Avec Internet et les chaînes d’info en continu, la moindre défaillance peut prendre des allures de crise. Et toute entreprise, même la vôtre, est susceptible de se retrouver au centre du tourbillon. Voici comment bâtir un plan com à la hauteur.
CHOISIR LA BONNE STRATÉGIE
“Inutile de mentir. Tout finit aujourd’hui par se savoir. Les conséquences d’un mensonge sont toujours pires que la vérité”, rappelle Jean-Christophe Alquier. Mais on devra parfois taire des informations pour respecter une procédure judiciaire ou pour préserver des secrets industriels. “On peut ne pas tout dire si le travail de pédagogie qui donne du sens à une information n’est pas possible à ce moment-là, pointe aussi Arnaud Dupui-Castérès. Mais il faut essayer de coller au plus près de la vérité. “Exit, donc, la stratégie d’un Jérôme Cahuzac déclarant formellement ne pas posséder un compte en Suisse ! Il n’en faut pas moins élaborer une véritable stratégie de communication et fixer des objectifs clairs.
“Que voulez-vous préserver à tout prix : la réputation de l’entreprise, le produit ou le chiffre d’affaires ? Qu’êtes-vous prêt à sacrifier ? interroge Marc Eskenazi. Dans une crise, il faut toujours lâcher quelque chose. Tant que le choix n’est pas fait, la communication sera hésitante.” En 1999, quand le bruit a couru que des canettes de Coca-Cola contenaient de la listéria, la firme d’Atlanta a nié en bloc : impossible de reconnaître un quelconque danger lié à son produit emblématique. Et tant pis si les ventes ont fortement chuté ensuite !
GÉRER LE WEB ET LES RÉSEAUX SOCIAUX
Certaines entreprises préparent des dark sites, des sites Internet complets, qu’elles tiennent en réserve pour les mettre en ligne en cas de crise. Les compagnies aériennes, par exemple, en ont sur les crashs aériens. Et BP avait lancé un tel site, quelques heures seulement après l’explosion d’une de ses plateformes dans le golfe du Mexique, en 2010, avec fil d’information, témoignages, analyses de l’eau et de l’air, etc.
“Attention cependant, prévient Marc Eskenazi, le Net est à manier avec précaution. Les choses peuvent très vite se retourner contre l’entreprise.” En octobre dernier, alors que l’image de Xavier Broseta avec sa chemise arrachée avait fait le tour du monde, Air France diffusait une vidéo mettant en scène son DRH, avec des salariés très souriants, clamant leur bonheur de travailler pour la compagnie, alors que celle-ci envisageait de supprimer près de 3.000 emplois… La vidéo a été raillée par les internautes. On a vu aussi certaines entreprises intervenir sous de faux noms ou de faux profils sur les réseaux sociaux. Lorsqu’elles sont démasquées, ce qui est souvent le cas, le retour de boomerang provoque des dégâts considérables.
CLORE LE CYCLE EN FINESSE
Comment, enfin, boucler la crise ? “Les entreprises croient souvent que les choses vont se tasser d’elles-mêmes. Ou elles ont l’impression qu’en reparler va la réactiver. Mieux vaut communiquer une bonne fois pour toutes pour dire que c’est fini”, recommande Jérôme Batout. Parler avec les journalistes qui ont suivi l’affaire ou publier un document écrit peut suffire. La visite du dirigeant sur le site ou dans l’usine concernée permet aussi de clore la crise en interne. Concluons sur ce conseil d’Yves-Paul Robert : “Il faut faire des retours d’expérience sur les crises. Ce qui a marché ou pas… et pourquoi.” Une autre façon de limiter les risques.
Jérôme Batout, directeur associé chez Publicis Consultants
L’entreprise doit s’exprimer rapidement pour communiquer des informations précises et vérifiées. Faute de quoi elle ne sera ni audible ni écoutée. D’autres concurrents, médias, victimes…- pourront alors construire le récit à sa place. Et elle perdra totalement le contrôle de la situation.”
Occuper très vite le terrain
Dans la nuit du 13 au 14 novembre dernier, François Hollande se rend à proximité du Bataclan, à Paris, quelques instants seulement après que la BRI a donné l’assaut.
Faire acte de contrition
A l’image de Sven Stein, vice-président de Volkswagen, s’inclinant le 28 octobre dernier devant un parterre de journalistes japonais, un responsable doit savoir exprimer ses regrets et présenter ses excuses. Une démonstration d’humilité essentielle pour tenter de faire taire les critiques.
Communiquer … mais avec sobriété
Quatre jours seulement après avoir été molesté, Xavier Broseta, le DRH d’Air France, apparaît dans une vidéo… qui va enflammer la twittosphère.
QUATRE CONSEILS POUR ANTICIPER LES CRISES
Par nature, les crises sont soudaines et inattendues. On peut toutefois prendre des dispositions pour les voir venir. Comptez de 30.000 à 50.000 euros si vous passez par une agence spécialisée.
1 Détecter les signaux faibles augurant d’un éventuel problème en adoptant un bon outil de veille sur Internet (Visibrain pour Twitter ou une simple alerte sur Google). On peut alors lancer des enquêtes en interne et se préparer.
2 Faire réaliser un audit des risques potentiels encourus par l’entreprise permet de mettre au jour ses propres failles. On forme ensuite des personnes référentes à la prise de parole sur chacun des risques identifiés, via des séances de média-training, avec des éléments de langage à la clé.
3 “Rédigez un manuel de crise pour consigner les premières réactions à avoir et les premiers messages à diffuser en fonction de scénarios types”, conseille Eric Giuily. Un outil très utile dans l’urgence, même si, selon Jean-Christophe Alquier, “un tel manuel ne couvre jamais totalement la réalité d’une crise.”
4 “Entraînez-vous une ou deux fois par an, grâce à des simulations accélérées sur une journée, avec débriefing à l’issue”, conseille Olivier Cimelière, auteur du Blog du communicant.
Avec Management