Après avoir limogé son directeur général John Mirenge, un ex-financier converti à l’aérien, les autorités rwandaises souhaitent confier les rênes de la compagnie nationale RwandAir, en pleine expansion, à des professionnels du secteur.
Il y a sept ans, la compagnie nationale du Rwanda, qui s’appelait alors RwandAir Express, ne possédait encore aucun avion. Elle transportait quelques poignées de touristes entre cinq destinations régionales à l’aide de quelques vieux appareils de location.
Depuis, RwandAir a étendu son réseau. Elle dessert désormais 22 destinations, pour la plupart en Afrique, avec une flotte de treize appareils, dont deux Airbus A330 et six Boeing 737. En juin, elle fera de Cotonou son hub ouest-africain.
Réseau extra-continental
Depuis avril, elle développe également un réseau extra-continental : elle dessert Bombay, en Inde, et a inauguré fin mai son premier vol vers l’Europe avec une liaison Kigali-Londres. En juin, elle lancera une nouvelle route vers la Chine et vise des vols réguliers vers les États-Unis dès 2018.
Cette expansion était jusqu’ici pilotée par John Mirenge, directeur général de la compagnie aérienne, licencié en avril. Il avait rejoint ce poste il y a sept ans, après avoir dirigé Crystal Ventures, le fonds d’investissement du Front patriotique rwandais (FPR), le parti au pouvoir. Aucune explication n’a été donnée à ce limogeage, survenu lors d’une réunion de cabinet présidée par Paul Kagame.
Dans un pays où le tourisme de loisirs et d’affaires est devenu un secteur clé (…) la compagnie nationale a embauché des experts de Singapour et de Corée du Sud pour la conseiller sur sa stratégie
« Nous avons plus besoin de spécialistes de l’aviation que de gens qui sont juste fiables », glisse à Jeune Afrique Louise Mushikiwabo, la ministre des Affaires étrangères, qui était présente ce jour-là. Il est vrai que le transporteur a multiplié les nouvelles destinations ces dernières années, mais la logique qui a sous-tendu cette expansion n’était pas claire.
Dans un pays où le tourisme de loisirs et d’affaires est devenu un secteur clé (404 millions de dollars de recettes en 2016), Louise Mushikiwabo indique que la compagnie nationale a embauché des experts de Singapour et de Corée du Sud pour la conseiller sur sa stratégie. Et que le gouvernement « s’achemine » vers la désignation d’un nouvel exécutif ayant une expérience plus solide du secteur. En attendant, c’est le colonel Chance Ndagano qui assure l’intérim à la tête de l’entreprise.
À la veille de sa révocation, John Mirenge, qui recevait JA dans son bureau surplombant l’aéroport international de Kigali, nous avait confié : « Nous sommes dans notre septième année de croissance et nous avons l’intention de grandir encore. »
Quid de la rentabilité de RwandAir ?
Il avait précisé que la compagnie comptait « atteindre les 700 000 passagers transportés en six mois », soit 100 000 de plus qu’à la même période l’année précédente.
Quid de la rentabilité de RwandAir ? John Mirenge a refusé de nous fournir les données financières de la compagnie, mais a affirmé qu’elle « prenait le bon chemin » pour être rentable : « Dans une phase de développement comme celle que nous vivons actuellement, il est impossible de faire des profits, car nous continuons à réaliser des investissements lourds. Nous sommes par exemple en train d’acheter des avions neufs, qui sortent directement de l’usine. Il nous faudra du temps pour récupérer tout cet investissement. Si vous me demandez quand nous commencerons à gagner de l’argent, [la réponse est] très bientôt. Mais cela prendra un certain temps avant que nous soyons bénéficiaires. »
Partage de code
Pour y parvenir, les nouveaux dirigeants pourront s’appuyer sur leur partenaire Ethiopian Airlines. « Ils [les Éthiopiens] s’occupent de la maintenance de nos 737 [Boeing]. Ainsi que de celle notre flotte Q400 [Bombardier]. Nous avons des ingénieurs éthiopiens installés ici à notre siège », avait expliqué le désormais ex-directeur général.
RwandAir a aussi conclu un accord de partage de code avec les Éthiopiens, « afin que nous puissions vendre [leur] réseau [et] qu’ils puissent nous accorder des tarifs préférentiels », a précisé John Mirenge. RwandAir a également des accords de partage de code avec Brussels Airlines et envisage de nouveaux partenariats européens, notamment avec KLM.
Avec jeuneafrique