Quel que soit l’emploi occupé, les salaires sont plus élevés en région parisienne que dans le Cantal. Selon la dernière note de France stratégie, organisme rattaché à Matignon, ces écarts tiennent davantage à la concentration de personnes diplômées qu’à la densité de l’activité économique du territoire.
Les salaires sont en moyenne plus élevés dans les grandes agglomérations que dans le reste de la France. «En 2012, le salaire horaire net moyen se situe à 13,9 euros, soit 1,9 fois le Smic. Mais il varie quasiment du simple au double entre la zone d’emploi où il est le plus bas (10,4 euros à Saint-Flour, dans le Cantal) et celle où il est le plus haut (19,5 euros à Saint-Quentin-en-Yvelines près de Paris)», rappelle France stratégie. L’organisme rattaché au service du premier ministre s’est intéressé aux raisons de ces écarts de rémunération et les conclusions de sa dernière note d’analyse vont un peu à contre-courant de la littérature économique habituelle.
Certes, ses experts reconnaissent que la carte de France des salaires les plus élevés se superpose à celle des zones économiquement denses où se concentrent l’activité et la main-d’œuvre. «Les zones où les salaires sont les plus élevés en moyenne correspondent pour beaucoup aux zones d’emploi des grandes métropoles et de grandes villes telles que Clermont-Ferrand, Orléans, Pau ou Tours. On observe en particulier une agglomération de zones d’emploi favorisées sur le plan des salaires autour de Paris et de l’axe Lyon-Grenoble», notent-ils. Mais ils mettent en avant un deuxième facteur qui, selon eux, explique davantage la hausse des rémunérations: le niveau d’éducation de la population locale. Ainsi, une forte concentration en personnes très diplômées – au-delà de BAC +3 – tire à la hausse tous les salaires de la zone, et pas seulement ceux des personnes occupants des emplois très qualifiés. «Selon nos estimations, une hausse de 1 point de la part des diplômés du supérieur long dans la population d’une zone d’emploi induit une augmentation du salaire net horaire moyen de plus de 0,6 % pour les cadres, mais aussi de l’ordre de 0,5 % pour les professions intermédiaires et d’environ 0,3 % pour les employés», affirment les économistes de France stratégie. Dans la région parisienne et les métropole de province, le surcroît de salaire attribuable à la forte concentration de diplômés (par rapport à une zone moyenne) s’élève à 2 % pour les employés et à environ 4 % pour les professions intermédiaires et les cadres.
Hausse aussi des inégalités
Plusieurs facteurs expliquent selon eux ce phénomène de contagion. Tout d’abord, les travailleurs qualifiés, en interagissant avec le reste de la population, font bénéficier cette dernière de leurs connaissances et des innovations favorisant les mécanismes d’apprentissage «sur le tas». Ensuite, en s’installant sur un territoire, cette main-d’œuvre mieux payée encourage le développement autour d’elle de services comme la garde d’enfants, les restaurants, les loisirs… «En outre, une forte densité de travailleurs qualifiés peut induire une progression des prix du foncier, qui par ricochet pousse à la hausse l’ensemble des salaires que les entreprises doivent offrir, y compris à une main-d’œuvre moins qualifiée», précisent les économistes.
Les experts de France stratégie préviennent cependant: migrer vers une zone où la concentration en diplômés du supérieur est forte dans le seul but de voir son salaire augmenter n’est pas forcément un bon calcul. Qui dit zones denses dit aussi impact sur le niveau et la qualité de vie (transports encombrés, pollution…). «Au coût du déménagement ou des déplacements journaliers peut s’ajouter le surcoût de la vie dans les zones les plus denses, en particulier le prix du logement», écrivent-ils. Surtout, les économistes relèvent aussi que «si la concentration géographique des très diplômés se traduit par une hausse du salaire de quasiment toutes les catégories de salariés», elle accroît aussi «quelque peu les inégalités salariales entre catégories socioprofessionnelles».
Avec lefigaro