Dix des 18 ministres du nouveau gouvernement gambien, dont une femme, ont prêté serment au cours d’une cérémonie officielle ce mercredi, six jours après le retour dans le pays du nouveau président Adama Barrow.
Parmi les principaux ministres figurent deux avocats de formation : Mai Fatty, désigné à l’Intérieur et conseiller spécial de Barrow, et Ousainou Darbo, le chef historique de l’opposition à l’ex-président Yahya Jammeh, à qui revient le portefeuille des Affaires étrangères. Amadou Sanneh, l’ancien trésorier du principal parti d’opposition, a été nommé à l’Économie et aux finances.
Des opposants historiques
Darboe et Sanneh sont sortis récemment de prison. Ousainou Darbo, né le 8 août 1948, diplômé des universités nigériane de Lagos et canadienne d’Ottawa, et chef du Parti démocratique uni (UDP), avait été battu par Jammeh aux élections présidentielles de 1996, 2001, 2006 et 2011. Arrêté en avril 2016 avec d’autres opposants pour participation à une manifestation non autorisée et condamné en juillet à trois ans de prison ferme, il a été libéré sous caution sur décision judiciaire le 5 décembre, après la victoire de Barrow au scrutin du 1er décembre.
Quant à Amadou Sanneh, il avait été condamné en décembre 2013 à cinq ans d’emprisonnement pour avoir écrit dans une lettre ouverte à l’en-tête de son parti que deux militants de l’UDP risquaient la mort s’ils ne partaient pas en exil. Il a bénéficié lundi d’une grâce présidentielle.
Mai Fatty, né le 12 septembre 1969, a été pour sa part l’avocat de plusieurs opposants avant de créer en exil son propre parti, le Congrès moral de Gambie (GMC), en 2009, pour rentrer en Gambie en 2011.
Une femme au gouvernement
Parmi les autres ministres, on retrouve Isatou Touray, une dirigeante de l’opposition à Jammeh, qui dirigera le Commerce et l’Intégration régionale. La nomination d’une autre femme, Fatoumata Jallow Tambajang, membre de la coalition de Barrow et ex-ministre de Yahya Jammeh, au poste de vice-présidente, a suscité la controverse en raison d’une limite d’âge constitutionnelle pour ce poste.
Les ministres restants seront désignés « en fonction de la compétence des individus, de leur expérience et de leur professionnalisme », avait indiqué mardi à la presse le porte-parole de Barrow, Halifa Sallah. « Dès que les ministres auront prêté serment, ils se mettront au travail », avait-il ajouté.
Par ailleurs, comme il s’y était engagé le 28 janvier lors de sa première conférence de presse depuis son retour du Sénégal voisin deux jours auparavant, le président Barrow a changé le nom de la très redoutée Agence nationale du renseignement (NIA), considérée comme l’instrument de répression du régime de Jammeh.
Celle-ci devient “le Service de renseignements d’État”, selon un communiqué officiel lu mardi soir à la télévision publique. Ce nouveau service « s’abstiendra désormais de toute arrestation, détention ou activité inconstitutionnelle, en particulier au regard des droits civiques et humains », selon le texte.
Six semaines de crise
La Gambie sort d’une crise à rebondissements de six semaines provoquée par le revirement de Yahya Jammeh, qui a annoncé le 9 décembre contester la victoire électorale de Barrow, candidat d’une large coalition de l’opposition, une semaine après l’avoir reconnue.
Accueilli le 15 janvier au Sénégal, à la demande de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) qui craignait pour sa sécurité en Gambie tant que Jammeh était en place, Barrow a prêté serment le 19 janvier à l’ambassade de Gambie à Dakar.
Peu après, la Cedeao lançait une opération pour forcer le départ Jammeh, qui a finalement quitté le pays le soir du 21 janvier pour un exil en Guinée équatoriale, à la suite d’une ultime médiation mauritano-guinéenne.
Avec Jeune Afrique