Dans son rapport 2016, l’ONG REN21 annonce la fin à plus ou moins long terme des usines nucléaires ou thermiques produisant l’énergie de base. Leur remplacement par des systèmes flexibles de fourniture d’électricité est en cours.
BASE. 2016 restera l’année où les capacités installées d’énergies renouvelables ont dépassé les 2000 GW, soit une progression de 8,7% en un an, portée principalement par le photovoltaïque et l’éolien. Depuis le début de la décennie, les Etats investissent plus dans les énergies renouvelables que dans le charbon, le gaz ou le pétrole. Le réseau des énergies renouvelables pour le 21e siècle (REN21), ONG basée à Paris dans les locaux du Programme des Nations Unies pour l’environnement, note que les tarifs sont désormais très compétitifs avec en Inde, dans les pays arabes, en Amérique latine des prix du kilowatt/heure inférieurs à 0,05 dollars, soit bien en dessous des coûts des énergies fossiles. L’électricité renouvelable atteint désormais ¼ de la production mondiale.
Il y a cependant deux ombres au tableau. Premièrement, les investissements ont chuté l’an dernier de 23% par rapport à 2015, un ralentissement néfaste pour l’atteinte des objectifs mondiaux de réduction des gaz à effet de serre. Deuxièmement, les subventions aux énergies fossiles et au nucléaire faussent la compétition entre secteurs et freinent le développement aux énergies renouvelables. “Pour chaque dollar dépensé pour les renouvelables, les gouvernements en ont dépensé 4 pour prolonger notre dépendance aux énergies carbonées”, dénonce REN21.
Les nouvelles technologies rendent possible une distribution flexible de l’électricité
Mais la grande nouveauté du rapport 2016, c’est bien le constat que le schéma traditionnel de gestion de la production et de la consommation d’électricité est en train de se modifier en profondeur. Pour assurer le suivi d’une consommation fluctuant à chaque minute, les producteurs s’appuient depuis toujours sur une production ” de base ” régulière assurée par les centrales thermiques et nucléaires, les “pointes ” étant assurées par de l’hydraulique, les énergies renouvelables ou le démarrage de turbines ne fonctionnant que quelques jours par an. La montée en puissance des énergies renouvelables dans nombre de pays met à bas cette structure grâce à l’apport de technologies permettant de rendre plus flexible à la fois la consommation et la production. “Dans beaucoup d’endroits, les grosses centrales de production de base sont en train de perdre leur rentabilité économique et pourraient très bientôt ne plus être les premiers fournisseurs d’énergie“, prédit le rapport.
Dans le cadre d’une production 100% renouvelable, les variations sont compensées par les prévisions de production, les échanges par interconnection, les renforcements de réseaux, et le déploiement des technologies de stockage. © REN21.
Les technologies qui permettent de lisser les productions alternatives émergent. Les parcs éoliens et photovoltaïques sont en cours de connection entre eux à l’échelle de pays entiers pour partager la production sur tout le réseau. Au Canada, une centrale au charbon dédiée à la production de base a été transformée en une unité ne répondant qu’aux pics de la demande. Au niveau du stockage, les stations de transfert d’énergie par pompage qui turbinent l’eau située dans deux bassins situés à des altitudes différentes qui totalisent aujourd’hui 150GW, devraient voir leur puissance être multipliée par cinq d’ici 2050.
Les batteries sont en train de s’imposer dans l’architecture des réseaux : en 2016, révèle REN21, 0,8GW de capacité a été ajouté amenant à un niveau total estimé de 6,4GW. Et cela alors que les technologies de méthanation transformant l’électricité fournie en surplus par éoliennes et photovoltaïque en biogaz va se déployer d’ici la fin de la décennie et que l’essor des voitures électriques va multiplier les capacités de stockage d’électricité.
Les ménages vont décider de leur consommation
Le rapport note également les progrès accomplis dans la maîtrise de la demande d’énergie via les réseaux intelligents, le couplage entre réseaux d’électricité et de chaleur, le développement des pompes à chaleur, l’effacement des consommations et l’autoconsommation. Ainsi, REN21 met l’accent sur les nouveaux modes de consommation de l’électricité comme le “pay as you go” où le consommateur pilote lui-même ses dépenses en énergie, comme cela est proposé en Irlande ou encore au Texas. Ce système avait bénéficié de 3 millions de dollars d’investissements en 2012, il a reçu un apport de 223 millions l’an dernier. C’est ainsi que l’Allemagne a pu gérer un pic de production de 140% d’énergie renouvelable et le Danemark de 86,3%, sans mettre à mal leur réseau.
L’ONG voit ainsi se profiler deux modes de développement des réseaux électriques du futur. Dans les pays développés, la baisse continue de la consommation du fait des économies d’énergie et des gains d’efficacité va aider à passer d’un système de production de base au pilotage d’un réseau flexible et décentralisé. Dans les pays en voie de développement qui vont devoir faire face à une augmentation de la demande et à une couverture en électricité de toute leur population, des choix devront être faits entre l’extension d’un réseau centralisé et l’émergence de petits centres de production décentralisés liés à une distribution locale de l’énergie.
Avec sciencesetavenir