J’ai eu la chance d’assister à la conférence de Barack Obama. Je ne l’ai vraiment vu que sur un écran géant du Palais des congrès, mais c’était quand même l’occasion de respirer le même air que lui pendant 90 minutes. N’est-ce pas incroyable? Pourtant, cette expérience magique pour groupie finie a eu pour conséquence de me plonger dans un état de stress post-traumatique.
Mais qu’est-ce qui fait d’Obama un maître de l’allocution inspirante? Pourrais-je suivre sa recette pour améliorer mon niveau de jeu ou suis-je condamnée à l’ordinaire?
Voyez-vous, je suis moi-même conférencière à mes heures. Et simplement pour clarifier les choses, je ne suis pas Barack Obama! J’ai toujours considéré avoir un certain talent pour l’art oratoire, mais de voir l’ex-président en personne, ça ébranle la confiance en soi des meilleurs apprentis sorciers du Keynote Speech.
En repassant le film de l’événement dans ma tête (aidée par l’enregistrement de la diffusion télé), j’ai remarqué plusieurs éléments sur lesquels méditer.
Être authentique
D’abord, il faut dire que Barack… est Barack. Aucun conférencier ne peut copier son style. Alors qu’il est mesuré et calme, je suis enthousiaste et énergique! Si je tente de calquer ses airs graves, son humilité ou ses silences, je risque de complètement me dénaturer. Barack Obama, nous l’avons vu dans son entrevue avec Sophie Brochu, n’est pas différent lorsqu’il parle à une autre personne ou lorsqu’il donne sa conférence. Il a développé son propre style en cohérence avec sa personnalité, ce qui le rend authentique. De ce côté, inutile de forcer la note. Je dois rester moi-même. Il faudra chercher l’inspiration ailleurs.
Connaître son audience… et le démontrer
Ce qu’on remarque ensuite, c’est qu’Obama est excellent quand vient le temps de s’adresser à son audience de manière personnelle. Il a débuté sa conférence en rappelant que le Canada avait été l’hôte de sa première visite à l’étranger en tant que président. Il a souhaité un bon anniversaire à Montréal, en français s’il-vous-plaît. Il a flatté la salle, à plusieurs reprises, en soulignant que nous étions des gens d’affaires progressistes. Autant de petites attentions qui permettent aux gens présents de se sentir unis, voire concernés personnellement par son discours.
De ce côté, il est évident qu’on peut souvent faire mieux comme conférencier. Interagir avec la salle en début de conférence. Démontrer que l’on comprend à qui l’on s’adresse. Poser des questions aux gens présents. Il arrive souvent que j’oublie cet élément dans le feu de l’action, trop pressée de sauter au vif du sujet. À retenir.
Tenir compte de l’actualité
Personne n’aime sentir qu’on lui sert un discours réchauffé. Bien qu’on connaisse ses leitmotivs par cœur (espoir vs peur, ouverture vs repli), Obama a intégré à son discours quelques mots au sujet des récents attentats de Londres et autres récents drames survenus en Europe. Je l’ai remarqué à plusieurs reprises durant son allocution: les gens réagissent à ces mentions. Ça fonctionne.
On oublie parfois cet aspect comme conférencier: il est facile d’utiliser l’actualité récente pour donner plus de pertinence à notre propos. Les gens adorent les exemples auxquels ils peuvent s’identifier. Il faut par contre accepter d’investir un peu de temps pour personnaliser chacune des conférences que l’on donne, au lieu de s’en tenir strictement à notre présentation Powerpoint. À intégrer définitivement à nos pratiques!
Maîtriser la rhétorique
Là-dessus, il faut le dire, Obama est trop fort. Ses discours sont puissants parce qu’il utilise habilement une foule de petits trucs qui transforment la simple parole en éloquence. Il répète des mots, il fait des montées, il utilise des images, manie les contrastes… Et toute cette technique semble si naturelle! On dirait qu’il réfléchit en parlant, qu’il nous invente ça au fur et à mesure… Évidemment, il n’en est rien.
Mais quand on n’est pas Obama, doit-on intégrer un texte à la perfection ou improviser?
Un conférencier d’expérience m’a un jour expliqué qu’il se basait sur 8 mots pour donner une conférence de 60 minutes. Sa présentation comprenait littéralement huit pages, chacune avec un seul mot en gros caractères. Selon lui, il fallait simplement maîtriser son sujet et en parler naturellement. Il s’agit également d’un point de vue intéressant qui présente malheureusement le défaut de ses qualités. Sans repère, la prestation risque d’être inégale d’une fois à l’autre.
Il m’apparaît plus porteur d’intégrer certains passages plus éloquents à des moment clés de mes conférences (comme en introduction ou en conclusion), pour créer des effets marquants. Rédiger un texte et l’apprendre par cœur serait aussi ridicule qu’irréaliste. Je ne traîne pas mes télésouffleurs aux quatre coins du Québec!
Pour terminer, l’ironie…
Je termine ce billet rapidement car je dois me rendre à Boucherville ce matin… pour donner une conférence! Quand je vous disais que Barack m’avait traumatisée, ce n’était pas une blague. Écrire un texte sur les meilleures pratiques d’art oratoire quelques heures à peine avant de faire soi-même une prestation du genre, ce n’est rien pour se détendre!
Avec lesaffaires