Après les chefs d’entreprises, les responsables financiers sont aussi confiants sur les perspectives africaines. Plus de 80% des directeurs financiers d’entreprises d’Afrique francophone ont déclaré en effet être très optimistes sur les perspectives de croissance de leurs entreprises en 2017. C’est ce que révèlent les résultats d’une enquête que vient de réaliser le cabinet PwC dans une trentaine de pays du continent. En tête des raisons de cet enthousiasme sans précédent, les perspectives de développement à l’international même si des contraintes sont légions.
Le vent d’optimisme qui prévalait en début d’année continue de souffler auprès des acteurs économiques et de leurs collaborateurs. Après l’étude sur la perception des PDG d’entreprises d’Afrique dont les résultats publiés il y a quelques jours qui ont fait ressortir que 97% d’entre eux sont optimistes sur l’avenir, le cabinet spécialisé en audit, stratégie et consultation PwC a rendu public, jeudi dernier à Casablanca, les résultats d’un nouveau sondage réalisés auprès des directeurs financiers. C’est à peu près le même sentiment qui se dégage puisqu’à plus de 8o%, ils se sont déclarés optimistes dans leurs prévisions pour l’année en cours ainsi que sur les perspectives de croissance de leurs entreprises. En 2016, ils n’étaient que 54% à se montrer aussi confiants.
L’étude, « enjeux stratégiques et priorités 2017 du directeur financier en Afrique francophone » a été réalisée dans 34 pays d’Afrique francophone et d’après les résultats détaillés, c’est en Afrique subsaharienne que les directeurs financiers se montrent le plus optimisme avec près de 82% d’opinion positive contre 75% au Maghreb. « Dans un environnement morose et incertain, l’Afrique fait figure d’exception» a estimé Noël Albertus, managing partner chez PwC Advisory Maghreb et Afrique francophone pour qui avec une progression rapide de la population qui devrait doubler d’ici 2050, une croissance économique forte, une classe moyenne émergente et une population jeune, de plus en plus urbaine, l’Afrique a de quoi afficher son optimisme. En plus de la sérénité et de l’optimisme dont font montrent les dirigeants financiers, les résultats de l’enquête ont aussi démontrés que la plupart des entreprises envisagent de se développer à l’international, ce qui fait dire à Noel Albertus, que « l’Afrique croit en elle-même ».
Stratégie de développement
Selon l’enquête de PwC, l’optimisme dont font montre les directeurs financiers des entreprises africaines s’explique en grande partie par leur volonté de se développer à l’international. Ils sont en effet 89% des entreprises d’Afrique francophone sondées qui disposent en effet d’une stratégie à l’international et dans une large partie, ces entreprises veulent d’abord investir dans leur propre sous-région, tandis que 41%, d’entre elles, entendent se tourner en priorité vers l’Afrique anglophone.
« Beaucoup d’entreprises sont entrées dans une nouvelle phase de leur développement en Afrique, caractérisée par une plus grande sophistication des marchés sur lesquels elles opèrent. Gagner des parts de marchés, lancer de nouveaux produits, améliorer ses marges sont autant de défis qui se posent désormais avec une nouvelle acuité sur le continent » explique Moncef Klouche, associé responsable de la stratégie au bureau de Casablanca.
Selon ce dernier, si les grands groupes internationaux ont longtemps capitalisé sur une certaine avance technologique, cette époque est désormais révolue. « Les grands groupes font désormais face à des marchés plus consolidés où les champions locaux viennent jouer un rôle de plus en plus important » poursuit Moncef Klouche tout en reconnaissant que le continent reste cependant un formidable relais de croissance pour des entreprises dont les sièges sont souvent situés dans des environnements où les perspectives de croissance économique sont nettement plus modérées. Ce nouveau contexte appelle donc un réexamen du modèle de croissance pour ces grands groupes en Afrique dont les fondements, selon l’expert, sont de privilégier de nouvelles formes de partenariats stratégiques avec cette nouvelle génération de champions africains “.
L’Afrique francophone est donc la destination la plus prisée par les entreprises dont la stratégie est tournée vers l’international. Ce qui peut s’expliquer par plusieurs facteurs notamment la langue commune, une monnaie unique et dans l’ensemble une réglementation relativement harmonisée dans la zone francophone qui constitue de ce fait une sorte de « zone de confort » pour les entreprises issues du même ensemble. Toutefois, et c’est l’un des faits nouveaux, l’Afrique anglophone gagne de plus en plus en attractivité auprès des entreprises francophones puisqu’ils sont désormais plus de 40% à déclarer vouloir y investir contre seulement 10% en 2016.
Obstacles et priorités
En dépit d’un optimisme croissant, des difficultés restent à surmonter en Afrique pour les directeurs financiers. Ainsi pour plus de la moitié d’entre eux, les principaux obstacles à l’expansion sont de nature réglementaire et sécuritaire, ce qui privilégier une stratégie de croissance à plusieurs axes. Parmi les défis prioritaires des directeurs financiers pour faire face à la panoplie de contraintes qui ne manquent pas, l’optimisation du cash disponible ainsi que la gestion des ressources humaines avec des compétences notamment locales qui font parfois défaut. Des défis que les directeurs financiers sont appelés à gérer dans le cadre de leur responsabilité stratégique au sein de leurs entreprises. « Pour concrétiser notre volonté de développement dans le continent africain, nous devons repenser notre modèle de financement qui représente le principal frein à notre expansion. Une fois notre stratégie élaborée, nous recourons à des services d’accompagnement pour la phase d’implémentation pour être bien conseillés » explique par exemple dans l’étude Walid Hbaieb -de la banque tunisienne Zitouna .
La croissance des pays africains est certes perçu par les entreprises comme une opportunité pour leur développement mais les obstacles peuvent consituer un frein à cette ambition de croissance. « Pour l’Afrique subsaharienne, le principal obstacle est la réglementation et le manque d’harmonisation des législations. La négociation des standards panafricains a pour objet d’instaurer un droit des affaires harmonisé mais encore faut-il que ces résolutions entrent en pratique. A cela, s’ajoutent les contraintes fiscales, très pesantes pour les entreprises » détaille Douty Fadiga, associé PwC Afrique francophone.
La gestion financière devient donc un enjeu capital pour accompagner le développement de ces entreprises et s’il n y a pas de recettes magiques pour une stratégie prête à l’emploi, certaines expériences s’avèrent assez intéressante au vu des résultats enregistrés.
C’est le cas par exemple au sein du Groupe BMCE Bank of Africa, où la stratégie d’expansion à l’international est mise en œuvre par le comité exécutif du groupe, lequel sous l’autorité de son président, assure le pilotage stratégique du groupe et évalue les opportunités de développement et d’extension d’activités à l’international. La direction financière intervient sur le volet faisabilité et évaluation financière du projet en s’appuyant sur l’appréciation des impacts financiers liés aux investissements en projet. « Les investissements réalisés en Afrique subsaharienne se font en devises et sont consommateurs en fonds propres de la banque, ce qui requiert d’affiner les plans de refinancement et de trésorerie en devises, ainsi que les plans de capitalisation prévisionnels afin d’assurer au groupe une croissance harmonieuse tout en respectant les différentes exigences réglementaires » a expliqué à ce sujet et sur cas propre au Groupe, Zouhair El Kaissi directeur Pôle finances & participations à la BMCE Bank of Africa qui dispose de filiales dans une trentaine de pays africains. « Si l’évolution du rôle de la fonction finance reste une priorité pour les dirigeants financiers, des contraintes continuent de peser et agissent comme un frein à l’atteinte de cet objectif, parmi lesquelles le manque de compétences internes » a mis également en relief Noël Albertus. De ce fait, « la capacité à développer les compétences nécessaires pour tirer pleinement parti des innovations technologiques apparaît dès lors comme un des enjeux majeurs auxquels sont confrontées les directions financières qui disposeront ainsi des moyens pour améliorer leur fonctionnement interne, gagner en efficacité et renforcer leur rôle de partenaires stratégiques des entreprises ».
Avec la tribuneafrique