En attendant l’ouverture, le 1er octobre prochain, de la nouvelle campagne de commercialisation de la récolte principale du cacao 2017-2018, deux acteurs majeurs de la filière ivoirienne, le Groupement des Négociants Ivoiriens (GNI) et l’Ucoopexi-Nouvelle, ont interpellé Sangafowa Coulibaly, le ministre de l’Agriculture et du développement rural, sur des dysfonctionnements dans le système de messagerie, la plateforme permettant aux exportateurs d’acheter une partie de la récolte par anticipation.
Dans un courrier daté du 7 juin dernier, le GNI et l’Ucoopexi-Nouvelle réclament le rétablissement d’une messagerie internationale distincte de la messagerie nationale. La première, telle que prévue par la réforme de 2012, autorisait les multinationales du négoce basées hors du pays à acheter à l’avance des stocks de la récolte mise aux enchères par le Conseil Café Cacao (CCC), sans forcément passer par leurs filiales locales. Le CCC désignait ensuite des exportateurs ivoiriens pour exécuter ces contrats internationaux par la livraison des stocks à ces compagnies dénommées « acheteurs internationaux ».
Entre 2012 et 2015, ce système, appelé messagerie internationale, était fonctionnel à côté de la messagerie normale dédiée aux entreprises possédant un agrément d’exportateur en Côte d’Ivoire, comme les filiales locales des multinationales telles que Cargill BV, Olam et Barry Callebaut. Cependant, depuis la campagne 2015-2016, le CCC a changé le mécanisme en fusionnant les deux systèmes en un seul.
Priorité aux filiales des multinationales
Résultat : depuis cette initiative les maisons mères des multinationales n’achètent plus par anticipation de contrats internationaux, afin de ne pas concurrencer leurs filiales.
Ainsi, pour susciter la vente par anticipation de contrats internationaux – censés couvrir 20% de la récolte vendue par anticipation, soit 400 000 tonnes de fèves – le CCC est contraint chaque saison d’ouvrir au dernier moment des sessions spéciales de la messagerie internationale, desquelles sont exclues toutes les filiales locales des multinationales.
Mais ces sessions spéciales ne permettent que de vendre des quantités infimes de cacao. De plus, elles interviennent tard dans la campagne (à partir d’octobre), ce qui laisse très peu de temps aux exportateurs locaux pour embarquer le cacao de ces contrats internationaux. Pour livrer le cacao à temps, ces exportateurs sont donc parfois contraints d’acheter des stocks à l’avance et sans contrepartie, avant la distribution de ces contrats, ce qui s’apparente à de la spéculation.
Enfin, ces sessions spéciales ne permettent pas aux exportateurs ivoiriens d’avoir des financements bancaires puisque ces contrats sont octroyés après le début de la campagne.
Forte spéculation
Cette situation a abouti à une forte spéculation de certaines sociétés locales, occasionnant des défauts de contrats, comme cela a été le cas lors de l’actuelle campagne 2016-2017 qui prend fin le 30 septembre prochain. La non exécution de contrats a eu un impact sur le CCC qui a perdu plus de 200 milliards de F CFA.
Autre sujet polémique, les deux groupements d’exportateurs ivoiriens ont demandé au gouvernement d’évaluer les capacités d’achat et d’exportation de chaque exportateur ivoirien, sur la base de critères objectifs, comme le financement bancaire, afin que les allocations de contrats internationaux aux exportateurs internationaux soient indiscutables
« Nous demandons à revenir aux fondamentaux de la réforme concernant les contrats internationaux comme cela se faisait de 2012, année de la réforme, à 2015. Les sessions spéciales mettent la pression sur les exportateurs ivoiriens qui ont l’obligation contractuelle d’embarquer dès le mois d’octobre » expliquent plusieurs d’entre eux.
Nomination des administrateurs du CCC
Ces exportateurs, ainsi que des producteurs, saluent par ailleurs la décision du président Alassane Ouattara de geler le renouvellement des administrateurs, qui avait été proposé par le CCC. Martyrs Djikalou, le représentant des exportateurs pour le compte du GIE-COOPEX, a été récusé car le groupement auquel il appartient fait partie des entreprises qui ont fait défaut.
Le GNI et l’Ucoopexci-Nouvelle proposent la nomination d’un nouveau représentant des exportateurs en la personne de Monsieur Mamadou Bamba, président de l’Ucoopexci-Nouvelle. Contacté, le CCC n’a pas souhaité commenter.
La Côte d’Ivoire est le leader mondial du cacao avec une production annuelle moyenne de 1,6 million de tonnes de fèves.
Avec jeunafrique