« Les femmes africaines sont les plus travaillantes au monde. Si toutes les femmes en Afrique, du Caire à Cape Town, décidaient de cesser de travailler, l’économie africaine s’effondrerait », lançait Hillary Clinton lors d’un discours prononcé en 2011 en Ethiopie devant un parterre de personnalités féminines africaines.
En plus de l’économie, c’est aussi par la politique que les femmes africaines améliorent leur condition et gagnent des batailles pour la reconnaissance et l’effectivité de leurs droits. Des batailles qui se font désormais dans les centres de décisions et jusque dans les parlements où les femmes sont de plus en plus représentées en Afrique.
Disparités entre régions et entre pays
Qui l’eût cru deux décennies plus tôt ? En 2015, le continent africain était la deuxième région du monde où la représentativité des femmes au parlement s’est le plus amélioré au cours des 15 dernières années, selon le rapport « Women Matter Africa » 2016 de McKinsey.
Ainsi, si la représentation parlementaire féminine s’est accrue de 27% entre 2000 et 2015 pour les élus dans l’Union européenne, en Afrique, cette proportion atteint 25% au cours de la même période. Le continent se hisse au-dessus de la moyenne mondiale (22%). Il dame le pion à l’Asie où le taux ne s’est amélioré que de 15% et même l’Amérique (19% seulement en 15 ans).
Pourtant malgré cette amélioration de la représentativité, des disparités apparaissent entre les régions africaines. C’est l’Afrique de l’Est qui a amélioré le plus la représentativité des femmes dans ses hémicycles. Entre 2000 et 2015, elle a amélioré de 39% le taux de représentation des femmes au parlement contre 26% pour le sud de l’Afrique, 24% pour l’Afrique du nord. Encore à la traîne, l’Afrique de l’Ouest n’a amélioré la féminisation des assemblées que de 16% en 15 ans ! Malgré ces disparités régionales, dix pays africains se distinguent en matière d’amélioration de la représentativité féminine au parlement.
1- Le Rwanda
Pour McKinsey, la moyenne mondiale de la représentation féminine est de 22%. Le Rwanda triple cette moyenne mondiale pour se hisser à la tête des pays promouvant les femmes dans les instances législatives. Avec 64% de femmes élues au parlement, le pays est-africain détrône la Suède de sa première place mondiale des pays avec le plus grand pourcentage d’élues.
Le Rwanda est aujourd’hui proche d’atteindre la parité de genre au niveau de son parlement grâce notamment à une consécration de la parité dans sa constitution mais aussi à la reconstruction sociale après le génocide de 1994. Lentement, le pays de Paul Kagamé où sans surprise les femmes sont propriétaires de 41% des entreprises, a établi un quota constitutionnel obligatoire de 25 sièges réservés aux femmes à l’assemblée nationale et un autre de 30% sur les 20 membres du Sénat. Même si en dehors de l’hémicycle, le droit des femmes doit encore être renforcé, le pays est assurément un exemple à suivre !
2- Le Sénégal
A la veille de chaque 8 mars, le Sénégal commémore le martyr des femmes de Nder, village situé au sud-ouest du pays. Autrefois, ce petit village -qui appartenait au royaume du Walo- a subi, un jour de 1890, une attaque des Maures Trarza en l’absence des hommes. Pour mener la résistance, les femmes se sont déguisées en tenues de combattants. A bout de force, elles s’enfermèrent dans la plus grande maison du village et s’immolèrent par le feu pour échapper à la capture de l’ennemi.
Cette légende historique montre un pays où les femmes ont le plus souvent joué des rôles d’avant-garde dans les assemblées électives des anciens royaumes quand elles n’étaient pas reines. Cette longue tradition s’est perpétuée sur le champ politique avant de s’estomper avec l’indépendance du pays. Plusieurs générations de femmes se sont alors battues pour redonner à la femme son rôle politique.
Aujourd’hui avec près de 44% de femmes élues sur les 150 sièges de l’assemblée, le pays occupe le 7ème rang mondial et le second en Afrique. Véritables chevilles sociales, les femmes sénégalaises sont organisées en coopératives, ONG, PME/PMI exclusivement féminines très efficaces pour mener des campagnes de lobbying ou des campagnes électorales.
Sur le chemin de leur lutte pour l’égalité, les femmes sénégalaises ont obtenu, le vote en 2010 d’une loi sur l’égalité dans les instances électives et semi-électives qui obligent les partis à présenter des listes paritaires et les organismes à consacrer la parité. Aux dernières législatives, 64 femmes ont été élues à l’assemblée. Une parité quasi-parfaite qui devrait être corrigée lors des législatives de juillet 2017.
3- Afrique du Sud
Au pays de Nelson Mandela, les femmes sont les premières militantes des partis politiques notamment au sein du puissant ANC que s’apprête probablement à diriger Nkosazana Dlamini-Zuma après sa carrière à la tête de la commission de l’Union africaine ; Il faut dire que le combat des femmes commence dès l’apartheid.
Mais la naissance d’un véritable mouvement de consolidation de leurs droits politiques s’est concrétisé un 09 août 1956 lorsque des femmes de toutes couleurs ont mené une grande marche pour réclamer plus de droits.
Depuis ce jour célébrée comme le jour de la naissance des droits des femmes sud-africaines, le pays consolide les rangs. Aujourd’hui, l’Afrique du Sud est le troisième pays africain qui compte le plus de femmes élues. Elles occupent en moyenne 42% des sièges à l’assemblée.
En dehors de l’hémicycle, 40% des postes ministériels ou de prise de décisions étatiques sont en général dévolus aux femmes. Avec une force d’influence de 30% au niveau des entreprises du pays, les femmes sud-africaines sont plus que jamais positionnées sur l’échiquier politique.
4- Namibie
On connaissait le pays champion de la lutte anti-corruption et anti-détournements deniers publics. Il faut désormais parler de la Namibie comme d’un pays africain qui met un point d’honneur pour la parité homme/femme dans la vie politique. Le pays d’Afrique australe est le troisième sur le continent qui améliore la représentativité des femmes au parlement avec une moyenne supérieure à 39% en 15 ans.
La nature parlementaire du régime politique favorise la concurrence entre les partis politiques. Avec 46 femmes élues à l’assemblée nationale pour 56 hommes pour la dernière législature, le pays d’Afrique australe revient de loin.
Face à une affirmation de plus en plus marquée des femmes en politique, la Namibie a fini par vouloir atteindre l’égalité parfaite pour acter l’émancipation politique des femmes. Pour ce faire, le pays a adopté le système de coloriage politique dit « système zèbre ».
Depuis 2010, chaque parti politique est obligé de présenter une liste avec un nombre égal d’hommes et de femmes candidats. De même chaque ministre homme est tenu de choisir une femme en tant que vice-ministre. Pareil pour les suppléants : là où un homme est mis en avant, une femme doit suivre et inversement.
Le pays est en passe d’atteindre d’ici les prochaines législatures, l’égalité politique parfaite. Prochain combat des femmes : les violences et l’égalité salariale
5- Mozambique
Entre 2000 et 2015, le Mozambique a considérablement amélioré la représentativité féminine au sein de son parlement avec une moyenne de 42% soit presque le double de la moyenne mondiale (22%). Dans ce pays lusophone où on dénonce souvent les mariages précoces et les violences conjugales, les femmes entendent prendre leur revanche sociale et politique.
Aux avant-postes lors de la lutte pour l’indépendance, les femmes mozambicaines ont été les militantes les plus actives du Frelimo (Front de Libération du Mozambique). D’obédience marxiste, ce parti historique a fait de l’égalité paritaire un de ses chevaux de bataille.
Pourtant, une fois l’indépendance obtenue et son pouvoir assis, les discours sur la féminisation ont souvent été étouffés ou négligés. Les femmes pionnières qui ont participé au mouvement de libération ont dû se battre pour réhabiliter leurs droits. Un long combat qui a porté des fruits
Lors de la dernière législature, sur les 250 membres du Parlement, 98 sont des femmes. Aujourd’hui, il n’est pas rare de voir au Mozambique une femme à la tête du parlement ou d’un poste ministériel stratégique pour le gouvernement. Le pays tente aujourd’hui de mettre en place des mécanismes pour une féminisation des instances. Même si la parité n’est pas encore effective, le combat des femmes dans ce pays continue.
Avec latribune