Sommes-nous destinés à passer d’un capitaine de pédalo à une poupée barbie, très douée pour répéter les dernières opinions qui circulent dans les dîners parisiens (et les réunions clandestines de Jacques Attali) mais incapable de dessiner une vision pour la France? La journée Whirlpool, comme nous devrons désormais l’appeler, va définitivement ouvrir la question. Il faudra attendre le 7 mai pour avoir la réponse, mais on la pressent déjà.
La barbie Macron ou la nouvelle trahison des clercs
À la base, il y a quand même un candidat porté par le gouvernement profond, mais né à Amiens, qui prévoit de rencontrer l’intersyndicale d’une usine d’Amiens, en cours de fermeture… dans les locaux de la CCI d’Amiens. Mais enfin, quel abruti a pu conseiller à un « pays » de ne pas aller rencontrer les ouvriers à l’usine? quel énarque de troisième zone, bouffi d’orgueil par son titre en trompe-l’oeil, a pu souffler à l’oreille du candidat sorti premier au premier tour de l’élection présidentielle de la troisième puissance militaire mondiale, de ne pas rencontrer les petites gens là où ils vivent?
Dans tous les cas, il fallait la jugeote d’une poupée barbie pour accepter de raser les murs dans sa ville de naissance, qui lui a donné 28% des voix lors du scrutin. Macron aurait voulu se camper dans le rôle du candidat bling-bling, esquissé après son dîner du Dôme, il ne s’y serait pas pris autrement.
Après un scrutin qui a montré tout le malaise des ouvriers face au monde contemporain, cette logique du bunker ne pouvait être vécue que comme une terrible provocation, et un manque total d’empathie.
La redoutable blitzkrieg de Marine Le Pen
Profitant de cette grossière erreur tactique, Marine Le Pen s’est glissée sur le site de l’usine en grève, livrant le spectacle tragique d’un candidat bling-bling enfermé avec une intersyndicale dans l’étonnante solitude d’un bureau sans âme, face à une candidat nationaliste accueillie à bras ouverts par des ouvriers qui attendait la protection d’une déesse nourricière. Cette première image était déjà terrible.
Non content de se faire damer le pion, Emmanuel Macron n’avait manifestement pas son content de souffrance. Le même abruti qui lui avait conseillé de ne pas montrer le bout de son nez auprès des ouvriers en grève lui a conseillé de finalement y aller sous le feu de l’ennemi. Et voilà le candidat qui arrive, le héros du premier tour, au milieu d’un concert de huées, d’une bousculade où il doit quémander un micro, un gueulophone, le droit de monter sur un camion auprès de ses officiers de sécurité.
Terrible contraste de l’omnipotence audiovisuelle où un favori enfermé dans son tour d’ivoire, protégé par l’étiquette de la Cour, devient le soumis d’une dominatrice sans atour…
L’erreur magistrale d’Attali, le soutien de Macron
Le matin même, Jacques Attali, indécrottable soutien des puissants depuis un quarantaine d’années, avait commis une superbe bourde en déclarant sur LCI:
« Je ne voudrais pas que cette campagne se réduise à des anecdotes […]. C’est en effet une anecdote dans un contexte plus large, si on ne se présente pas dans le contexte plus large. C’est une anecdote, non pas au sens péjoratif du mot, ça s’inscrit dans un contexte plus large, c’est-à-dire dans le contexte de la mondialisation ou la fermeture », a déclaré l’essayiste Jacques Attali soutien d’Emmanuel Macron. « Le cas de 300 personnes n’est pas du ressort du président de la République », a-t-il renchéri.
L’affaire Whirlpool, une anecdote? Succès garanti quand, le matin même, Marine Le Pen est venue poser en star…
Macron hollandisé avant d’être élu
On sait une chose maintenant: le prestige de la fonction présidentielle a vécu. On peut gagner un premier tour et se faire huer comme un voyou par une horde en colère deux jours plus tard. Macron est hollandisé, déjà.
Le second tour ou l’affrontement de deux France irréconciliables
D’un côté, la France des dividendes, de l’autre, la France des prolétaires. D’un côté, la France à l’abri des bureaux ouatés, de l’autre la France des ateliers. D’un côté, la France qui gagne la mondialisation, de l’autre celle qui la perd. D’un côté, la France des corps intermédiaires, de l’autre, la France du peuple. D’un côté, la France qui gagne la mondialisation, de l’autre celle qui la perd.
Tel est le sens du scrutin du 7 mai.