La longévité politique d’Angela Merkel, 63 ans, réélue pour un quatrième mandat à la tête de l’Allemagne, devrait-elle remettre en cause le modèle de la limitation de la durée des mandats présidentiels, en Afrique ? Je donne tout de suite ma réponse : non !
Tandis que la France a déjà usé trois Présidents et en est à son quatrième, l’Allemagne ne connaît que Merkel depuis 2005. De quoi apporter opportunément de l’eau au moulin de malins révisionnistes d’Afrique, qui rêvent de s’éterniser au pouvoir, en évoquant, sans honte, ni gêne, le modèle allemand.
Et pourtant, il est interdit de s’y méprendre. L’Allemagne n’est ni le Togo, ni le Gabon, encore moins la Guinée et c’est du reste, une lapalissade. En Allemagne, Merkel n’a pas modifié les règles du jeu, au cours du jeu, pour se maintenir au pouvoir ; les règles étaient déjà établies par le peuple allemand, dans sa respectable souveraineté.
Je le dis avec beaucoup d’ironie, s’il suffisait de se flatter de son propre bilan, pour modifier les règles du jeu, en vue de perpétuer son règne, Barack Obama mériterait mille fois, de le faire, aux Etats-Unis.
Il est clair que les Allemands, comme le font les Français depuis la débâcle de Nicolas Sarkozy (signalons qu’en France, la limitation a été introduite en 2008) auraient dégagé Merkel, si elle se contentait, comme le font béatement certains de nos dirigeants africains ; de construire des ponts et des routes (acte de gouvernance banale au 21è siècle, tant les banques sont promptes à financer les grands travaux étatiques).
Sous Merkel, l’Allemagne ne s’est jamais autant bien portée sur les plans macro et microéconomiques, et surtout sur le chantier de l’emploi, véritable talon d’Achille des pouvoirs en Afrique.
Angela Merkel et nous
Je répète donc à l’envi : en Afrique, je milite pour la limitation des mandats présidentiels. Pour une raison toute simple tirée de notre jeune histoire démocratique et du passé (ou du passif) de certains dirigeants. Certains et ils sont malheureusement nombreux, nous ont montré qu’au bout de dix ans, un Président dans un pays où les institutions fonctionnent à l’humeur du Chef (ce qui n’est pas le cas dans les pays cités plus haut, où les pouvoirs sont séparés), ne dirige plus, il règne.
Il passe son temps à vouloir réparer des erreurs passées, tout en continuant à en commettre, dans le présent. Paternaliste, il protège les siens, tout en brimant les autres et prend désormais les décisions, à l’aune des intérêts de son clan et tant pis si ceux-ci ne croisent pas les intérêts du bas peuple.
Je respecte la démocratie allemande, mais je continue, en tant qu’Africain, de militer, pour la limitation des mandats présidentiels. Nos démocraties ne s’en porteraient que mieux !
Avec André Silver Konan