Paris, qui s’apprête à accueillir le président nigérian Muhammadu Buhari en visite officielle, du 14 au 16 septembre, coopère de plus en plus étroitement avec Abuja dans la lutte contre Boko Haram. Malgré les précédents démentis de l’armée française, ses chasseurs sont désormais bien autorisés à survoler le territoire du Nigeria.
Jusque-là, officiellement, les avions français s’arrêtaient aux frontières du Nigeria. À partir de leur base de N’Djamena, au Tchad, ils pouvaient certes apercevoir des combattants des islamistes de Boko Haram en survolant les pays frontaliers. Et lorsque, le 3 février, François Hollande avait déclaré que les avions français décollaient « pour surveiller le Sahel, la République centrafricaine ou le Nigeria […] en ce moment », des sources du ministère de la Défense avait démenti, affirmant que les chasseurs ne pénétraient pas dans l’espace aérien nigérian.
En réalité, cela fait plusieurs semaines que cette version est dépassée. Des avions français de reconnaissance survolent bien le nord du pays, pour recueillir des informations sur les terroriste de Boko Haram, alias l’État islamique en Afrique de l’ouest. « Il arrive même que les Nigérians nous demandent de survoler certaines zones spécifiques pour obtenir des renseignement», explique un diplomate français haut placé. Les silences et les démentis servaient, sans doute, à éviter d’écorner l’image d’une armée alliée malmenée par ses défaites face à au groupe jihadiste.
Vols de renseignement
Ces vols servent – pour le moment exclusivement – à recueillir du renseignement pour le Nigeria ainsi que les pays frontaliers également aux prises avec Boko Haram : le Niger, le Tchad, le Cameroun. Paris a d’ailleurs déployé une vingtaine de militaires français dédiés à la lutte contre la secte islamiste à Diffa, au Niger, près de la frontière avec le Nigeria, et forme des militaires nigérians à l’analyse des renseignements. Le « QG renseignement » de l’opération, situé à Abuja, comprend en outre des agents de liaison français, aux côtés de leurs homologues britanniques et américains.
Mais les images aériennes sont sans doute moins décisives aujourd’hui qu’il y a quelques mois. Boko Haram a en effet changé de stratégie : le groupe ne contrôle plus les villes de la région mais commandite des attentats meurtriers à partir de cellules autonomes réparties dans les zones peu peuplées de la région. En tout cas, le groupe a fait plus de 10 000 victimes depuis le début de l’année, un rythme au moins aussi soutenu qu’en 2014 – il avait alors fait 14 000 victimes.
Boko Haram devrait à nouveau être au cœur des discussions bilatérales au cours de la visite officielle du président nigérian Muhammadu Buhari à Paris, du lundi 14 au mercredi 16 septembre. La France veut en effet continuer de jouer un rôle de premier plan aux côtés de ce partenaire stratégique. Un Sommet avait déjà été organisé à l’Élysée en mai 2014, entre les chefs d’État du Nigeria (Goodluck Jonathan, à l’époque) et de ses quatre voisins, tous francophones. Un nouveau sommet sur la sécurité est prévu, dans les prochains mois, mais ni sa localisation ni sa date ne sont pour l’instant connus.
Avec Jeune Afrique