Alors que le gouvernement ouvre le dossier de la réforme de l’assurance chômage, Pierre Gattaz s’est dit favorable à un contrôle accru des chômeurs. Ces derniers pourraient devoir rendre compte quotidiennement de leurs recherches. Une méthode dont l’efficacité est discutable.
D’un côté, des entreprises qui ont des postes vacants. De l’autre, un nombre de chômeurs qui reste trop élevé. Pour Pierre Gattaz, répondre à ces deux problématiques est simple: il faut un suivi plus régulier des chômeurs afin de s’assurer qu’ils mettent tout en œuvre pour trouver un emploi. Mardi soir, après une entrevue avec Édouard Philippe autour de la réforme de l’assurance chômage, le patron du Medef a suggéré de mettre en place un contrôle journalier, ou hebdomadaire, afin de s’assurer que les chômeurs cherchent bien un emploi et qu’ils ne refusent pas une proposition pour de mauvaises raisons. Ceux qui ne jouent pas le jeu verraient leurs indemnités coupées.
Le principe d’un renforcement accru des contrôles avait été avancé par Emmanuel Macron, lors de la campagne présidentielle. Le chômeur a des droits (à une indemnisation, un suivi, une formation…) mais aussi des devoirs, comme celui de chercher un travail, avait-il fait valoir. Il avait avancé l’idée de sanctionner les chômeurs qui refusent deux offres d’emploi.
Des dispositifs déjà en place
L’idée de contrôler et de sanctionner en cas de manquements n’a rien de nouveau. Toute personne qui s’inscrit auprès de Pôle Emploi doit signer un Projet Personnalisé d’Accès à l’Emploi (PPAE), qui définit le type d’emploi recherché (fonction, salaire, zone géographique…) mais aussi ce que les deux parties vont mettre en œuvre dans cette recherche d’emploi. Des offres sont proposées en fonction des critères définis dans le PPAE. Si le demandeur d’emploi refuse deux offres raisonnables, sans motif légitime, ou bien s’il ne suit pas les aides et formations proposées par Pôle Emploi, il s’expose à une radiation de 15 jours à 12 mois, voire définitive s’il y a répétition. Il y a deux ans, une équipe de 200 agents a été constituée pour réaliser environ 12.000 contrôles par mois.
Une méthode qui conduit à accepter des emplois précaires
Sans impact positif pour le moment. En analysant les différentes politiques en matière de retour à l’emploi en Europe, la Dares a pu mettre en avant que les contrôles et les sanctions ont des effets positifs sur le retour à l’emploi, mais que cela pousse les chômeurs vers des emplois plus précaires et moins rémunérés. Il est aussi plus productif d’avertir qu’un contrôle va avoir lieu que de sanctionner, car cela provoque une prise de conscience de la part du chômeur qui va mettre en œuvre des actions pour chercher un emploi.
Les chômeurs non indemnisés, des victimes collatérales
Un rapport de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) de mai 2017 met en lumière les effets négatifs d’un renforcement des contrôles et des sanctions. D’un point de vue financier déjà, parce que les coûts que cela entraîne ne seront pas forcément compensés par un allégement des allocations versées. En effet “tout indique que les chômeurs indemnisés se conforment très majoritairement à leurs obligations”, affirme l’OFCE. En revanche, le think tank pointe du doigt les effets collatéraux de ce durcissement des contrôles.
Pour avoir des preuves à fournir de leurs démarches, les chômeurs ont tendance à multiplier les candidatures où ils ont peu de chances d’être pris au lieu de se concentrer sur celles où ils ont le bon profil. Autre conséquence: poussés par la crainte de ne plus être indemnisés, ils acceptent le premier emploi qui vient, même s’il est en-deçà de leurs aspirations initiales. Cela conduit à évincer les chômeurs de longue durée qui par nature, sont plus éloignés de l’emploi. Mais ceux-ci n’étant plus indemnisés, ils sont naturellement moins dans le viseur.
Avec bfmbusiness