-on vraiment parler d’un produit Peugeot ?
Ce pick-up est basé sur un modèle qui a fait ses preuves en Chine, mais nous en avons fait un produit PSA que nous assumons. Il a nécessité deux années de développement par nos ingénieurs pour répondre aux exigences de nos clients sur le continent. Cette adaptation était clairement pour nous une possibilité économique : pour amortir le coût d’une voiture, il faut nécessairement des volumes, qui plus est pour une motorisation en 4×4. Cette stratégie nous permet de revenir plus vite sur le segment du pick-up en Afrique, pour un investissement raisonnable en recherche et développement.
Nous sommes conscients que personne ne nous attend, mais nous serons compétitifs en matière de prix face à des produits comme le pick-up D-Max d’Isuzu – le seul véhicule assemblé actuellement en Tunisie –, mais aussi le Mitsubishi L200 et le Tata Xenon. Il ne s’agit pas d’un produit truffé de nouvelles technologies pour l’Europe ou les États-Unis, mais d’un véhicule alliant robustesse, simplicité et polyvalence, avec climatisation en série, spécifiquement destiné à la vente sur le continent.
Nous implanterons une usine d’assemblage dans un pays uniquement si un modèle économique se dégage
Avec votre partenaire tunisien, vous implantez une usine d’assemblage de taille modeste, prévue dans la banlieue de Tunis, à l’image de vos installations au Nigeria, en Éthiopie et au Kenya. Ce modèle industriel est-il rentable ?
Sur le continent, nous sommes prêts à investir dans des usines sous deux formes. Premièrement, si la compétitivité du secteur industriel automobile du pays est telle qu’il est possible d’y produire de bout en bout et en masse des voitures au standard mondial, nous pouvons décider d’y implanter une usine complète, des opérations d’emboutissage des pièces métalliques jusqu’au montage des pneus : ce sera le cas de notre future usine de Kenitra, au Maroc.
Seconde possibilité : assembler localement dans de petites usines si la situation s’inscrit dans un contexte de barrières douanières ou d’importants quotas à l’importation. C’est cette dernière stratégie que nous suivons au Nigeria et en Éthiopie, où nous sommes les premiers producteurs de voitures, même s’il s’agit de volumes modestes, de l’ordre d’un millier de véhicules par an seulement.
Les gouvernements des pays africains se protègent de plus en plus des importations. Ils veulent éviter les sorties de devises et souhaitent s’industrialiser. Il y a une fermeture des marchés. Pour pallier cette situation, les usines d’assemblage de petite taille vont donc nécessairement se multiplier sur le continent, les constructeurs n’ont guère le choix. PSA est prêt à investir dans ces usines d’assemblage avec ses partenaires locaux, mais nous ne sommes pas des philanthropes. Nous implanterons une usine d’assemblage dans un pays uniquement si un modèle économique se dégage.
Une usine pour 2018
C’est la Stafim, le distributeur tunisien historique de Peugeot- depuis quatre vingt-sept ans ! – qui va mener le projet de l’usine d’assemblage. Avec un investissement de 1.4 millions d’euros, sa mise en service est prévue pour la fin de juin 2018. Elle doit produire 1200 pick-up Peugeot en 2018, puis de 2000 à 4000 véhicules par an selon la demande, principalement pour le marché tunisien, dans un premier temps.
AVEC JEUNEAFRIQUE