Aux États-Unis, posséder une arme est un droit constitutionnel âprement protégé par les lobbyistes de la NRA. Et pour cause, ce secteur pèse lourd dans l’économie américaine. Pour les profits, les taxes mais aussi les emplois qu’il génère.
Qu’ils soient démocrates ou républicains, les présidents américains ont tous un point commun: aucun n’a jamais réussi à limiter, si ce n’est interdire, la vente libre des armes sur le territoire américain. Même pas Barack Obama qui avait tenté de restreindre la vente de munitions et des fusils d’assaut en 2007 après la tuerie de Virginia Tech (33 morts). Son texte a été rejeté par le Sénat.
Les 20.000 personnes tuées chaque année par des armes à feu n’y changent rien. Pas plus que le coût des soins des blessés par balles pour les organismes de santé américains. Selon une étude très récente dévoilée par le quotidien britannique The Independent, ils représentent 2,8 milliards de dollars chaque année. Entre 2005 et 2014, 705.000 personnes ont été hospitalisées, ce qui a coûté au total 25 milliards de dollars sur la décennie. Pour les médecins, limiter la diffusion des armes permettrait de réduire “un fardeau financier qui pèse sur les services d’urgence et les hôpitaux”.
Le sujet est certes remis sur la table à chaque fois que les massacres suscitent l’effroi dans l’opinion publique. Comme c’est le cas aujourd’hui avec Las Vegas. Mais, in fine, posséder une arme reste un droit protégé par le deuxième amendement de la constitution. Car pour les représentants de la National Rifle Association (NRA), c’est le prix à payer pour défendre une liberté majeure des citoyens et… une économie florissante. Pire, à chaque fois que le débat public envisage une réglementation, les ventes bondissent un peu plus. Voici 8 chiffres clés qui illustrent le poids du commerce des armes dans l’économie des États-Unis.
13,5 milliards de dollars pour les fabricants
C’est le chiffre affaires annuel de fabricants d’armes et des munitions selon un rapport d’IbisWorld. Ce marché connait même une croissance annuelle qui oscille entre 12 et 17% selon les années. Et s’il a été dynamique au début des années 2000, c’est grâce à l’engagement militaire des États-Unis au Moyen-Orient. Avec retrait des troupes le business a reculé.
Mais depuis, les affaires sont reparties. Le segment des armes légères (pistolets, fusils semi-automatiques, mitraillettes et munitions) a grimpé au cours des cinq dernières années pour représenter 47,6% des revenus de l’industrie. Dans son rapport, IbisWorld indique que “cette croissance repose sur le marché civil en raison de l’anticipation de lois plus strictes sur le contrôle des armes à feu et des préoccupations de sécurité croissantes”.
3,1 milliards de dollars pour les commerçants
Dans son rapport, IbisWorld dévoile les revenus annuels des magasins d’armes à feu et de munitions. Leur commerce pèse 3,1 milliards de dollars et leur bénéfice atteint 478,4 millions de dollars.
Un poids économique total évalué à 51 milliards de dollars
Le marché ne se limite pas à la vente d’armes et de munitions. c’est un écosystème qui s’étend dans tous le pays avec les emplois et l’ensemble des services qui s’y rapportent. Pour 2016, la NFFS (the firmearms industry trade association) a évalué le poids économique total du business des armes à 51,3 milliards de dollars, soit 8,4 milliards de plus qu’en 2013.
Plus de 10 millions d’armes produites chaque année
Chaque année, l’ATF (Alcohol, Tobacco, Firearms), l’agence fédérale qui surveille la vente d’alcool, de tabac, d’armes à feu et d’explosifs, fournit la liste des armes produites sur le territoire américain par État et par catégorie.
En 2013, les industriels et les artisans ont fabriqué 4.441.726 pistolets (dont 1,7 million de 9 mm), 725.282 revolvers (dont 238.000 calibre 38 Special), 3.979.570 fusils, 1.203.072 fusils de chasse et 495.142 armes à feu diverses. L’ATF signale aussi que sur les 4,4 millions d’armes produites, moins de 400.000 ont été exportées, soit moins de 1%.
1 ménage américain sur 3 est armé
Dire qu’aux États-Unis tout le monde a une arme est exagéré. Mais, selon une étude de l’université de Chicago en 2015, 31% des ménages sont armés, soit près un sur trois. Pour les séduire, la NRA (National Rifle Association) organise chaque année un défilé de mode pour proposer des tenues adaptées au port d’armes. La dernière Fashion Weapon s’est tenue en août à Milwaukee.
Les Américains armés sont plus nombreux dans des régions rurales (55,9%). Les autres sont en ville (43,7%) et dans les banlieues (29%). Autre donnée intéressante, chaque possesseur d’arme en détient 5 en moyenne et 3% en ont plus de 25 à disposition.
301.123 emplois directs et indirects
Comme toutes les autres industries, les armes créent des emplois: 141.500 si on ne prend en compte que ceux qui travaillent directement pour ce secteur, mais si on prend en compte les emplois indirectes et les emplois induits, il fait vivre 301.123 personnes. Depuis le début de la décennie, le secteur ne cesse de recruter. Il est passé de 209.750 à 263.223 emplois en 2013. Comme le précise la NSSF, “ce sont de bons emplois, qui en moyenne sont rémunérés 50 423 par an”.
6,5 milliards de dollars de taxes
Pour l’administration américaine et les États, les armes procurent des recettes dont ils auraient du mal à se passer. En 2016, les taxes fédérales ont représenté 3.843 milliards de dollars et 2.695 pour les États (chiffres NSSF).
Lobby: 265 dollars pour les démocrates, 17 millions pour les républicains
Au vu du poids de cette économie, les lobbyistes sont aux aguets pour défendre la culture des armes. Selon des informations de 2016 publiées par le site OpenSecrets et rapportées par Le Monde, la NRA a dépensé 37 millions de dollars pour s’opposer aux élus démocrates qui lui sont défavorables et 17 millions pour soutenir les républicains qui la défendent.
Quant à la NRA, elle vit grâce aux cotisations de ses 5 millions de membres et des dons des plus motivés qu’ils soient membres ou non de cette association. Mais difficile de connaitre exactement le niveau de ses revenus?. Une chose est sûre: son budget annuel de 250 millions de dollars en fait le groupe d’influence le plus puissant du monde.
Avec bfmbusiness