Le «néo-libéralisme» est devenu un terme fourre tout pour expliquer tous les maux du monde et idéologiser l’économie sans aucun discernement et sans fondement juste. C’est l’approche adoptée par l’activiste de la justice sociale Gillian Schutte dans son article: «L’Afrique a besoin d’une économie égalitaire », publié récemment dans « The Star ».
De plus l’économie n’est pas une simple idéologie, que l’on parle de néolibéralisme ou de capitalisme. Ce n’est pas un ensemble de théories ou d’opinions émotionnelles, mais un ensemble de faits dans un contexte donné sans jugements de valeur. Par exemple, il ne peut pas y avoir de débat sur l’importance des incitations dans le secteur privé. L’incitation est à la base de toute dynamique. La survie du secteur privé dépend entièrement de la satisfaction du consommateur.
Dans le secteur public c’est bien différent. La satisfaction du citoyen y est sans importance car le gouvernement ne peut être liquidé et vendu à ses débiteurs (la Grèce a encore un gouvernement indépendant et n’est pas une province allemande). Et, contrairement au secteur privé, ceux qui gèrent mal les institutions gouvernementales en assument rarement les conséquences. Les détracteurs pourraient dire que les consommateurs ne sont pas satisfaits des prestations de nombreuses entreprises privées, ce qui conduit à un autre principe de l’économie: la subjectivité de la valeur.
Quand un consommateur sacrifie un montant de son argent, de son travail ou de son temps en échange d’autre chose, cela signifie qu’il apprécie cette chose plus que le montant d’argent qu’il consacre à cette acquisition. Par conséquent, les consommateurs pourraient paraître très insatisfaits d’avoir un contrat d’assurance couteux, mais la subjectivité de la valeur indique qu’ils apprécient encore plus le service qu’ils reçoivent ce qui explique leur adhésion à ce service. Cependant, lorsque le gouvernement soutient les monopoles ou subventionne les entreprises non rentables, la satisfaction du consommateur est reléguée au second plan. Ces soutiens gaspillés sont financés grâce à l’argent de tous les contribuables, pauvres et riches.
Les tentatives d’idéologisation de l’économie dans l’épouvantail du «néolibéralisme» émanent de ceux qui, à défaut de stratégie économique contextualisée, se réfugient dans les discours purement idéologiques. Et cette idéologie peut prendre toute forme. En Afrique du Sud, par exemple, l’apartheid était l’idéologie avec laquelle les nationalistes essayaient de remplacer l’économie et aujourd’hui l’idéologie est souvent appelée «justice sociale». Au nom de la justice sociale – on peut discuter de ce qui est « social » et de ce qui est « juste ». Le mécanisme des prix a cédé la place au contrôle des prix, par lequel des signaux de marché incorrects ont été envoyés dans la chaîne de production entraînant la sous-estimation des prix avec les distorsions qui vont avec. Par exemple, le renchérissement du prix des données s’explique par le fait que certains opérateurs sont obligés par le gouvernement de fournir des données aux établissements d’enseignement à un prix réduit.
Une autre politique «économique» chargée d’idéologie est le salaire minimum. Cette rigidité du prix du travail empêche pourtant de nombreuses personnes à accéder à un emploi si le travail n’est pas rémunéré à un taux fixé par des idéologues de la justice sociale complètement déconnectés de la réalité du terrain.
Le Dr Chris Freiman, professeur associé de philosophie au Collège de William & Mary déclare justement: « Quelqu’un qui emploie un pauvre en-dessous du salaire minimum serait apparemment plus moralement répréhensible que celui qui n’offre rien au pauvre ». Si un employeur ne peut légalement rien offrir au pauvre, alors pourquoi est-il illégal de lui proposer quelque chose qui vaut mieux que rien? L’opinion de Schutte et Thomas Piketty sur le massacre de Marikana (Travailleurs d’une mine tués par la police lors d’une grève il y a 5 ans) à la suite de politiques «néolibérales» démontre leur volonté de remplacer l’économie par l’idéologie. Marikana était surement le seul exemple contemporain de conflit causé par «l’inégalité» que Piketty pourrait utiliser dans son monologue de plus de 900 pages. Cependant, il est incorrect d’analyser ce qui s’est passé dans Marikana sans tenir dûment compte du contexte réglementaire.
Le marché du travail de l’Afrique du Sud est fortement contrôlé par l’Etat, ce qui signifie que les bas salaires sont dus à de mauvais choix politiques. Le conflit malheureux qui s’est produit était plus le reflet d’une protestation contre l’injustice plutôt que contre l’idée académique de «l’inégalité». Avec le gouvernement de Zuma, déterminé à étrangler l’économie avec l’interventionnisme anti-marché, les Sud-Africains ne sont pas à l’abri d’un autre massacre Marikana.
Piketty et ses acolytes adorent citer l’exemple de Marikana qui va dans le sens du rêve marxiste selon laquelle les pauvres «se soulèveront» contre les riches. C’est une vision bien réductrice de cet événement. Il ne faudrait pas oublier que les pauvres qui aspirent à devenir plus riches ne réaliseront leur objectif que si les marchés libres les autorisent à avancer librement. La «transformation économique radicale» ne pourra se faire que si la main lourde de l’Etat cesse d’enserrer les pauvres dans un enclos sans porte de sortie. On ne peut pas décemment laisser pourrir une telle situation au nom d’idéologies figées. L’idéologie donne une direction mais il faut ensuite contextualiser les idées de manières à les rendre pertinente dans l’action, sur le terrain !
Avec libreafrique