Des neuropsychiatres britanniques ont créé “Wizard”, une application qui permet d’améliorer les performances cognitives des patients atteints de schizophrénie.
Hallucinations, délire, agitation : c’est souvent par ces symptômes que l’on désigne la schizophrénie. Pourtant, il existe un autre versant à ce trouble mental, qui touche environ 1% de la population mondiale : l’altération du fonctionnement cognitif, en particulier de l’apprentissage, la mémoire et le comportement social. Si à l’heure actuelle, des traitements antipsychotiques permettent de soigner assez efficacement les troubles sensoriels, il n’existe toujours aucun moyen médical de traiter les difficultés cognitives engendrées par la maladie.
C’est pour pailler à cette absence de traitement efficace que la neuropsychiatre Barbara Sahakian et ses collègues de l’Université de Cambridge ont mis au point une application d’entraînement cérébral, rapporte le site d’information Motherboard. Il aura fallu neuf mois pour que le jeu “Wizard”, inspiré des modèles d’entraînement neuropsychologiques, voie le jour. Le principe : une série de tâches de mémorisation sont intégrées dans une narration, à laquelle le patient peut participer en se créant son propre personnage.
Et les résultats confirment l’efficacité de cette application. Dans une expérience publiée dans le journal scientifique Philosophical Transactions of the Royal Society, 22 patients atteints de schizophrénie ont été divisés en deux groupes. Dans le premier, les patients utilisent l’application d’entraînement cérébral pendant 8 heures, sur une période de 4 semaines, dans le second, les patients suivent un traitement normal. L’étude montre que les individus ayant joué à Wizard sont nettement plus performants au test CANTAB, qui mesure la mémoire épisodique, une des formes de mémoire touchées par la schizophrénie.
Une amélioration du fonctionnement social et psychologique
Mais cet entraînement n’améliorerait pas que les capacités de mémorisation des patients : sur l’échelle d’évaluation globale du fonctionnement (GAF), utilisée par les psychiatres pour évaluer le fonctionnement psychologique, social et professionnel d’un individu, les participants au programme d’entraînement cérébral obtiennent un meilleur score.
“Quand on s’intéresse aux activités quotidiennes de ces patients, on constate une réelle amélioration. Le jeu n’améliore donc pas seulement les performances cognitives pour une tâche ciblée, mais aussi le fonctionnement psychosocial général de l’individu”, s’extasie Barbara Sahakian.
Enrayer la stigmatisation quotidienne des malades
L’application “Wizard” présente plusieurs avantages pour les patients. Pas d’effets secondaires, tout d’abord, comme pour des traitements médicaux classique. Un format ludique ensuite, facile à vivre au quotidien : “Je voulais que cette application soit sous forme de jeu, pour contourner la contrainte d’un traitement classique. Cela permet d’enrayer la stigmatisation du traitement, parce que les patients n’ont pas besoin d’aller à l’hôpital pour être soignés – tout le monde joue à ce genre de jeu”, explique la chercheuse.
L’application pourrait également aider les jeunes atteints de schizophrénie à poursuivre plus facilement leurs études. “Si un jeune développe une schizophrénie alors qu’il est à l’école ou l’université, il risque d’avoir de réels problèmes à s’en sortir, car ses capacités d’assimilation sont affectées”, poursuit Barbara Sahakian.
Autre point fort : les coûts peu élevés d’une telle application, qui permettrait de réduire le prix des traitements pour les schizophrènes. En France, environ 15 milliards d’euros sont consacrés chaque année au traitement de la maladie. L’application a été commercialisée par la sociétéPeak, spécialisée dans les applications de développement cérébral. Selon les chercheurs, elle s’adresse aux patients atteints de schizophrénie, mais aussi à tous les amateurs de jeux cérébraux.
Avec RTL