La banque centrale de la République démocratique du Congo (RDC) vient de relever son taux directeur de 14 à 20%. C’est la deuxième fois cette année que la banque recours à cette politique destinée à juguler la volatilité du franc congolais et à contenir l’inflation qui a atteint un niveau assez critique. Toutefois, en l’absence d’un ajustement budgétaire de la part du gouvernement, la mesure risque de n’avoir qu’un effet assez limité au vu de la conjoncture économique que traverse le pays.
Après avoir un temps hésité, la Banque centrale de la République démocratique du Congo a finalement décidé, ce lundi 26 juin, de relever son taux directeur principal de 6 points pour le porter de 14 à 20%. C’est ce qu’indique un communiqué de l’institution et dans lequel elle justifie cette décision par la nécessité et l’urgence « de faire face à la tendance croissante du taux de change du franc congolais et de réduire le rythme des hausses des prix domestiques ».
La décision de la banque centrale était attendue depuis quelques temps par le marché en raison de la dépréciation contenue du franc congolais face au dollar ainsi qu’à l’inflation qui n’a cessé de grimper ces derniers mois. Elle reste toutefois assez surprenante puisqu’il y a quelques jours, le 12 juin dernier, la banque a décidé à l’issue de son conseil mensuel de politique monétaire, de maintenir le taux directeur inchangé à 14%, son niveau depuis janvier 2017. S’appuyant sur l’évolution de l’économie nationale ainsi que ses perspectives et la situation du marché financier, le comité a estimé qu’au regard de «la nature du choc actuel qui affecte l’économie nationale et dont les réponses idoines ne peuvent venir que de la mise en œuvre des mesures budgétaires et des réformes structurelles de la part du gouvernement, le comité de politique monétaire a décidé de maintenir inchangé le dispositif actuel des instruments de la politique monétaire ».
C’est donc au gouvernement que la banque centrale a renvoyé la balle avant de se raviser et renforcer encore sa politique monétaire à travers une nouvelle hausse de son taux directeur principal. Le 18 janvier dernier, ce dernier qui était de 7% a été relevé à 14%.
Ajustements budgétaires dans une conjoncture difficile
La RDC traverse depuis quelques temps une conjoncture économique assez difficile amplifiée par un contexte politique tendu. La baisse des cours des matières premières dont le pays est un grand exportateur s’est conjuguée à une baisse des investissements étrangers et a engendré une dépréciation du Franc congolais face aux devises étrangères. Dans un entretien qu’il a accordé, toujours ce lundi 26 juin, à la radio locale Okapi, le directeur général en charge de la politique monétaire et des opérations bancaires Jean-Louis Kayembe a expliqué cette dépréciation par la pénurie de devises, le difficile ajustement au niveau du trésor public et la spéculation. « Face aux causes qui sont à l’origine de cette dépréciation, il faudrait un ajustement budgétaire en interne. Il faut une discipline budgétaire, essayer dans la mesure du possible de travailler sur base, donc ne dépenser qu’à la hauteur de ressources qui sont mobilisés » a estimé Jean-Louis Kayembe qui a recommandé, à court et à moyen terme, « de chercher d’autres sources pour le trésor, d’autres sources d’appui budgétaire et d’appui à la balance de paiement parce que face à une pénurie de devises, la solution c’est au niveau de l’offre, réduire les importations ou bien augmenter l’offre de devises sur le marché ». En conclusion, le directeur des opérations et de la politique monétaire de la banque centrale congolaise a déclaré que « ce que l’on peut faire, c’est essayer d’obtenir les appuis à la balance de paiement, avoir des investissements directs étrangers, réaliser des entrées de devises sur le marché de manière à ce que l’on puisse conforter l’offre sur le marché » a rapporté sur son site Okapi FM.
D’après la même source, le Franc congolais (Fc) continue de se déprécier face au dollar américain qui se change actuellement à 1 535 Fc, alors qu’il y a quelques jours, il valait 1 400 Fc et 920 Fc il y a à peine un an. Le contexte a engendré une flambée de prix de certains produits de première nécessité sur les marchés locaux, ce qui accentue la pression sur le pouvoir d’achats des populations surtout les plus démunis.
Les perspectives tendent vers un renversement de la situation mais pas dans l’immédiat. Grace à un redressement des cours de certaines matières, la Banque centrale congolaise s’attend à ce que la croissance économique atteigne 3,1% cette année contre des prévisions initiales de 4,9% en début d’année. Il s’agit d’un léger bon cru même si l’inflation annuelle attendue risque de frôler les 33%, contre 25% en 2016.
Avec latribuneafrique