L’économie numérique connaît une croissance sans précédent sur le Continent, portée notamment par la dynamique dans le commerce électronique. C’est ce que relève un nouveau rapport de la CNUCED sur l’industrie du secteur et qui fait du Continent, le marché d’avenir de l’économie digitale. Des inégalités subsistent certes selon les pays, mais les perspectives s’annoncent prometteuses pour le l’Afrique à condition toutefois d’accompagner l’expansion de l’économie numérique à travers, notamment une législation appropriée ainsi que des infrastructures adaptées.
«L’avenir de l’économie digitale de demain se trouve en Afrique parce que sa culture est justement virtuelle en plus de son énorme potentiel», déclarait le PDG de Wari, Karim Mboje, qui intervenait le 29 septembre dernier dans un panel de la conférence internationale «Africa Convergence», organisée par la Tribune Afrique, le 29 septembre dernier à Casablanca. L’édition 2017 du rapport sur l’économie de l’information que vient de publier, ce 2 octobre à Genève, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) conforte la déclaration de l’homme d’affaires sénégalais. Sous le titre «Numérisation, commerce et développement», le département économique des Nations Unies fait cas de la dynamique soutenue que connaît l’économie numérique en Afrique.
Selon la CNUCED, la numérisation impacte de plus en plus les économies africaines de plusieurs manières. L’utilisation du Big Data ou traitement des données à grande échelle, l’intelligence artificielle (IA) et l’impression en trois dimensions (3D) en constituent des exemples. Dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne, le rapport relève que de vastes séries de données sur les caractéristiques du sol sont exploitées afin de déterminer les besoins en engrais, ce qui permet ainsi d’augmenter la productivité. En Tanzanie, des bouteilles en plastique recyclé sont utilisées pour fabriquer des prothèses 3D.
Autre exemple qui vient du Continent, la multinationale américaine IBM utilise l’une de ses solutions d’intelligence artificielle, Watson, pour relever certains défis du développement, notamment dans des domaines tels que l’agriculture, les soins de santé, l’éducation, l’énergie et l’eau grâce par exemple à l’initiative «Project Lucy».
L’Afrique est peut-être la région qui affiche la plus faible pénétration de l’Internet haut débit, mais possède également le taux de croissance le plus élevé en la matière, poursuit le document. La hausse des abonnements à l’Internet mobile a été ainsi accompagnée d’une augmentation des importations d’équipements de communication, notamment au Rwanda et en Zambie. «La numérisation affecte tous les aspects de la production et du commerce, des plus grandes entreprises aux plus petits commerçants, mais risque de conduire à une augmentation des inégalités de revenus», note le rapport qui fait cas d’une croissance certes soutenue de l’économie numérique en Afrique, mais à des vitesses différentes. Au Nigéria par exemple, 32 millions de personnes ont commencé à utiliser Internet entre 2012 et 2015, alors que dans d’autres pays africains, notamment la Centrafrique, l’Érythrée et le Sud-Soudan, les services de téléphonie mobile atteignent encore moins d’un tiers de la population.
Le commerce électronique en pleine expansion
C’est particulièrement le segment du commerce électronique qui enregistre une croissance assez fulgurante sur le Continent, ce qui s’explique notamment par l’explosion démographique, mais aussi une hausse de la pénétration de l’Internet mobile haut débit. A titre d’exemple, entre 2013 et 2015, le chiffre d’affaires du groupe Jumia est passé de 35 millions à 289 millions d’euros avec une présence dans 14 pays en matière d’approvisionnement et 7 pour la vente au détail, dont le Nigéria et l’Egypte, les pays les plus peuplés d’Afrique.
Cette embellie qui se profile pour le Continent n’occulte pas pour autant certaines faiblesses du secteur en Afrique, comme l’a mis en évidence la CNUCED. «De nombreux pays africains doivent mieux se préparer afin de profiter pleinement des opportunités et ainsi éviter les impacts négatifs de la numérisation», prévient à juste titre Shamika Sirimanne, directrice de la Division technologie et logistique de la CNUCED.
Le rapport montre ainsi que l’Afrique est en retard sur des aspects clés en matière de développement du commerce électronique : faible connectivité, absence de véritables solutions de paiement ou logistique commerciale défaillante en plus des problèmes liés à la sécurité numérique et à l’absence de cadres juridiques adaptés.
Moins de 40% des pays africains par exemple disposent actuellement d’une législation en matière de protection des données numériques. «La préparation à l’économie numérique nécessite une approche concertée, holistique, intersectorielle et multipartite de l’élaboration des politiques nationales»,plaide l’organisme onusien qui met également en cause l’absence sur le Continent de statistiques sur les aspects clés de l’économie numérique, ce qui entrave la capacité de formulation des politiques publiques appropriées.
Avec latribuneafrique