Alors que les cours sur les marchés internationaux restent relativement stables, la facture des importations africaines des produits alimentaires continuent à augmenter selon la FAO. En 2017, elle devrait attendre quelques 41 milliards de dollars soit une hausse de 11% par rapport au montant enregistré en 2016. Cette tendance devrait encore se maintenir en dépit du potentiel du continent d’accroître sa production, de réduire cette facture, tout en gagnant des points de croissance et en créant des emplois.
L’ardoise des importations alimentaires des pays d’Afrique subsaharienne sera encore salée cette année dans un contexte pourtant marqué par une relative stabilité des cours sur les principaux marchés internationaux. Selon les projections de l’organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), le montant pourrait atteindre cette année quelque 41,3 milliards de dollars, soit 4,1 milliards de plus que celui estimé en 2016. Cette hausse de 11% est supérieure à la moyenne mondiale, bien que les importations alimentaires de l’Afrique subsaharienne ne représentent encore que 3% des importations mondiales.
«Les marchés des produits alimentaires mondiaux demeurent bien équilibrés, grâce notamment à des stocks abondants de blé et de maïs et au rebond de la production de produits protéagineux», a estimé la FAO dans ses dernières Perspectives de l’alimentation, publiées cette semaine. Toutefois, tempère la publication semestrielle, la hausse des frais de port et des importations plus importantes devraient pourtant contribuer à faire grimper la facture mondiale des importations alimentaires au-delà des 1300 milliards de dollars cette année, soit une hausse de 10,6% depuis 2016.
Plus précisément, détaille la même source, «les factures des importations alimentaires des pays les moins développés, des pays à faible revenu et à déficit vivrier et des pays d’Afrique subsaharienne sont sur le point d’augmenter encore plus rapidement en raison d’importations plus importantes de viande, de sucre, de produits laitiers et de produits protéagineux».
Selon la FAO, la hausse de la facture des importations devrait s’appliquer à toutes les catégories alimentaires, hormis le poisson pour qui la demande en provenance du marché national de nombreux pays en développement a été satisfaite par une croissance soutenue des secteurs aquacoles locaux.
Céréales, huiles végétales et graisses animales en tête de liste
La hausse de la facture des importations des produits alimentaires dans les pays subsahariens pourraient s’expliquer en grande partie par la dynamique de croissance économique que connaît le continent et à laquelle se greffe surtout celle de sa population, et par conséquent celle de la classe moyenne. C’est en partie ce qui transparaît de l’analyse détaillée de la facture des importations où la liste des produits massivement importés donne une idée sur la consommation des populations africaines.
Alors qu’au niveau mondial, ce sont les légumes et fruits qui figurent en haut de la liste des produits alimentaires importés, en Afrique subsaharienne, ce sont les céréales et principalement le riz qui grèvent la facture avec près de 11 milliards de dollars à débourser en 2017, selon les prévisions. En seconde position viennent les huiles végétales ainsi que les graisses animales, dont la facture passe de 4,6 milliards en 2016 à 5,9 milliards en 2017, soit une hausse de plus de 28%, la plus importante du lot. Le sucre est le troisième produit qui sera importé cette année par les pays de l’Afrique subsaharienne pour près de 4,5 milliards. Cette année, les importations de sucre devanceraient ainsi celle des poissons qui arrive à la quatrième place de la liste avec 4,2 milliards, soit un montant équivalent à celui de l’année précédente. Les légumes et fruits (3,5 milliards) et les viandes (3,4 milliards) puis les produits laitiers (2,4 milliards) et les boissons tropicales (1,5 milliard) complètent la liste en bas de laquelle on trouve les achats de graines oléagineuses (300 millions). Selon la FAO, ces derniers devaient baisser cette année.
Potentiel mal exploité
Dans un contexte de morosité économique surtout avec des crises de trésorerie, les pays d’Afrique subsaharienne continue donc à payer le prix fort pour nourrir leur population en important massivement des produits qui, pour la plupart, peuvent être produits localement au vu du potentiel agricole dont dispose le continent.
«Au vu de la croissance démographique et si rien n’est fait pour renforcer les capacités locales de production, la facture pourrait grimper à 110 milliards à l’horizon 2025 ». BAD, mai 2015
En mai dernier, la Banque africaine de développement (BAD) a alerté de nouveau sur l’urgence et tout l’intérêt stratégique pour les pays africains à miser sur le développement de l’agriculture et l’agro-industrie pour réduire les importations alimentaires et atteindre une croissance plus inclusive. «Aujourd’hui, l’Afrique dépense environ 63 milliards de dollars par an pour la nourriture, les boissons et le tabac. De ce montant, 35 milliards de dollars sont dépensés seulement pour l’importation de produits alimentaires», a mis en évidence la banque panafricaine qui fait de ce secteur, la priorité de ses interventions sur le continent. D’autant plus qu’au regard de la croissance démographique et si rien n’est fait pour renforcer les capacités locales de production, la facture pourrait grimper à 110 milliards à l’horizon 2025.
«Or, l’agriculture et les agro-industries offrent un potentiel énorme d’autosuffisance alimentaire au continent à travers le développement de corridors régionaux de commerce qui permettraient d’utiliser les surplus de production d’une région pour combler les déficits d’une autre région, et amélioreraient les connexions entre les centres de production, de distribution et de consommation», a plaidé la BAD.
Les gouvernements africains semblent donc avertis, et fort heureusement ,des efforts sont en train d’être modestement consentis pour contenir la situation. La baisse des cours du pétrole et des produits miniers de ces dernières années a poussé plusieurs pays africains à s’engager dans la diversification vers l’agriculture, et les économies les plus larges du continent sont en train d’opérer des choix stratégiques pour transformer leurs secteurs agricoles et réduire les importations de produits alimentaires, constate-t-on sur le continent. Des réorientations stratégiques qui, selon la BAD, devraient porter leurs fruits à moyen terme, surtout dans les pays exportateurs de pétrole et ainsi permettre de réduire la facture des importations alimentaires, avec à la clé, des gains de croissance et des postes d’emplois pour les jeunes.
Avec latribuneafrique