En dépit des mutineries et de la chute des prix du cacao, la Côte d’Ivoire est parvenue à lever l’équivalent de 1,75 milliard d’euros.
Malgré un contexte troublé, marqué par la forte baisse des prix du cacao et les récentes mutineries, la Côte d’Ivoire a prouvé le 8 juin que les investisseurs internationaux avaient toujoursune foi très solide dans ses perspectives. En levant 1,25 milliard de dollars sur seize ans et 625 millions d’euros sur huit ans, à des taux bas (6,25 % et 5,125 % respectivement), le pays ouest-africain a largement rempli ses objectifs, suscitant même une demande à hauteur de 10 milliards de dollars.
« Lors du roadshow de présentation, la très forte mobilisation du gouvernement a été très bien ressentie par les investisseurs internationaux, explique l’un d’entre eux, sous le couvert de l’anonymat. Le Premier ministre, notamment, a participé aux huit jours de présentation, de Paris à Boston en passant par Francfort, Munich, Londres et New York. »
Si la Côte d’Ivoire a connu un tel succès dans l’émission de ces eurobonds, c’est aussi en raison d’une situation internationale propice
Amadou Gon Coulibaly était accompagné des ministres Adama Koné (Économie et Finances), Abdourahmane Cissé (Budget), Kaba Nialé (Plan et Développement), Thierry Tanoh (Énergie, Pétrole et Développement des énergies renouvelables) et de Patrick Achi, secrétaire général de la présidence.
Une explication qui a convaincu
« Pendant toutes les présentations, la question des mutineries récentes à Bouaké a été récurrente, témoigne un membre de la délégation. Mais l’explication donnée a convaincu : il ne s’agit pas d’une crise politique mais d’un problème lié au paiement de primes aux soldats. Et la chute des cours du cacao semblait moins inquiéter la communauté financière. »
Si la Côte d’Ivoire a connu un tel succès dans l’émission de ces eurobonds, marchant dans les pas du Sénégal – qui a levé, le 16 mai, 1,1 milliard de dollars – et du Nigeria – 1,5 milliard de dollars en février et en mars –, c’est aussi en raison d’une situation internationale propice.
« Il y a eu un nouvel afflux d’argent dans les marchés émergents à partir du second semestre de 2016, et encore davantage en 2017, explique David Cowan, économiste Afrique à la banque américaine Citi. Le coût d’une émission de dette internationale est maintenant assez faible pour la plupart des pays africains. Les investisseurs en recherche de rendements ont tendance à minimiser les risques politiques et macroéconomiques. »
Indifférence aux risques
Ainsi, selon cet expert, s’il existe un risque politique considérable au Brésil, avec la mise en accusation de deux présidents, ou en Turquie, avec une tentative de coup d’État militaire, « les investisseurs semblent toujours heureux de prêter à ces pays ».
Le mouvement de contestation d’Al Hoceima, dans le Rif, n’a pas empêché les marchés financiers de favoriser la dette marocaine
L’Afrique bénéficie de la même relative indifférence aux risques. Le mouvement de contestation d’Al Hoceima, dans le Rif, n’a pas empêché les marchés financiers de favoriser la dette marocaine, rappelait il y a quelques jours Bloomberg.
« Les taux des dettes extérieures du Cameroun et du Gabon se sont maintenus au cours des six derniers mois malgré le contexte difficile au sein de la Cemac, décrypte Samir Gadio, analyste de la banque britannique Standard Chartered. Les nouvelles d’un éventuel programme d’aide du FMI en direction de ces pays ont été positivement perçues. Quant à la crise politique au Gabon, elle n’a aucun effet sur la dynamique du marché… »
Cependant, en raison d’un endettement qui a beaucoup augmenté ces dernières années, les pays africains faisant appel aux marchés obligataires en 2017 ne seront peut-être pas aussi nombreux qu’il y a quelques années.
Avec jeuneafrique